Deux théories s'affrontent.
Pour la première - mettons "conservatrice" - , une parole une fois donnée, une décision prise, une promesse engagée valent pour toujours. Ainsi, par exemple (on en a déjà parlé ici) les engagements conjugaux et parentaux, et, dans la sphère ecclésiale, entre autres, les vœux monastiques, le célibat sacerdotal et plus largement la foi baptismale.
Pour la seconde - mettons "progressiste" ou "libérée" -, c'est la fidélité globale à soi-même qui compte, et ce "soi-même" n'a guère de permanence, promené au gré des années de circonstance en circonstance : comment pourrait-on s'enfermer dans des "oui" ignorants du lendemain? Comment pourrait-on y périr d'ennui, quand la vie est là, qui vous presse de changer pour être heureux ou le redevenir?
Bon, bon, bon.
Il est vrai que nous sommes toujours entre les deux : le fixisme dans des attitudes ou des pensées - voire des fidélités - ne permet pas d'épouser la souplesse de la vie, cette vie unique qui nous emporte en effet dans ses vagues toujours changeantes, toujours nouvelles. Le fixisme, c'est la mort.
Mais alors pourquoi promet-on des choses "pour la vie"? Pourquoi y a-t-il dans l'être humain cette espèce de désir du "pour toujours", s'il n'est qu'une illusion finalement desséchante?
Risquons une hypothèse : si ce désir du "pour toujours" habite le cœur humain, c'est qu'il correspond à quelque chose de vrai et de bon. S'il n'est pas au pouvoir de l'être humain de le réaliser soi-même, parce que la vie est trop difficile, trop fluante, trop changeante, c'est qu'il doit aller pour cela frapper à une autre porte que la sienne.
Nous venons ici, amis lecteurs, de faire sans le savoir l'éloge de la métaphysique, qui va chercher "meta", "au-delà de"...
Nous venons de nous souvenir de Platon et de Socrate, le premier racontant comment le second (au Vème siècle avant notre ère!) alla frapper à la porte de la divinité de Delphes pour être introduit à l'intelligence de lui-même, de sa propre destinée. Nous venons d'évoquer une humanité qui doit chercher jusque chez les dieux (ou chez le dieu, ou chez Dieu) pour entendre quelque chose à elle-même... et se débrouiller dans ses désirs!
Nous venons de parler de la vie "spirituelle", qui réclame à un Autre que soi de venir en soi faire le travail que soi-même ne peut pas faire, tout désireux qu'il soit de le faire.
Quand je lis l'évangile de Matthieu (Mt 5, 37) et l'injonction que Jésus y fait d' un "oui" ou d'un "non" fermes, ou la même recommandation reprise dans la Lettre de Jacques (Jc 5, 12), je me dis que nous ne nous en sortirons pas, dans cette société et cette culture où chacun vogue toujours au gré de ses désirs contradictoires, sans passer par la case de la "vie spirituelle", de la "vie intérieure" et de ce qu'elle offre comme apaisement.
Mais comme chantait l'autre (Joe Dassin, je crois, duquel je propose ici une interprétation sans doute inattendue) : "Qu'il est long, qu'il est loin, le chemin, papa!"
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