mercredi 30 mars 2016

Responsabilité des politiques

L'un des discours - nombreux, contradictoires, excessifs - que l'on trouve en nébuleuse autour des attentats de mardi dernier est celui des politiques. Mr De Wever, par exemple, atteste qu'il ne saurait le moins possible s'inscrire dans un discours de compréhension vis-à-vis des agresseurs, "que nous avons élevés chez nous, à qui nous avons tout offert", etc.  On comprend : c'est en partie vrai. Du reste, Monsieur Valls, en France, tient un propos à peu près analogue.
Et pourtant : il faut bien dire que l'attitude de ces jeunes terroristes, chez nous et en France, est le signe d'un échec d'une politique d'intégration. Certes, ils ont grandi dans nos rues avec les bénéfices d'une éducation d'Etat, et tout le reste des sécurités sociales qu'offre notre pays. Mais ils ont aussi grandi à quelques centaines de mètres, quelques kilomètres, seulement, d'une société qui étale son luxe et ses avoirs, auxquels ils ont dû se dire qu'ils n'auraient jamais d'accès.
Comment fait-on, quand on se sent ainsi exclu d'un gâteau partagé par quelques privilégiés?
On essaie d'être quelqu'un quand même, j'imagine. D'avoir de l'argent  quand même, ne serait-ce que pour frimer. Alors, on traficote - des sous, de la drogue, des voitures, des armes, et quelquefois, semble-t-il, sous l'oeil complaisant d'autorités locales qui récupèrent en échange une clientèle électorale facile. On "se débrouille" - on sait qu'on ne "vaut rien", alors on devient un "vaurien", tant qu'à faire, on se fait valoir.
Puis la tentation est là : on vous propose d'être quelqu'un, un héros, assassin sans doute, mais héros, héros à la dure, prêt à mourir martyr pour que s'arrêtent ces nouvelles injustices dont on est victime. La cause est grande : supprimer Satan, virer les suppôts de l'argent, vivre libres en Califat, donner sa vie!
De l'Islam, là-dedans : permettez-moi de penser qu'il n'y en a pas, ou guère. Ces pauvres garçons sont à peine capables de lire, alors, lire le Coran en arabe, hein...
Mais voilà des voyous radicalisés, devenus fanatiques, intégristes, terroristes, prêts à tout, prêts à mourir en explosant d'un coup plutôt de que mourir à petits feux dans une société qui les étouffe, qui ne les voit même plus.
Je ne les excuse pas: leurs forfaits sont horribles, ils sont coupables des pires crimes et méritent les châtiments les plus sévères.
Mais, malgré les recommandations inverses de certains politiques, j'essaie de comprendre.
Et j'accuse : on n'a, depuis trente ou quarante ans, rien fait pour eux. On ne les a pas écoutés, on n'a pas valorisé leur culture, on ne les a pas suivis quand ils quittaient l'école pour aller au chômage.
C'est une politique ratée.
Et que les politiques ne viennent pas dire que ce n'est pas de leur faute : ils portent une part de responsabilité, et de culpabilité. On aimerait les entendre le reconnaître, et essayer de proposer autre chose comme intégration religieuse, culturelle, scolaire, professionnelle, économique.
Vous entendez quelque chose, vous? Une proposition nouvelle?
Nada.
Des hommes (et femmes) publics se renvoient la balle, déplorent un immense manque de moyens - qui est réel : et c'est tout. Ah! Je ne sais pas comment l'Histoire jugera les cinquante dernières années de mon pays, ses réformes institutionnelles bâclées, ses à peu près idéologiques et ses réticences devant l'exercice affectif de l'autorité : mais je gage qu'Elle les jugera mal. Ce n'est pas glorieux!
(Tiens, y compris cette fausse démission, théâtrale, des ministres de la Justice et de l'Intérieur : fausse, car dans notre Royaume, à moins d'avoir aussi changé cela dans la Constitution, ce que je ne crois pas, c'est au Roi que des ministres remettent leur démission, et non pas à un Premier Ministre. C'est sérieux, d'après vous, de remettre sa démission à quelqu'un qui n'a pas le pouvoir constitutionnel de l'accepter, ou c'est seulement du cirque médiatique? Et on va où, avec ça?)
Mon Dieu, que tout cela manque d'à propos...

samedi 26 mars 2016

Pâques dans la conversation des hommes et des femmes...

On lit cette année, la nuit de Pâques, le récit du tombeau vide dans la version de saint Luc (24, 1-12). Impressionnant de constater ce que nous dit la diversité de ces textes. Ainsi, les femmes qui vont au tombeau au matin du radieux premier jour de la semaine, et qui le trouvent vide, sont-elles instruites, d'après Matthieu, par "un ange du Seigneur qui avait l'aspect de l'éclair"; d'après Marc, par "un jeune homme vêtu de blanc"; d'après Luc, par "deux hommes - andres duo, dit le grec : deux hommes au masculin - en habit éblouissant".
Chez Luc, deux hommes - porteurs certes d'un message céleste, ou divin, ce que signifie leur habit éblouissant - parlent à des femmes : la Bonne Nouvelle se mêle d'emblée à une conversation entre hommes et femmes. Les premiers invitent les secondes à ne pas garder le visage incliné vers le sol, à ne pas "chercher le Vivant parmi les morts", mais à "se souvenir" de ce que Jésus a dit en Galilée, de ce qu'il y a prédit de sa mort et de sa résurrection. La Vie s'invite dans la conversation des humains, hommes et femmes, la Vie venue de Dieu, la Vie plus puissante que toute forme de mort spirituelle ou corporelle.
Et la conversation continue, avec "les Onze" (Judas n'est plus là) "et tous les autres" : "Délire", disent ces derniers quand ils entendent les propos des femmes. La conversation sur la Vie qui se mêle désormais à nos vies passe par le déni du prétendu bon sens : celui-ci veut que la vie ne soit que la vie, et que la mort y mette un terme. Point c'est tout. Le reste, c'est "du délire".
Pierre - et l'Eglise avec lui - pourtant se lève et court au tombeau. Et ce qu'il voit - l'absence du corps, il n'y a plus que les linges - le laisse perplexe.
Des femmes instruites par la conversation d'hommes, puis instruisant elles-mêmes d'autres hommes - voici les premiers témoins puis les premiers acteurs de la Bonne Nouvelle qui bouleverse l'humanité : la mort n'aura plus jamais le dernier mot. Le Vivant n'est plus parmi les morts. Et les morts, ou les mourants, que nous sommes, les voilà conviés à devenir les vrais Vivants.
Pâques : la conversation des hommes et des femmes tournera maintenant autour de la Vie.

mardi 22 mars 2016

Comprendre le malheur belge

Je le sais, il n'est pas de bon ton, et il est souvent mal vu, de donner ne serait-ce qu'une ombre d'explication à la haine des "jihadistes" envers l'Occident.
Je suis belge, et ce soir, affreusement blessé moi-même par ce qui a blessé - et tué - des dizaines de personnes, belges ou non, dans le cœur de mon pays, que je trouve le plus beau du monde.
Mais...
Il y a ce que l'Eglise catholique, et beaucoup de chrétiens non catholiques, et beaucoup d'hommes dits "de bonne volonté" rappellent depuis si longtemps, des décennies et des décennies.
A savoir :
qu'on ne saurait être riche en méprisant les autres, sinon, cela vous revient comme un boomerang dans la figure, d'une façon ou d'une autre.
Nous sommes l'un des pays les plus riches du monde. Au cœur d'une Europe globalement riche, elle aussi.
Nous méprisons depuis des décennies le reste du monde - le sud africain, l'est proche ou moyen-oriental. Nous n'avons aucune politique sérieuse de développement qui nous engage réellement vis-à-vis de ces pays, sinon des politiques armées, par lesquelles nous leur procurons de quoi entretenir leur misère et notre bien-être.
Nos élections (fédérales, régionales) ne parlent jamais de cela : nous préférons nous concentrer sur l'âge de nos retraites et la préservation de nos acquis sociaux, sans jamais demander à nos candidats ce qu'ils comptent faire, concrètement, pour développer des politiques de mieux-être dans ces pays que nous pensons lointains.
Ils ne sont pas lointains.
Quand comprendrons-nous que, dans un monde "globalisé", devenu un village planétaire, c'est à nos portes que l'on se bat, que l'on meurt de faim et de soif, et que dès lors la religion est un prétexte comme un autre - souvent, quand, il n'y en plus d'autre - pour dire que ces inégalités, ça suffit?
Combien faudra-t-il encore d'attentats et de morts, avant qu'on ne pense à des projets fraternels, vraiment "humains", c'est-à-dire, considérant que l'humanité, où qu'elle soit, est une et possède des droits égaux, et que ce n'est pas parce que, par chance ou par hasard, nous vivons en Europe, que nous avons plus de droit à plus de confort?
On l'a tellement dit et répété... Et - vous pardonnerez au prêtre que je suis de le souligner - les papes en tête, depuis Jean XXIII au moins.
Et personne n'écoute...

mercredi 16 mars 2016

"Comprendre le malheur français"

C'est le titre du dernier livre en date, paru chez Stock, de l'excellent Marcel Gauchet, sociologue, historien de renommée internationale - l'un des grands et discrets intellectuels de l'Hexagone, et on se souvient de l'estime  que provoqua  en 1986 (j'étais alors l'un de ses étudiants) son ouvrage, paru chez Gallimard, intitulé Le Désenchantement du Monde. Une histoire politique du religieux. Il y montrait que ce "désenchantement" (Entsäuberung der Welt) prévu par Max Weber, en quelque sorte l'initiateur de la sociologie religieuse, c'est-à-dire la sécularisation ou la laïcisation de la société, s'accomplissait à partir de la doctrine chrétienne elle-même de la création, qui assigne au créé une légitime autonomie par rapport au créateur - au politique, une nécessaire autonomie par rapport au religieux.
Aujourd'hui, Gauchet nous parle de l'Europe et de la France - c'est-à-dire, aussi, un peu de nous : quand la France est grippée, l'Europe éternue.
Nous n'échapperons pas, dit-il, à une renégociation des accord fondateurs de l'Europe elle-même : le "brexit" ouvre une brèche dans laquelle beaucoup vont s'engouffrer des pays membres. Et, ajoute-t-il, c'est heureux : mieux vaut renégocier tout, et en douceur, que d'aller vers un effondrement brutal. Quel changement, tout de même! Quand j'avais dix-huit ans et terminais ma "rhéto", nous avions fait un séjour au Collège de l'Europe, à Bruges, et le Directeur de cet éminent établissement nous avait prophétisé que, bien vite, nous ne nous dirions plus "belges", "français", "italiens", etc., mais "européens", un peu comme les citoyens des USA se disent "américains" avant de se dire "texans" ou "californiens". Tu parles! Quarante ans (et des poussières) après, on se dit "flamand", "bruxellois", "wallon", "breton", "basque", "sicilien", et ainsi de suite! Il est par terre, le rêve de l'Europe, nous le voyons tous les jours dans l'incapacité des ses autorités à gérer ensemble, de concert, par exemple, l'accueil des réfugiés.
Gauchet n'est pas tendre non plus pour les politiques nationales ou régionales : la démocratie s'est plus qu'affaiblie partout, parce que l'alternance a partout perdu de son crédit. Qui pourrait dire, sérieusement, en France, que l'élection d'un nouveau Président de la République changera quelque chose à la situation économique, que ce Président soit de gauche, de droite ou du milieu? (J'ajoute que, chez nous, les gouvernements de coalitions, et de coalitions disparates selon les niveaux  ou les zones de pouvoirs, empêchent par leur formation même tout crédit possible encore donné à une alternance, évidemment). Or, l'alternance est le fondement même de la démocratie : en démocratie, il faut pouvoir un jour virer tout le monde et mettre à la place des "hommes nouveaux", comme on disait déjà dans la Rome ancienne. Gauchet fustige la "nomenklatura" politique de nos pays, une espèce de caste qui ne se renouvelle pratiquement pas, aux individus et aux idées finalement interchangeables et donc stériles, et qui s'interroge elle-même très peu sur son renouvellement effectif. Ce pourrait bien en effet être une cause prochaine de la disparition de la démocratie... à côté des résurgences nationalistes, des volontés d'isolement, de repli sur soi, etc.
Que faire?
Affirmer calmement, durablement, solidairement, les valeurs de "liberté, égalité, fraternité" pour tous : pour tous les peuples, pour toutes les religions, pour ceux qui n'en ont et n'en veulent aucune, pour toutes les minorités.
Redonner vigueur au débat public, refuser qu'il soit confisqué par les idéologues.
Faire parler chacune et chacun sur son bonheur et sur son malheur.
Et donc, apprendre à écouter l'autre, probablement d'abord avec son cœur plus même qu'avec ses oreilles...

vendredi 11 mars 2016

Statistiques...

Je ne vais pas souvent voir les statistiques de ce blog, mais là, j'en viens : du 11 février au 11 mars, me dit-on,
- 1144 lectures depuis la Belgique
- 203 depuis la France
- 95 depuis les USA
- 69 depuis la Russie
- 56 depuis l'Irlande
- 22 depuis l'Allemagne
- 22 depuis la Lettonie
- 16 depuis la Finlande
- 13 depuis l'Ukraine
- 9 depuis la Suisse.

Etonnant, non?

jeudi 10 mars 2016

"Ta Parole a percuté mon coeur"

Lundi dernier, je lisais avec des étudiants, pour le cours que je fais à Louvain-La-Neuve, la magnifique page des Confessions (livre X) dans laquelle Augustin raconte le déclic qui a ouvert en lui la vie spirituelle : Percussisti cor meum Verbo tuo, et amaui te, "Tu as frappé mon cœur de ton Verbe, et je t'ai aimé." C'est une allusion au moment de sa conversion : tandis qu'il se trouvait dans son jardin, à Milan, un rouleau des Lettres de Paul posé à ses côtés, le chant d'un petit enfant passant dans la rue l'a comme réveillé, qui disait : Tolle, lege!, "Prends, lis!" Augustin lut au hasard quelques versets de Paul, des versets qu'il savait déjà presque par cœur, mais à ce moment-là, le Livre est pour lui devenu Parole et, comme il le raconte des années plus tard, "la Parole a percuté son cœur".
C'est l'expérience que nous a rapportée Marc-André lors de la première de nos conférences de carême : comment le Livre, par la lectio, la lecture inspirée et inspirante, peut devenir en nous Parole adressée, murmure qui nous éclaire, nous transforme au plus profond : dans le même texte, Augustin dit que les "sens de son cœur" se sont alors ouverts, et qu'il a perçu le monde avec son cœur, avec  les sens de "l'homme intérieur qui est en lui" (interior homo), dans son "intériorité", là où le temps et l'espace disparaissent pour ouvrir en nous l'éternité.
Vie spirituelle du chrétien...
Que les jeunes, à travers leurs rencontres, leurs engagements, leur générosité, puissent en faire l'expérience un jour, c'est notre responsabilité : Myriam Tonus nous a rappelé la confiance que nous pouvions et devions avoir en eux pour cela.
Que les couples, soucieux de relire leur vie conjugale et non seulement de la subir, puissent aussi expérimenter cette Parole percutante, qui déprend les partenaires de l'idéalisation illusoire et de la volonté de mainmise de soi sur l'autre: c'est également un défi de et dans la vie spirituelle, que Nicole Jeammet nous a lumineusement montré mardi soir, en lisant en ce sens, par exemple, le récit du Cantique des Cantiques.
Dans notre itinéraire de Carême, nous avons ainsi été reconduits à notre intériorité, à notre "cœur", ce lieu où souffle l'Esprit, comme et quand il veut, pour nous rendre heureux et libres d'aimer.
Je remercie les intervenants de ces trois excellentes conférences, qui ont pu aider les paroissiens d'Enghien et Silly à grandir dans leur cheminement pré-pascal.
Je signale à tous que, bientôt et comme d'habitude, ces conférences seront disponibles, via le site internet du doyenné, et qu'on pourra les visionner sur YouTube, grâce aux compétences techniques de Samuel.
Merci à chacune et chacun : continuons ensemble notre route vers Pâques, accueillons en nous le don de Dieu et spécialement, en cette année Jubilaire, celui de sa miséricorde - samedi prochain à 20h00, à Petit-Enghien, une veillée de prière et de réconciliation est précisément ouverte à tous sur ce thème.

dimanche 6 mars 2016

Enfant prodigue, père miséricordieux, les deux fils...

Tout nous ressemble, dans le passage de l'Ecriture lu ce matin en Eglise, la troisième parabole du chapitre quinzième de l'Evangile de Luc. Une parabole souvent intitulée : "de l'enfant prodigue" ou "du père miséricordieux" ou encore "des deux fils"... Tout nous y ressemble, oui : l'envie de partir du cadet, de quitter une vie trop convenue, de "vivre enfin sa vie", de plaquer son vieux et les habitudes d'une maison qui peut rapidement s'avérer étouffante. L'envie de "tout claquer", "pour le plaisir", comme chantait autrefois Herbert Léonard! Sa perplexité, aussi - qui n'est même pas un remords : quand on a tout claqué, comment vivre, ou du moins, vivoter encore?  
Mais la réaction de l'aîné nous ressemble, aussi : comment, accueillir encore ce malpropre? Il a déjà tout dépensé... Lui permettre de reprendre sa place, de continuer comme si de rien n'était? Pire : lui faire fête! Lui faire la gueule, ça oui, le traiter comme il le demande lui-même, peut-être - en ouvrier, en esclave. Mais pas plus, il n'est plus fils, il en a perdu le droit.
Tout nous déroute, enfin, dans le même texte, tout nous déroute dans ces mots si simples, si droits, si purs du Père miséricordieux : "Il fallait bien faire la fête et se réjouir, car ton frère que voilà était mort, et il est revenu à la vie. Il était perdu et il est retrouvé."
Et on dit quelquefois que la Bible n'aurait rien à nous apprendre?
Elle nous montre le cœur de Dieu, et la distance entre lui et nous - nous qui sommes si peu enclins à la miséricorde.

samedi 5 mars 2016

Quand on ne fait pas le bien, on récolte le mal

L'Europe a donc décidé d'acheter l'aide de la Turquie pour "contenir" l'afflux d'immigrés qui fuient des situations horribles. Je l'ai dit dans un post précédent, c'est une attitude peu conforme à ses "valeurs" fondatrices. C'est contraire au bien commun, au bien des peuples humains.
Elle en récolte les premiers fruits amers : la Turquie ne se gêne plus pour contraindre sa presse d'opposition et ainsi museler la démocratie (déjà modeste chez elle, il faut le dire). C'est mal.
C'était prévisible : quand on ne fait pas le bien, on récolte le mal, un mal de plus en plus galopant.
Mais il paraît que, même en géopolitique, l'éthique est dépassée... On se contente du cynisme.
Sincèrement, si les choses continuent d'aller comme elles vont, je ne donne pas cher de notre peau. Non parce qu'un grand nombre d'étrangers nous demandent un asile provisoire, mais parce que nous ne nous montrons pas capables de le leur offrir décemment. C'est notre survie spirituelle, c'est-à-dire humaine, qui est en jeu.
Et nos politiques qui ne disent rien là-dessus...

mercredi 2 mars 2016

"Les jeunes"

Deuxième conférence du Carême, hier soir à Enghien : Myriam Tonus nous parlait de la jeunesse, de ses aspirations, de sa spiritualité. Des propos bienvenus, réconfortants, positifs, pour décrire ce "monde" qui quelquefois inspire aux adultes de la méfiance ou de la crainte. La conférencière a rappelé à plusieurs reprises le mot de la psychanalyste Françoise Dolto : "Les jeunes portent les symptômes des adultes." Ce que, quelquefois, nous sommes tentés de leur reprocher comme des défauts... c'est nous, les adultes, qui en portons davantage les stigmates : ignorance religieuse, désintérêt pour de grands idéaux, consumérisme comme seul idéal de bonheur, et ainsi de suite. Ce sont là, en effet, des maladies de l'âge adulte ("passe ton bac d'abord", le grand slogan qui a tant marqué ma génération, réussis, réussis, réussis, d'abord, tes études, ton parcours, et tu verras bien ensuite pour tes engagements...) J'ai souvent redit cela aux jeunes (élèves, des mouvements) depuis que je suis ici à Enghien : il y a une différence radicale entre "réussir dans la vie" (ce qui n'est pas très glorieux et ne rend pas toujours heureux) et "réussir sa vie" (ce qui ne se peut qu'en la donnant, sa vie.)
Myriam nous a bien rappelé cela, et que les jeunes, dans leur grande majorité, voulaient "réussir leur vie", et étaient prêts et prompts à la donner généreusement pour qu'elle le soit.
Entendons-nous ce message?
Hier, par contraste avec la limpidité et la luminosité du propos partagé, j'avais l'impression d'une communauté vieille, un peu usée, fatiguée, revenue de tout, dans une église sombre (il faut décidément songer à refaire cet éclairage de maison mortuaire). Impression personnelle due à un petit coup de blues? Peut-être, peut-être pas.