dimanche 24 septembre 2023

La "magnifique injustice de l'amour"

 Le mot est de ma chère Marie Noël, qui qualifie ainsi la miséricorde de Dieu : "la magnifique injustice de l'amour!" Il trouve une parfaite application dans la parabole proclamée aujourd'hui (dite "des ouvriers de la dernière heure", Mt 20, 1-16) : les ouvrier embauchés à la dernière heure reçoivent le même salaire - le salaire convenu - que ceux qui ont, comme ils le disent eux-mêmes en récriminant, "porté le poids du jour et de la chaleur." Inaudible dans une mentalité rétributive, évidemment. Mais, précisément, la grâce ne relève pas de la rétribution : elle est, comme du reste son nom l'indique, "gratuite". La grâce, c'est immérité, c'est ce qui ne se paie pas, jamais.

Nous n'avons pas - ou peu! - été éduqués à la gratuité de la grâce; on nous a bien davantage inculqué le salut par l'effort, genre "si tu es sage, tu auras une image!" Or l'Evangile proclame "Voici l'image que je te donne sans que tu l'aies mérité; autant que tu le peux, tâche d'y faire correspondre ta vie!" Renversement de tout. Conversion. La seule conversion, sans doute - la conversion à l'amour.

"N'ai-je pas le droit de faire ce que je veux de mon bien?", rétorque le maître du domaine à l'ouvrier de la première heure qui se plaint de cette apparente injustice. Et encore : "Vas-tu regarder avec un oeil mauvais parce que moi, je suis bon?" 

Oui, toute la question est là...

lundi 18 septembre 2023

La misère s'entasse dans les rues de Bruxelles

 Dans le Centre Ville de Bruxelles, la misère ne cesse de croître. De plus en plus nombreuses sont les personnes (en ce compris des enfants) qui dorment dans la rue ou dans les stations de métro. Il y a là quelque chose d'intolérable - quelle honte de voir ainsi une Ville, une Région, un Pays incapables de mieux accueillir ceux qui sont simplement en quête de dignité humaine. Une Ville, une Région, un Pays : ces divers niveaux de pouvoir, en effet, semblent se renvoyer la balle pour se débarrasser du problème. Mais ce que l'on voit ici à Bruxelles, on le constate aussi aux marges de l'Europe - en Italie, à Lampedusa, le gouvernement italien et les instances européennes peinent à collaborer réellement pour endiguer ce flux migratoire.

Un grand principe guide l'éthique sociale de l'Eglise catholique : la "destination universelle des biens", selon laquelle les biens de la terre sont à l'origine destinés à tous les êtres humains. La propriété privée n'est admissible que si son exercice ne contredit pas ce principe premier. Pour le dire autrement : lorsqu'une manière de posséder privément des biens de première nécessité (biens matériels comme l'eau, la nourriture, le logement, etc. , mais aussi culturels comme l'éducation, la santé, etc.) empêchent ceux qui y ont droit d'y accéder; lorsqu'une petite partie de la population mondiale (nous) entend posséder privément ces biens de sorte qu'une très grande proportion d'êtres humains sont empêchés d'y accéder, oui, alors la migration est légitime. Les migrants viennent chez nous chercher ce dont on les prive, et qui pourtant leur appartient de droit.  Je ne fais ici que formuler la foi catholique dans ce qu'elle a de plus traditionnel, comme le pape lui-même ne cesse de le répéter depuis le début de son pontificat.

Bien sûr, il faut réguler cette migration de masse, et cela prend du temps. Mais c'est la responsabilité première des responsables politiques d'Occident d'organiser cette régulation avec générosité. Il faut aussi, bien entendu, travailler diplomatiquement pour qu'en amont les raisons de migrer diminuent dans les populations fragilisées par la guerre ou, comme en Tunisie, par le tournant dictatorial du Régime en place... Travail de longue haleine, qui consiste à aider par tous les moyens au développement des populations subsahariennes ou proche-orientales, auquel une part de nos richesses devrait être consacrée. En parlera-t-on, dans la prochaine campagne des législatives, chez nous? Espérons. En attendant, la misère de ne cesse de grandir dans les rues de Bruxelles!

lundi 4 septembre 2023

Notre Evêque Luc

 Encore sous le charme de la célébration vécue hier à Malines, l'ordination épiscopale de Luc Terlinden. Un vrai bonheur, un moment de profonde joie évangélique - simplicité dans la grandeur du moment, humilité, fraternité, des mots qui veulent dire quelque chose pour le nouvel archevêque. Oui, comme beaucoup l'ont dit et le disent avec raison, "un coup de jeune pour l'Eglise de Belgique", une Eglise si souvent trop vieille, mais qui a besoin de signaux comme celui-là pour lui rappeler, et l'aider à rappeler à tous, la fraîcheur de l'annonce évangélique.

Luc a été depuis trois ans environ "vicaire dominical" au service de notre Doyenné de Bruxelles-Centre, en plus d'être "Vicaire Général" de l'archidiocèse. Il aimait célébrer la messe, deux fois par mois, dans les églises de ND Immaculée (Jeu de Balles) et du Sablon. ND Immaculée est une église dans laquelle se presse, le dimanche matin, le "petit peuple de Dieu", des personnes très modestes qui ont été - à leur grande surprise - invitées à occuper les premiers rangs dans la Cathédrale de Malines, hier, tandis que les jeunes servants de messe (garçons et filles) de cette même petite église de Bruxelles étaient conviés, pour leur grand bonheur, à servir la messe d'ordination. Voilà qui en dit long sur l'humanité chaleureuse du nouvel archevêque, qui augure bien de ce que nous attendons de l'Eglise tout entière, et que le pape François ne cesse d'appeler de ses voeux - même si certains nostalgiques emploient tous les moyens y compris (et souvent) les plus bas pour rêver tout haut d'une espèce de grandeur restaurée de l'Eglise omnipotente d'autrefois. Grandeur heureusement perdue - heureusement, car cette perte, que l'on espère définitive, nous permet de retrouver la saveur et la sève évangéliques dont nous sommes porteurs!

Bienvenue, Mgr Terlinden. Le 12 septembre prochain, à 19h00, nous vous accueillerons dans votre autre Cathédrale, celle de Bruxelles, et vous installerons donc sur votre autre siège épiscopal. Moi, je ne suis ici que le gardien des lieux. Vous, vous êtes ici chez vous!