vendredi 29 avril 2011

"The" wedding

J'ai un peu regardé les images, comme tout le monde.
Je veux dire : les images "du" mariage...
Frappé par ceci : le rituel de l'Eglise anglicane (de la "High Church", du moins) est beaucoup plus compassé (encore, diront certains) que celui de l'Eglise catholique. Pourtant, les témoignages recueillis en rue montraient des jeunes silencieux et impressionnés devant ces "pompes" liturgiques.
La liturgie nous dépasse et nous met devant un monde autre, dans lequel nous sommes conviés à entrer : elle nous initie au mystère de Dieu. D'où son côté énigmatique, quelquefois fastueux, décalé, etc. On ne saurait célébrer tout à fait "à la bonne franquette". Il y a dans la ritualité humaine et une continuité et une rupture avec le quotidien, et le dosage entre les deux est difficile à évaluer et à mettre en oeuvre. Si l'on en reste dans une trop grande continuité, on aplatit la liturgie et elle n'initie alors à rien. Si l'on accentue la rupture, on verse dans l'ésotérisme.
Ce matin, la solennité du rite était impressionnante et a manifestement conquis une jeunesse peu habituée (je ne parle pas des princes, mais des gens dans la rue) à elle. Et la délicatesse, la justesse, des propos de l'évêque anglican de Londres, qui assurait l'homélie, a rendu ce rite "parlant". Pas si mal, à côté de certains de nos bricolages...

mercredi 27 avril 2011

Joies de l'Octave

Pour la liturgie, Pâques est un jour de fête qui dure huit jours : une "octave". Toute une semaine pour accueillir dans nos vies la Bonne Nouvelle de la Résurrection, accompagnés par les récits évangéliques des apparitions du Ressuscité : aux femmes, à la Madeleine, aux disciples d'Emmaüs, aux apôtres, etc... Et toujours ce même scénario : Jésus apparaît - on ne le reconnaît pas -il fait un signe - alors on le reconnaît, mais lui disparaît, et on s'en va porter la nouvelle. Scénario important, constitutif sans aucun doute de notre foi pascale : nous-mêmes, en effet, ne bénéficions plus d'apparitions du Ressuscité, mais les signes qui permirent aux premiers témoins de le reconnaître nous sont toujours donnés dans l'Eglise. Les sacrements sont-ils autre chose, par exemple?
Au retour d'un bref séjour parisien, qui m'a permis entre autres de faire l'onction des malades à un vieil ami écrivain, je peux aussi partager ici la joie que j'ai éprouvée à rencontrer, comme j'avais espéré pouvoir le faire (je l'avais écrit ici même), le jeune auteur Alexandre Bergamini. Son récent essai Sang maudit m'avait beaucoup touché : cet homme a passé plus de vingt ans avec le Sida, et il est évidemment en révolte contre toutes les institutions qui, selon lui, ont contribué à propager plus qu'à freiner la maladie (l'Eglise, on s'en doute, n'est pas épargnée..., mais avant elle, les responsables publics de la Médecine française et certains médecins hyper-prescripteurs d'aujourd'hui). Outre le caractère émouvant du récit, ce sont ses échappées spirituelles qui m'intéressent, et nous avons pu en parler longuement ensemble lundi soir. La maladie a permis à Alexandre d'atteindre à une intériorité "habitée", elle lui a ouvert le compagnonnage de certains mystiques, des révoltés comme lui, que seule la prière apaise : ainsi s'est-il fait un ami de saint Jean de la Croix et de la Petite Thérèse. Il médite la rédaction d'un essai sur le premier, et j'ai voulu vraiment l'encourager dans cette voie : je suis sûr que cela donnerait aux mots du grand auteur espagnol une vigueur renouvelée. J'étais heureux de pouvoir partager avec lui, et avec René de Ceccatty, son éditeur au Seuil, cette longue conversation où une fraternité, une amitié sont nées, par delà les appartenances, les méfiances et les frontières trop commodes.
Et puis, je suis retourné au Louvre avec un ami prêtre qui m'avait rejoint pour la circonstance : antiquités égyptiennes, peintures médiévale et française du XVIIème siècle. Le miracle, toujours de revoir les de la Tour, et notamment le "Saint Joseph charpentier" qui est une leçon de théologie : dans l'enfant Jésus tenant un cierge et éclairant ainsi avec parcimonie le travail de son père qui vrille une poutre (la future croix?), il y a Dieu, illuminant de l'intérieur le labeur humain et sa souffrance, il y a la promesse du sens, du salut déjà offerts, là, et de la résurrection déjà présente. Génie du peintre...

vendredi 22 avril 2011

Maltraité, il n'ouvre pas la bouche...

La liturgie de ce Vendredi Saint, dans l'Office de la Passion, nous donne à entendre l'un des Chants du Serviteur Souffrant, dans le prophète Isaïe (Is 52, 13-53, 12). Texte étrange, sublime, dont il est difficile, sinon impossible, de savoir qui précisément il évoque, du point de vue de l'histoire. Texte que les chrétiens toujours ont appliqué au Christ, portant sur lui le poids et le péché du monde, du mal, du malheur... "C'étaient nos souffrances qu'il portait, nos douleurs dont il était chargé... Et nous, nous pensions que c'est par Dieu qu'il était châtié, frappé, humilié... Or, c'est à cause de nos fautes qu'il a été transpercé, c'est par nos péchés qu'il a été broyé... Et c'est par ses blessures que nous sommes guéris." Voici Dieu, non pas le Dieu "dont nous pensions qu'il châtiait, frappait, humiliait" l'un de ses enfants. Voici Dieu lui-même frappé, châtié, humilié, parce que, le comprendra-t-on enfin, telle est sa nature, que d'être dans la com-passion, que de ne pas pouvoir regarder sa créature souffrante sans souffrir avec elle, que de ne pas pouvoir ressentir l'humiliation des humiliés sans être le premier d'entre eux, que de ne pas pouvoir être le premier des "châtiés"?
Je lis, parcourant sur la "toile", de ci, de là, des blogs intégristes qui sont horrifiés devant des expositions "artistiques", en Avignon ou à Hasselt, mettant à mal le Christ, et qui voudraient fulminer, les détruire, pour préserver "l'honneur de leur foi"! Quel contresens! Je ne dis pas qu'il faut favoriser le mauvais goût, et beaucoup d'attaques anti-chrétiennes pèchent plus par inesthétisme et provocation bêtasse que par vigueur intellectuelle! Mais pourrait-on humilier Dieu plus encore qu'en ce Vendredi de Passion où il veut se montrer à nous dans la déchéance qu'il a lui-même choisie? A Hasselt, en particulier, du reste, l'exposition n'a rien de dégradant : elle montre, avec un certain réalisme, l'Incarnation sacramentelle de notre Dieu en Jésus. Chacun jugera, s'il le veut...
En baisant la Croix, ce soir, nous adorerons un Dieu qui nous adore jusque dans nos déchéances, un Dieu agenouillé devant l'humanité tombée, pauvre, sale, pervertie, compromise, malheureuse, enfin, déchue.
Là est la est vraie - la seule - grandeur de Dieu.
Là est la leçon - enfin entendue? - de ce Grand Vendredi!

jeudi 21 avril 2011

Il les aima jusqu'au bout...

Au soir du Jeudi Saint, c'est par un repas que Jésus manifeste aux siens et, à travers eux, à l'humanité, son amour "jusqu'au bout". Un repas rituel, certes, le repas pascal qui sédimente en lui tant de significations : allégresse des moissons, libération de l'esclavage, bénédiction pour les bienfaits de Dieu, et, en Jésus, don de la Vie, du corps et du sang livrés en nourriture.
Nous adorerons ce soir, après avoir commémoré la Cène en célébrant nous-mêmes, comme tant de générations avant nous et après nous, ce repas pascal, c'est-à-dire après l'avoir rendu, par le rite, strictement contemporain de nos existences éphémères, nous adorerons le don de l'Amour. Peut-on aller plus loin dans l'offrande qu'en se donnant soi-même en nourriture? Oui, jusqu'au bout, jusqu'à ce bout-là, jusqu'au bout du bout, Dieu aime l'humanité...

samedi 16 avril 2011

Entrée dans la Semaine Sainte

Nous voici donc entrés dans la Grande et Sainte Semaine, la Semaine des plus intenses méditations, de la plus grande intériorité, du plus grand recueillement devant le mystère de la Vie, de l'Homme, de Dieu. Nous y introduit dans l'Office des Rameaux et de la Passion la lecture de l'évangile de Matthieu qui raconte la trahison, l'arrestation et la mort de Jésus jusqu'à sa mise au tombeau. Comment lire ce texte aujourd'hui et l'entendre, l'entendre vraiment, sans un arrêt sur les deux trahisons qui y sont narrées : celle de Judas, qui permet l'arrestation et va conduire le protagoniste à la désespérance et au suicide par pendaison; celle de Pierre, annoncée par Jésus luî-même, et qui, comme plus forte que lui, s'impose au premier des Apôtres, et par trois fois, et le conduira à pleurer sur sa pauvreté? Les présents événements médiatiques (trop médiatisés, d'ailleurs, et on apprend ce soir avec quelle gabegie dans les chaînes de télévision) nous mettent sous les yeux une autre trahison, d'un successeur d'Apôtre. Nous entrons dans la Semaine Sainte avec ce scandale en nos coeurs. La question devient : nous conduira-t-il, ce scandale, à la désespérance et serons-nous Judas qui se suicide, se liquide, se supprime, Judas figure non tant de la trahison mais de la mort spirituelle? Serons-nous Pierre, qui pleure? Entrer dans la Sainte Semaine, dans la Grande Semaine, en pleurant, en pleurant sur le malheur du monde, en pleurant sur notre péché, sur le péché des hommes, sur leur complicité avec le Mal qui les envahit, peut-être est-ce la seule attitude spirituelle aujourd'hui. Celle d'un coeur "contrit", comme dit le Psaume 50, mais dans le sens alors étymologique de ce terme : cor contritum, "coeur broyé", "coeur brisé", brisé de chagrin, comme on peut l'être devant l'offense faite au Juste, à l'Innocent, devant "la victime" offerte et prise en otage. En lui sont toutes les victimes. Si nous voulons l'espérance de Pâques, il faut entrer courageusement dans l'agonie que le même évangile décrit à l'orée de la Passion, la demande que "le calice" passe loin de nous. Nous ne serons pas épargnés par le Mal - l'Eglise jamais ne le fut, pauvre fille perdue, pauvre prostituée du monde, pourtant élue "Epouse" par le Christ, comme dans le Cantique admirable du Premier Testament, devenue "toute belle" par le seul regard amoureux du Bien-Aimé. Nous n'éloignerons pas le calice de la honte, nous le boirons avec le Christ. Mais alors nous serons en droit d'exiger que justice soit faite et que, précisément parce qu'Elle est l'Epouse sauvée, l'Eglise en elle fasse aussi le ménage et corresponde, sans vengeance mais avec droiture, à la dignité de ce qu'Elle devient dans la Sainte Semaine.

vendredi 15 avril 2011

Ecoeurement et espérance

Ecoeuré, ce soir, comme tout le monde, je pense, devant l'interview donnée hier par l'ex-évêque de Bruges. Cet homme est un pervers qui doit être non seulement soigné, mais mis à l'écart et empêché de nuire, réduit sinon à "l'état laïc", du moins... au silence! En même temps, c'est sans doute un dernier soubresaut d'une manière d'être Eglise en Belgique, qui a prévalu depuis des décennies, une manière glorieuse "selon le monde", une manière d'arrogance aujourd'hui devenue rigoureusement intolérable. Ou bien l'Eglise dira son message humblement, se mettant autour de la table dans le dialogue des communautés, des esprits, des courants de pensée, des religions, ou bien elle disparaîtra complètement de la scène publique. Ces récents événements précipitent, sans le vouloir mais au fond tant mieux, ce choix devant lequel nous, chrétiens, nous trouvons aujourd'hui : "arrogance et disparition" ou "humilité et présence". La seconde formule - comme on dit d'une formule chimique - a ceci pour elle : elle est, des deux, la seule évangélique. Je sors d'une rencontre avec les responsables des mouvements de jeunesse d'Enghien et de Silly, une belle rencontre, bellement orchestrée par Gauthier, un ancien chef scout, toujours soucieux de l'animation auprès des jeunes. Ils sont demandeurs de la présence de l'Eglise parmi eux, ces mouvements, oh oui, on le sent, ils le disent. Mais d'une présence sur le mode de la "formule" numéro deux, plus haut évoquée. Et comme ils ont raison! J'ajoute, enfin, pour conclure cette soirée et cette journée qui fut riche, une nouvelle fois, de rencontres, de partages et d'indignations : il faudrait tout de même que nos évêques relaient auprès du Saint Siège, de façon à être entendus, s'il vous plaît, cette demande d'un encouragement à l'humilité, au dialogue, à la discrétion évangélique. Pardon, Messeigneurs, on n'y est pas!

jeudi 14 avril 2011

Lectures du moment

Toujours il faut avoir des livres en route... J'ai lu avec un certain effroi et en même temps plus que de l'intérêt, une vraie sympathie et, si le mot ne risquait pas d'être mal compris, une vraie com-passion, le livre-récit d'Alexandre Bergamini, que les éditions du Seuil où il est publié ont tenu à m'envoyer (A. BERGAMINI, Sang Damné, Seuil, 2011, 238pp.) L'auteur y raconte ses quelque vingt années de vie avec le sida, l'expérience que c'est non seulement d'être malade, avec les tâtonnements de la médecine, mais malade de cette maladie-là, avec sa part de honte, ce que cela remue dans les tréfonds du passé comme blessures enfouies. C'est un livre courageux, difficile, sans concession, un récit qui envoie balader les faux-prétextes, les faux-semblants, les fausses consolations, mais un texte où ne manquent pas les ouvertures spirituelles. Quelquefois, la maladie et ce qu'elle engendre en lui comme rejet viscéral des institutions, lui fait frôler quelque chose de la rencontre mystique : "Les mystiques escortent, écrit-il. (...) En état de grâce, proche de l'enfance, en étroite relation d'amitié avec Dieu. Un Dieu qu'ils choisirent sans serviteur ni soumission. Ils prodiguent la liberté d'être soi-même Dieu, sans crainte, avec joie et humilité." (p.171) J'espère prochaînement rencontrer cet auteur et aller plus loin avec lui dans cette échappée vers la vie spirituelle que, paradoxalement, la maladie - cette maladie-là - a ouverte en lui. Nous espérons pouvoir dîner ensemble le lundi de Pâques. L'autre livre, d'un ami, concerne le poète et moraliste italien du début du XIXème siècle Giacomo Leopardi . C'est un essai du cher René de Ceccatty intitulé Noir souci (Flammarion, 2011, 265pp.) Ici encore, une ode à la liberté chez l'écrivain dont il décrit la brève existence, les continuels ennuis de santé, la vie familiale contrariée, mais, à travers tout cela, le génie créateur. Du coup, dans la traduction du même René, un coup d'oeil quasi quotidien sur les Chants de Leopardi (réédités en Rivages poche/ Petite Bibliohèque, 2011, 378pp.) Et, bien sûr, comme dit dans un post précédent, Proust chaque soir désormais avant le dodo, l'intégrale de La Recherche en Pléiade, cette extraordinaire symphonie, la description des états d'âme : une leçon d'introspection hors laquelle il n'est point, non plus, de vie spirituelle. Je ne pourrais pas vivre sans les livres, sans ces échappées vers des univers humains si différents souvent du mien, mais qui le rejoignent par le fond, par l'intérieur. Après tout, à chacun sa drogue, hein!

samedi 9 avril 2011

Lazare, intacte émotion

Tous les trois ans (et c'est le cas cette année), au cinquième dimanche du Carême, la liturgie catholique, fidèle à la plus antique tradition, nous donne à lire pratiquement l'intégralité du chapitre onzième de l'évangile de Jean : l'épisode de la résurrection de Lazare. Cet épisode était destiné (et l'est toujours) aux "scrutins" (c'est-à-dire : aux choix) décisifs des catéhumènes qui doivent à Pâques recevoir le baptême. Or, tout y est déroutant... Je ne reviendrai pas ici sur ce qu'en a dit, magnifiquement, Lytta Basset, lors de sa Conférence de Carême chez nous, mêlant son deuil et celui des deux soeurs, Marthe et Marie, et celui de Jésus. Mais combien ce texte est étrange... La lenteur de Jésus, d'abord, à se mettre en chemin, alors que le texte insiste pour dire qu'il "aimait" Lazare, et Marthe, et Marie, et qu'il savait son ami très malade... Ses paroles prophétiques et paradoxales, parlant du "sommeil" de son ami, alors qu'il évoque sa mort, et réduisant par là, si l'on veut, la mort humaine, inévitable, à un sommeil... L'incompréhension des siens, la nôtre aussi sans doute, celle de Thomas, notre "jumeau", puisqu'on dit là que telle est la signification de son nom, Thomas le douteur, Thomas l'impertinent, Thomas qu'on aime tant, Thomas qui nous ressemble, Thomas qu'on reverra après Pâques, Thomas qui aura besoin de voir pour croire... Tellement nous, vraiment, notre jumeau... Le deuil des deux soeurs, Marthe et Marie, Marthe la plus forte extérieurement, Marie cloîtrée dans son chagrin, dans sa dépression peut-être (Lytta dixit), oui, et leur reproche, commun : "Si tu avais été là, mon frère ne serait pas mort!" Oh Ce reproche! Le reproche qu'il faut faire à Dieu, et au Christ, devant la cruauté de toutes nos morts, le reproche de ce petit ménage, entendu avant-hier devant leur bébé mort-né : "Dieu n'est pas là!" "Si tu avais été là..." Oh! Entendre jusqu'au bout ce reproche, dont Jésus du reste ne s'offusque pas, ce reproche qui fait partie de la foi. Et qui le nie par vertu se prive tout simplement de croire... Et cependant, et tout de même, l'assaut de confiance de Marthe, devant Jésus qui lui dit des choses étonnantes : "Je suis la résurrection et la Vie. Celui qui croit en moi, même s'il meurt, il vit. Crois-tu cela?" Et, elle : "Oui, Seigneur!"... Et la colère de Jésus, qui tremble parce que malgré tout on ne le croit pas sur parole, et qu'il va falloir qu'il fasse un signe extraordinaire... Et la douleur de Jésus, obligé de ramener de la mort, où il était bien et déjà ressuscité avec lui, et déjà en Dieu, son ami Lazare, pour que les autres croient qu'en lui est la Vie. Pas un cadeau qu'il lui fait, à Lazare, qui va devoir "re-mourir". Ce n'est déjà pas drôle de mourir un jour, une fois, mais alors, deux fois, un autre jour... Jésus s'y résigne dans la colère... Et le mot, alors prononcé : "Déliez-le, et laissez-le aller!" Déliez-le de tout, de ses bandelettes qui l'emprisonnent dans la tombe, de tout ce qui le retient, de tout ce qui l'entrave. Oh! Découvrir encore et encore que le Christ est là pour notre liberté, pour nous défaire de nos emprisonnements, oh, respirer avec lui l'air de l'exode, quitter les esclavages... Et le scrutin, aux catéchumènes, et à nous-mêmes : Voici la foi. Voici le Christ. Lazare, toi, futur baptisé, veux-tu venir dehors, veux-tu devenir signe de la Vie? Dans toute la littérature universelle, je ne crois pas connaître texte plus grand que celui-là.

dimanche 3 avril 2011

Mozart, son Requiem

Moment intense pour moi dans le temps de Carême, hier samedi soir à Enghien : l'interprétation magistrale du Requiem de Mozart par les Choeurs d'Enghien, par des instrumentistes et des solistes de premier plan, sous la direction de Michel Vandenbosche, organiste titulaire d'Enghien et chef de Choeur. On a beau savoir que c'est une oeuvre de commande, l'émotion qui passe dans certains morceaux (l'Agnus, par exemple et les modulations sur le sempiternam) font frissonner : ce génie a compris, à pas d'âge - mais sentait-il déjà la mort en lui? - l'effroi chrétien devant la mort, et le cri chrétien que la mort fait pousser devant Dieu. Il faut des personnes d'une grande qualité d'âme - les quelque cent cinquante musiciens, choristes, solistes, instrumentistes - d'hier, pour restituer comme ils le firent la grandeur de cette musique, qui nous met à fois au bord du tombeau et aux sources de l'espérance. Puis-je citer ici l'interprétation exceptionnelle que j'ai relevée chez le ténor Sébastien Romignon, visiblement encore jeune interprète et je l'espère promis un avenir à la hauteur de son talent et de son travail.