jeudi 28 août 2014

Eloge de saint Augustin, éloge de la lecture

Au soir de cette journée où l'Eglise a célébré saint Augustin, une journée remplie pour moi de rencontres si émouvantes, je retrouve dans mes notes à propos du Docteur d'Hippone que j'ai déjà cité ce matin, cette remarque que fit l'écrivain français Philippe Sollers, dans Le Monde, à propos de lui et des Confessions :

"Lire, c'est entrer en soi-même, apprendre à se considérer comme un monde de signes. En somme, le Diable ne voudrait pas que je me déchiffre, alors que Dieu ne demande pas mieux!" (16 octobre 1998, à propos des Confessions, repris par A. GESCHé, Les Mots et les Livres, II, 2004, p. 106.)

Je pense à tous ces enfants, à tous ces jeunes, qui, rentrant la semaine prochaine à l'école et, en particulier dans "nos" écoles (si j'ose ainsi dire, sans aucun instinct de propriété, mais enfin c'est tout de même là un grand service que l'Eglise catholique rend et continue de rendre à la société dans la Communauté Wallonie-Bruxelles, en administrant des écoles, et pas toujours avec la reconnaissance qu'on souhaiterait!), quand je pense à ceux vont apprendre à lire, ou continuer d'apprendre à lire, je révère ce mot de Sollers à propos d'Augustin.

C'est qu'on apprend à lire toute sa vie, et dans le meilleur sens du terme, cela signifie en effet qu'on n'apprend pas seulement à déchiffrer les lettres et les mots de sa langue maternelle ou d'autres langues (je pense aux élèves en immersion, à ceux qui "font" encore du latin et du grec - mes anciennes passions! -) mais que, ce faisant, en effet et comme dit Sollers, on apprend à se déchiffrer soi-même, entreprise spirituelle jamais achevée.

Les enseignants qui mènent auprès des élèves ce beau travail d'apprentissage, en primaire ou en secondaire, qui tentent de faire observer la grammaire des langues (des codes qui ne sont pas arbitraires, mais qui en réalité révèlent une vie, une sensibilité, une culture), ces enseignants, comme je les trouve indispensables. Sans eux, nous serions dans le chaos, dans le noir de toute pensée, livrés à nos instincts les moins domestiqués.

Et on trouve cela normal, et il y a même des crétins, eux-mêmes incapables de penser, pour estimer qu'on les paie trop!

Je les félicite, pour ma part, et les encourage de tout cœur à aider enfants et jeunes à se déchiffrer eux-mêmes en apprenant leur langue maternelle et les autres parlers humains, qui sont autant d'ouvertures principales sur le monde.

Quem tu imples, subleuas eum

Joie de fêter Augustin aujourd'hui dans la liturgie de l'Eglise. Repris ce matin, pour ma méditation quotidienne, quelques passages du Livre X des Confessions, au n°39 :

"Quand tout mon moi sera fixé à toi, il n'y aura plus nulle part douleur et travail. Ma vie pleine de toi sera vivante.
Celui que tu combles, tu l'allèges." (Quem tu imples, subleuas eum, admirable formule dont je veux retranscrire le latin...
Je la veux, cette formule, et je vous l'offre,  pour nourriture de la journée!)

Et j'adresse au Collège d'Enghien mes très sincères vœux de bonne fête!

lundi 25 août 2014

"Peut-on se passer de Dieu?"

Le numéro de cette semaine du Nouvel Observateur comporte un intéressant dossier intitulé : "Peut-on se passer de Dieu?" Ecrivains (dont le cher Emmanuel Carrère, qui sort maintenant un roman sur saint Luc, Le Royaume, chez P.O.L., que j'attends avec impatience), philosophes spécialistes  de l'antiquité (Monique Dixsaut) ou de la pensée contemporaine (Michaël Foessel) y sont, entre autres, convoqués, pour raconter comment Dieu continue d'être présent à l'horizon de la pensée d'aujourd'hui, et comment on ne saurait sans plus - et sans mal - renvoyer aux oubliettes l'idée même de transcendance. Un extrait, de Foessel justement (chaire de philosophie à l'Ecole Polytechnique, Université de Bourgogne, Institut Catholique de Paris) : "Le Dieu des monothéismes réalise alors ce qui manque si cruellement à notre époque : la réconciliation entre la vérité et l'événement.  'Donne-nous une vérité et nous bâtirons un empire' : tel pourrait être le mot d'ordre commun des Eglises et des révolutionnaires. C'est dans cette perspective que Slavoj Zizel, par exemple, défend l'héritage chrétien. Il interprète la dogmatique religieuse comme une arme contre la médiocrité libérale : le Décalogue plutôt que les droits de l'homme, la guerre contre les marchands du temple plutôt que la prospérité bourgeoise. Le détour par Dieu permet de restituer des majuscules à des mots qui ont perdu de leur éclat à la fin du XXe siècle : la Révolution, la Lutte et, finalement, la Politique elle-même." (Nouvel Observateur, n°2598 du 21 au 27 août 2014, p.65)
A méditer, non?

samedi 23 août 2014

Scandale et mystère de l'Eglise

S'il y a un grand contentieux entre nos contemporains et la foi chrétienne (plus spécifiquement même catholique), il me semble surtout porter sur l'Eglise, dont les lectures bibliques de ce dimanche nous instruisent.
Alors que dans d'autres parties du monde, l'Eglise (catholique) apparaît comme un recours devant des Etats peu respectueux des personnes, chez nous, c'est souvent l'inverse. Cela tient à notre histoire occidentale, durant laquelle on peut dire que, de façon récurrente,  l'institution ecclésiale s'est comportée en puissance politique, soucieuse de s'imposer sur le plan temporel. La "séparation" des pouvoirs, largement inaugurée à la Révolution française, remise en cause (pour des motifs politiques d'unification de son Empire tout neuf, où il voyait que l'Eglise devait jouer un rôle majeur) par Napoléon Ier, réactivée par les lois Combes de 1905 en France (mais pas chez nous, ni en Alsace-Lorraine...), cette séparation donc a sa grandeur : elle trace "à peu près" des sphères d'influence et d'action. Elle a ses limites : il est évident (sauf pour quelques idéologues, y compris chez nous) que le religieux ne relève pas seulement de la sphère privée. Il constitue un élément sociologiquement repérable dans toute organisation politique, qui doit en tenir compte (si elle ne le fait pas, le religieux se rappelle à elle avec brutalité : voir la situation actuelle de quelques guerres dans le Proche ou Moyen-Orient.)
Par certains côtés, l'Eglise - je parle toujours de l'Eglise catholique - relève de cette "institution" religieuse, qui indispose tant de monde, à l'extérieur ou l'intérieur d'elle-même. Faut-il pour autant vouloir sa fin ou sa perte (comme d'aucuns "maçons" ou anticléricaux rabiques le souhaitent et le proclament chez nous par leurs propos ou leurs attitudes - j'ai vu récemment lors de funérailles dans une église de mes paroisses s'exprimer des rejets avec une vulgarité et un manque de dignité publique qui laissent pantois!)?
Sur un plan stratégique, ou idéologique, on peut encore comprendre. Même si le respect des "convictions", comme on dit , passe par le respect du religieux et de ses manifestations,  pour autant qu'elles ne contreviennent pas à l'ordre public. (Il y aurait beaucoup à dire, là-dessus, sur le concept si souvent agité de "neutralité", qui me semble, même étymologiquement, relever de la nouillerie : personne n'est "neutre" à moins d'être une nouille et de n'avoir pas de conviction, de colonne vertébrale, de pensée. Mais bon, passons.)
Du point de vue de la foi chrétienne, qui en définitive nous intéresse le plus, l'Eglise est le Corps actuel du Christ, sa présence agissante dans le monde. Les lectures de ce dimanche nous rappellent cela : quelles que soient les remarques philologiques qui doivent être faites sur le passage entendu (la profession de foi de Pierre et la "remise des clés" que Jésus lui confie), notamment quant au moment de sa rédaction (bien après la mort de Jésus, sans aucun doute, et dans le contexte d'une Eglise naissante), on ne saurait nier que Jésus lui-même ait voulu confier à une assemblée, à une communauté, le soin de sa présence permanente dans l'espace et le temps des hommes. Et que les Apôtres - les Douze, au départ - et Pierre en particulier, jouent là-dedans un rôle premier, un rôle de convocation, d'appel, d'authenticité de cette présence.
L'Eglise historique a-t-elle toujours été digne du rôle que Jésus lui a confié et continue de lui confier? Evidemment, non.  En même temps, pour être honnête, elle a aussi souvent permis d'exalter la grandeur humaine dans de nombreux domaines (de générosité - voyez les saints hospitaliers et consolateurs -, d'intelligence - voyez les Pères de l'Eglise -, de pacification - voyez le rôle récurrent et actuel de la diplomatie vaticane dans le monde - d'esthétique et de beaux-arts, voyez les chefs-d'oeuvre en peinture, en sculpture, en architecture, en musique, que l'Eglise a contribué à susciter, etc.) Humainement l'Eglise a été et reste ce qu'elle a pu et ce qu'elle peut - mélange de putasserie et de sainteté. Mais ce mélange est porteur du Christ, et je reste convaincu que quiconque veut bien accueillir ce mélange et se pencher sur lui y trouve la présence inattendue de Celui qui s'est remis à des hommes, de pauvres hommes, pour porter sa Parole et son Feu.
Bernanos, le grand écrivain français, a dit là-dessus des choses remarquables  lorsqu'en 1936, lors de la Guerre d'Espagne, il a rédigé contre les franquistes et les compromissions des évêques espagnols avec eux, dans Les Grands Cimetières sous la Lune, des propos incisifs, parlant de l'Eglise : "Je ne la souhaite pas parfaite, elle est vivante. Pareille au plus humble, au plus dénué de ses fils, elle va clopin-clopant de ce monde à l'autre monde; elle commet des fautes, elle les expie, et qui veut bien un moment détourner les yeux de ses pompes, l'entend prier et sangloter avec nous dans les ténèbres. Dès lors, pourquoi la mettre en cause, dira-t-on? Mais parce qu'elle est toujours en cause. C'est d'elle que je tiens tout, rien ne peut m'atteindre que par elle. Le scandale qui me vient d'elle m'a blessé au vif de l'âme, à la racine même de l'espérance. Ou plutôt, il n'est d'autre scandale que celui qu'elle donne au monde." (Les Grands Cimetières sous la Lune, in G. BERNANOS, Essais et écrits de combat, Gallimard, Pléiade, 1971, p.426.)
Toute la page est à lire, comme une méditation parfaite qu'un chrétien peut - et doit - poursuivre  à propos de l'Eglise, à laquelle on ne lui demande pas de s'en remettre comme un partisan à son Parti, mais en laquelle on lui demande de croire, précisément parce qu'elle est un objet de foi - et d'espérance!

jeudi 21 août 2014

Déclaration commune de Mgr Léonard, du Grand Rabbin Guigui et de Mr Noureddine Smaili

Il me semble important de relayer sur ce blog la déclaration suivante, faite aujourd'hui :

"Le nombre élevé des victimes innocentes, des populations déplacées, des lieux de cultes détruits, ou des droits bafoués dans un grand nombre de régions du monde, ne laisse personne indifférent. Les événements atroces qui secouent le monde nous interpellent pour plusieurs raisons. D'abord il est tout à fait justifiable de craindre les implications de ces événements sur la sécurité du monde entier; beaucoup d'indices laissent présager que ces conflits ne resteront pas confinés aux régions dans lesquelles ils se déroulent. Ensuite il est de notre devoir moral à tous de faire preuve de solidarité avec toutes ces populations qui encourent une série de malheurs incessants; il ne s'agit point d'importer les problèmes de ces régions chez nous en Europe, mais d'essayer de contribuer à l'exportation de solutions.
"Nous jugeons qu'il nous incombe, à nous représentants des trois religions en premier lieu, de condamner toutes les exactions commises au nom de la religion. Aucune religion ne cautionnera la mise en péril de la stabilité, la paix et la cohésion entre les différentes constituantes de la société. Bien au contraire, l'esprit de la religion dicte la promotion du vivre-ensemble et la préservation de la vie humaine sur terre. Rien ne peut justifier l'expulsion ou l'extermination des minorités ethniques, religieuses ou autres. On a beau comprendre l'origine et les variantes des conflits qui sévissent dans ces régions, on s'étonne néanmoins des discours qui instrumentalisent la foi pour haranguer les foules en vue de les entraîner dans une guerre des civilisations, ou entre les communautés religieuses.
"Loin des discours politiques de circonstance, nous condamnons la violence perpétrée au nom de la foi. Nous lançons également un appel solennel au respect de l'autre, indépendamment de sa croyance, sa race, sa couleur, son origine ethnique ou culturelle. Nous tenons également à souligner notre engagement à prendre distance de toutes les formes d'amalgames qui puissent confondre appel à la foi et empiètement sur la croyance d'autrui.

Bruxelles, jeudi 21 août 2014,

+ Mgr André-Joseph Léonard, Archevêque de Malines-Bruxelles
Grand Rabbin de Belgique Albert Guigui
Mr Noureddine Smaili, Président de l'Exécutif des Musulmans de Belgique."

samedi 16 août 2014

Transgresser nos frontières...

Impressionné par les lectures de ce dimanche...
L'Evangile, d'abord (Mt 15, 21-28) où Jésus, le Juif, se laisse en quelque sorte, et si j'ose dire, "évangéliser" par une païenne, par la Cananéenne. Oh, il ne cède pas tout de suite, ni à sa requête, ni à la transgression - il l'a bien vu - que céder à sa requête supposerait : traverser les frontières de l'appartenance à sa religion, à son peuple, à sa race! "Je n'ai été envoyé qu'aux brebis perdues d'Israël", dit-il d'abord dans un mouvement qui semble instinctif. Il va même plus loin, qualifiant de "petits chiens" les non-Juifs par rapports aux "enfants" qui, eux mangent à la table : c'est presque injurieux!
La foi de la femme, comme il le dira lui-même, le convainc, une foi qui n'a rien d'arrogant et qui tranche par son humilité sur le caractère sectaire des paroles de Jésus : "Les petits chiens, dit-elle, mangent bien les miettes..." Jésus est comme retourné, et oui, osons le mot, "évangélisé", cette femme lui a ouvert un aspect jusque là ignoré de sa mission : la foi est au-delà des appartenances.
Isaïe l'avait déjà dit (Is 56, 6-7) et c'est la première lecture : "Les étrangers qui se sont attachés au service du Seigneur... je les conduirai à ma montagne sainte." Et saint Paul, méditant avec des païens devenus chrétiens, les Romains (Rm 11, 13-32),  sur l'élection du Peuple élu, aura une formule bien dans son style : il n'y a plus de privilège, dira-t-il, le Christ a fait éclater ces saluts factices qui tiennent par la naissance, la race, la nation, on ne sait quoi : "Tous les hommes, Dieu les a enfermés dans la désobéissance, pour faire à tous miséricorde!" Dans le Christ, Dieu a détruit tout mérite préalable, en démontrant que personne n'est  a priori digne de rien : Dieu seul sauve, précisément par la foi, et non par aucun autre stratagème d'appartenance.
Ce qui se raconte là, dans les lectures de ce dimanche, devrait désamorcer toute velléité de violence religieuse, et cela, à jamais. Aucun cercle, aussi légitime soit-il,  n'est "le" bon : ni l'Eglise catholique, ni une autre, ni une autre religion, puisque ce n'est pas à partir de l'appartenance qu'il faut songer au salut, mais à partir de la foi. Il n'y a plus d'institution  "supérieure" ou "inférieure"  (aussi nécessaire soit l'institution) - il n'y a plus qu'un peuple de sauvés, et d'abord sauvés de la crétine conviction de posséder le vrai, ou le bien avec le vrai ("Dieu a enfermés tous les hommes dans la désobéissance!") En insistant sur le dialogue interreligieux et "interconvictionnel" comme sur un élément constitutif de la foi chrétienne, les papes contemporains (Jean-Paul II, Benoît XVI, François) ont voulu, me semble-t-il, mettre cette idée biblique et évangélique au cœur de la foi chrétienne  - ils ont voulu dire, pour faire bref,  qu'on ne saurait être chrétien en-dehors de ce point de vue. Voir les rencontres d'Assise... qui exaspèrent, précisément pour ce motif, les intégristes catholiques.
Est-ce du relativisme?  Non, c'est une conviction, et dogmatique, s'il vous plaît!
Mais à quels abîmes de retournements, de conversions, ne conduit-elle pas - c'est une théologie à refaire, et en urgence! Une théologie de la transgression des frontières...

samedi 9 août 2014

On réclame plus d'intelligence!

Le pape nous demande aujourd'hui de prier pour les Chrétiens d'Orient (globalement en Irak) persécutés par des Islamistes devenus complètement fous.
Nous prions aussi pour que cesse le conflit meurtrier entre le Hamas et Israël, c'est-à-dire cette fois entre, essentiellement - il y a aussi des minorités chrétiennes -  des Musulmans (relativement modérés, mais terroristes, et qui n'acceptent pas le principe même de l'Etat d'Israël) et un Etat Juif (que l'on peut qualifier d' "immodéré" dans sa réplique et dans sa politique depuis plus de quarante ans - et, en particulier, ces dernières semaines, dans la "Bande de Gaza.")
Comment voulez-vous que les gens - je veux dire,  les gens d'ici - s'y retrouvent, s'il n'y a pas un peu de pédagogie mise en œuvre? Des Juifs (je dis bien : "des") tapent sur des Musulmans (je dis bien : "des") qui tapent sur des Chrétiens (je dis bien : "des") et cela donne les guerres actuellement les plus meurtrières du monde.
Est-ce que cela tient à la religion, à son contenu, à ses contenus? On en doute...
Est-ce que cela tient à l'histoire? Pour une part, c'est évident!
Est-ce que cela tient à la "politique" globale du monde, c'est-à-dire à l'utilisation politique du religieux? Ca, c'est plus probable...
Nous devons répondre, évidemment, à tous les appels à la prière.
Mais ne serait-il pas au moins aussi urgent d'informer le mieux possible les "gens d'ici" des tenants et aboutissants de ces conflits, en se gardant de tout a priori?
Et je reviens à ce que j'ai déjà signalé il y a quelques semaines sur ce blog. Je ne peux m'empêcher de mettre ce manque d'information (et de formation) en lien avec les projets d'un nouveau Gouvernement de la "Communauté Wallonie-Bruxelles" qui souhaite réduire les cours de religion. Pour les remplacer par de la philosophie, ou de la citoyenneté, s'il vous plaît. Comme on dit à Enghien, "avec ça, je suis propre!"
N'importe quel citoyen normalement constitué, devant la situation internationale (qui est explosive pour nous aussi, hein, je dis bien pour nous, chez nous,  à n'importe quel moment, comme les inondations dans le Brabant Wallon voisin,  il y a juste quelques jours), n'importe quel citoyen, donc, devrait demander plus d'explications, plus de formation, précisément dans le domaine religieux, dans tous ses tenants et aboutissants, dans tous ses enjeux. Et demander qu'on multiplie par deux les cours de religion, pourvu évidemment qu'ils soient faits correctement!
Je caricature à peine.
Je grossis le trait - histoire de dire combien on est en droit de réclamer plus de réalisme, et, au total, plus d'intelligence de la part de tout le monde et, en particulier, de nos responsables politiques, qui se fourvoient dès lors qu'ils jouent dans l'idéologie bêtasse (laïcs contre cathos, je te donne ceci, tu m'échanges cela, etc. Une politique de nuls quand on voit les enjeux!)

lundi 4 août 2014

En plus de Socrate...

Ceux qui me connaissent un peu savent que j'aime le monde grec, pour sa beauté, pour son esthétique, pour sa philosophie, pour l'enchantement de ses paysages.
La philosophie grecque! Socrate, bien avant Jésus, témoignage de la sagesse : "Je sais que je ne sais pas!" Confronté à tous les savoirs de son temps, il se dit plus sage qu'eux, puisque lui, au moins, "sait qu'il ne sait pas!" C'est un fameux coup de balai chez tous ceux, hier et aujourd'hui, qui prétendent savoir qu'ils savent... Et c'est la reconstruction permise du vrai savoir, de la vraie sagesse!
Mais de plus en plus ces temps-ci, je me dis que Socrate est aussi passé à côté de quelque chose : savoir qu'on "ne vaut pas mieux". Il ne s'agit plus cette fois du côté intellectuel de nos vies, mais de leur sensibilité morale, ou éthique (comme on voudra) : "Je ne vaux pas mieux que mes pères" dit déjà le Prophète Elie. Cette conviction est plutôt biblique en effet, et, allez savoir pourquoi, elle me touche spécialement ces temps-ci : "Du point de vue de la morale, nous n'avons de leçon à donner à personne!"
Jésus, donc, après  - ou avec - Socrate!

samedi 2 août 2014

Dieu, notre nourriture

De multiples façons, Jésus a cherché à nous dire qui est Dieu.
Voilà, au fond, ce que raconte la foi chrétienne.
La critique moderniste a beaucoup épilogué sur la véracité historique des faits et gestes de Jésus : je suis en train de relire - trente-cinq ans  ans après première lecture, quand j'étais au Séminaire! - l'admirable "Augustin ou le Maître est là", de Malègue, récemment réédité, et qui reprend si bien les tenants et aboutissants de cette période, en relevant les questions de fond qu'elle pose (dont je crois que quelques-unes d'entre elles, au moins, ont été résolues avec le temps, avec le siècle qui a passé, précisément parce qu'il a été critique.)
Reste, comme disait Pascal, "le mystère de Jésus".  Une fois qu'on sait qu'il a vraiment vécu, qu'il a dit ou fait ceci ou cela, etc., on franchit un pas de plus - un pas essentiel - en disant avec la foi chrétienne que cet homme-là est Dieu. Qu'on ne peut rien savoir (ou en tous les cas, rien savoir de mieux) à propos de Dieu qu'en le regardant, qu'en l'écoutant, qu'en devenant son contemporain, puisqu'il est vivant avec nous, ressuscité et, loin d'être un souvenir, présent plus que nous-mêmes à nos vies.
Cela pose des tas de questions que la théologie essaie de traiter : pourquoi lui et pas un autre? On épiloguera là-dessus tant qu'on voudra!
Mais, dans la foi, on est heureux de se dire : mieux vaut lui que n'importe quel autre!
Et, notamment, parce que, si c'est vrai que cet homme-là nous raconte ce qu'est Dieu, qui est Dieu, alors la face de Dieu change absolument dans l'univers mental des humains. Il n'est plus une espèce de despote hyper-puissant gouvernant de haut nos pauvres destinées. Il n'est plus un Juge inflexible qui nous attend de l'autre côté avec le bâton de sa vindicte (même s'il reste un Juge, évidemment, mais seulement de notre charité : voir Mt 25!), il n'est même plus une nounou consolatrice apaisant nos peurs sur sa poitrine généreuse.
Au-delà de toute représentation, il est Celui qui est plus proche de nous que nous-mêmes.
La nourriture de notre désir et de nos volontés les plus bienveillantes, capables de nourrir l'humanité entière avec la petitesse de nos capacités - mais non sans elles : "Donnez-leur vous-mêmes à manger!" (Mt14, c'est l'évangile lu ce dimanche...)
Je ne connais pas de révélation (car c'en est une : comme dit saint Paul, "ça, on n'y aurait pas pensé" - je simplifie le propos, voir la Première aux Corinthiens) plus digne de l'homme, plus capable de l'accomplir dans tout ce que réclame, dans tout ce que supplie son humanité la plus haute.