lundi 29 novembre 2010

Nous avançons...

Sortie d'un week-end chargé du point de vue pastoral, à Enghien et à Silly : dans ces deux paroisses, nous avons mis en mouvement une catéchèse "pour tous" liée à la célébration et au temps liturgique de l'Avent. Beaucoup de monde, des deux côtés; beaucoup d'enthousiasme; des choses vraiment sympathiques (le petit-déj. avec les parents des "premières communions", à Silly, par exemple), des groupes de parole, des partages, une célébration nourrie de tout cela. Bravo! Et aussi, des imperfections, des choses à revoir : normal. Mais, bon : "On avance..."
Ce soir, une rencontre avec l'équipe qui porte le projet "renaissance" dans le doyenné, une manière de dynamiser la vie de nos douze communautés paroissiales : là encore, beaucoup d'enthousiasme et d'énergie, le sens de l'urgence, des décisions, des projets et des idées, des calendriers pour les mettre en oeuvre : bravo!
Je ne laisserai jamais dire par personne que l'Eglise est moribonde : ici, à Enghien, à Silly, dans les villes et les villages, elle est vivante, et jeune, et dynamique! Je suis bluffé par l'enthousiasme des jeunes, des trentenaires, de ceux qui veulent une Eglise pour y recevoir la Parole de Dieu et pour en vivre dans des communautés chaleureuses, accueillantes, tolérantes.

samedi 27 novembre 2010

Après nous le déluge?

"Jésus parlait à ses disciples de sa venue : 'L'avènement du Fils de l'homme ressemblera à ce qui s'est passé à l'époque de Noé. A cette époque, avant le déluge, on mangeait, on buvait, on se mariait, jusqu'au jour où Noé entra dans l'arche. Les gens ne se sont doutés de rien, jusqu'au déluge qui les a tous engloutis : tel sera aussi l'avènement du Fils de l'homme.' " (Mt 24, 37-39). Ainsi commence la lecture de l'Evangile selon Matthieu de ce premier dimanche de l'Avent.
Le déluge? Vieille histoire, hein? Et comme disent les bons vivants depuis Louis XV : "Après nous, le déluge!" Traduisez : on se fiche des conséquences de nos choix, on vit, on profite, dans l'instant, et basta!
Après nous, vraiment?
Et si le déluge nous attendait, non comme une vague menace, mais comme une réalité inévitable, celle de nos choix présents et de ce qu'ils porteront comme fruits bons ou mauvais? Qu'il s'agisse d'écologie, de politique, de répartition des biens et des richesses au niveau de la Planète, nous sommes dès à présent redevables les uns aux autres de nos choix actuels. L'Avent est un temps de l'intranquillité spirituelle, au coeur de nos somnolences il introduit une brèche, une angoisse subite, une écharde dans la chair placide de nos conforts quotidiens. "Rester éveillé" est son mot d'ordre, ne pas relâcher son attention, faire gaffe, être soucieux (de soi, des autres, du monde)!
Car le Christ vient aujourd'hui comme il est venu hier et comme il viendra à la fin du temps. Il ne cesse pas de venir déranger nos habitudes, nos sacro-saintes habitudes, pour nous rendre fils de son Royaume, plus justes, plus fraternels, plus "partageants" de jour en jour.
Comme le chante une hymne de l'Avent :
"Debout! Le Seigneur vient!
La parole s'infiltre,
Elle ébranle nos coeurs.
Et voici le Royaume,
Il approche, il est là.
Réveillons-nous!"

dimanche 21 novembre 2010

La chance de célébrer

Les chrétiens sont gens qui célèbrent. On a envie de dire : sont d'abord des célébrants, des liturges. La liturgie précède la théologie, elle en est une source, un "lieu" (locus) comme dit la Tradition. La liturgie n'est pas un ajout à une doctrine constituée par ailleurs; au contraire, elle est cette doctrine en son surgissement rituel.
D'où la joie de célébrer, ce dernier dimanche de l'année liturgique, la solennité du Christ Roi, d'où la joie de célébrer cette royauté dont le trône est la Croix et la couronne, celle tressée d'épines.
Samedi soir, un très grand nombre de scouts et de guides d'Enghien, des plus petits aux plus grands, avaient rejoint notre église pour cette célébration qu'ils avaient préparée avec soin. Et ce matin, à Bassilly, c'étaient les jubilaires (50 ans, 60 et 65 ans de mariage) qui étaient accueillis dans notre Eucharistie dominicale. Puis, de nouveau à Enghien, la Fanfare et la Chorale dite "des fêtes" célébraient, en même temps que le Christ Roi, la Sainte Cécile.
Beaux moments que ceux-là, belles assemblées diverses, nombreuses, chantantes, priantes, jubilantes : l'Eglise comme on l'aime, la foi en son surgissement.

vendredi 19 novembre 2010

"Réussir dans la vie" ou "Réussir sa vie"?

Dans le droit fil de mon précédent message.
Déjeunant hier avec un promoteur immobilier (pour des raisons "professionnelles" : la paroisse d'Enghien vend un ancien couvent de Clarisses, et aimerait ne pas le faire n'importe comment. Si ça vous intéresse, hein...); déjeunant, donc, avec ce Monsieur, nous reparlions de l'ambition et des honneurs, et je lui citais Bernanos et Mauriac. Lui : "Mais, de l'ambition, il en faut, et moi j'en ai, pour moi, pour mes enfants, je veux réussir et je veux qu'ils réussissent..." Bon.
Examinons le discours.
Oui, réussir, mais quoi? Réussir "dans la vie", comme on dit, c'est-à-dire se faire une position, se tailler une part du gâteau, lorgner vers la reconnaissance sociale, et avec quels moyens? Je peux comprendre qu'une certaine ambition soit légitime : désir d'être reconnu à sa juste valeur, désir de plaire (pourquoi pas?), ou d'être aimé, etc. Et je veux bien admettre aussi que, faute de cela, un certain nombre de personnes que nous connaissons entretiennent avec la vie un rapport mettons dépressif.
Mais n'y a-t-il pas tout le bonheur caché? Le bonheur d'une vie familiale cahotique peut-être mais réconfortante? Le bonheur d'une vie professionnelle en apparence banale peut-être, mais en réalité comblante? Le bonheur humble, simple, de vivre et de respirer librement sans avoir toujours le souci du "qu'en dira-t-on?"... Le bonheur, pour dire bref, qui consiste non tant à "réussir dans la vie" qu'à "réussir sa vie".
Toute la question est là...

mardi 16 novembre 2010

Les promotions, les récompenses et l'humour de Mauriac

Face aux honneurs, décorations et autres fanfreluches que la société des hommes (et l'Eglise aussi, quelquefois) croit bon d'attribuer comme des "distinctions", il y a trois réactions possibles.
La première, en gros celle de Bernanos : tout refuser pour rester libre, pour ne pas être emprisonné par les reconnaissances sociales ou les institutions. Bernanos à trois reprises refusa la Légion d'Honneur, il refusa un poste ministériel après la guerre, il refusa une candidature à l'Académie Française ("Qu'irai-je faire là avec un chapeau à plumes?") C'est vertueux, et peut-être un peu orgueilleux - dans le cas de Bernanos, c'est en tous les cas efficace : sa liberté de parole, il l'a gardée jusqu'au bout.
La deuxième, mettons celle de Mauriac : accepter, comme on accepte la vie avec ses hauts et ses bas, ses joies et ses peines, mais accepter sans être dupe, avec ironie, humour, en en jouant. Mauriac reçut ainsi, en 1952, le Nobel de littérature. A un journaliste qui lui demandait ce que cela allait bouleverser dans sa vie, il répondit : "Ma femme va changer de réfrigérateur." Quelques années plus tard, alors qu'il défendait l'indépendance de l'Algérie, il fut inquiété par des menaces de l'OAS et on lui infligea la protection de deux policiers en permanence. Alors qu'il devait déjeuner avec un ami, il les lui indiqua des yeux à l'entrée du restaurant en disant : "J'essaie de m'en débarrasser. Ce matin, je les ai emmenés à la messe. Ca n'a pas eu l'air de les intéresser." Cher Mauriac...
La troisième, la plus vulgaire : les rechercher, ces honneurs, et les accepter comme s'ils étaient dus. On voit cette attitude partout, y compris dans l'Eglise, et pareille bêtise est à pleurer!
Mon père, qui avait été combattant et prisonnier de guerre, gardait dans un tiroir une batterie de médailles diverses. Quand on lui demandait son avis sur les décorations, il répondait : "Une décoration, ça ne se demande pas. Ca ne se refuse pas. Et ça ne se porte pas."
Cher papa...

jeudi 11 novembre 2010

Séparation et lien

Je suis tous ces jours-ci très intrigué par les divisions entre chrétiens (entre catholiques, même) suscitées par les débats médiatiques que l'on sait - du moins, en Belgique. Je fais de temps en temps un petit tour sur des blogs "tradis" et suis frappé par la violence de certains propos, une violence quelquefois haineuse. Alors je m'interroge : qu'il y ait des oppositions, des divergences de vue, voire des divisions, soit. Mais pour les chrétiens, ces divisions, ces séparations sont un point d'appui à partir duquel (re)créer de l'unité. Et je tombe, cet après-midi, sur un texte de Simone Weil, déjà citée dans ces notes, et que j'extrais de La Pesanteur et la Grâce : "Deux prisonniers, dans des cachots voisins, qui communiquent par des coups frappés contre le mur. Le mur est ce qui les sépare, mais aussi ce qui leur permet de communiquer. Ainsi nous et Dieu. Toute séparation est un lien." (La Pesanteur et la Grâce, Plon, 1948, p. 166).
"Toute séparation est un lien" : voilà une tâche chrétienne, la transformation en lien de ce qui, a priori, sépare. Au soir d'une journée où, célébration de l'Armistice oblige, nous avons prié pour la paix avec la communauté civile et chrétienne d'Enghien, Simone Weil offre une belle méditation sur les racines de la paix et de la réconciliation, dans le coeur de chacun d'abord, dans les familles et les communautés, dans les villes et les villages, dans l'Eglise, dans la communauté internationale... Après tout, le prêtre est un "pontife", c'est-à-dire, étymologiquement, quelqu'un qui "fait des ponts", qui crée des liens! Et en ce sens, tous les chrétiens, qui sont prêtres par leur baptême, ont vocation non pas de pontifier, mais d'être des pontifes!

mardi 9 novembre 2010

La crise de l'Eglise

Les points de vue publiés alentour et autour des propos de Mgr Léonard, et de la démission de son porte-parole (également porte-parole de la Conférence épiscopale) m'inspirent les réflexions suivantes :
- l'Eglise en Belgique est dans une crise grave, très grave. C'est un aspect de la crise de l'Eglise dans l'Europe occidentale, Eglise qui a du mal à se confronter à une société plurielle, mutli-culturelle ou pluri-culturelle (les débats, même laïcs, en Belgique, peinent d'ailleurs à atteindre une certaine unanimité). Le fond du fond de l'affaire est, comme toujours, la question de la vérité, en un certain nombre de domaines, éthiques, évidemment, mais aussi anthropologiques, sociaux (quelle société voulons-nous? En Belgique, en particulier, voulons-nous une société où les plus riches dictent leur loi dans la perspective d'un bonheur matérialiste indéfini, sans égard pour les minorités linguistiques, ethniques, religieuses, qui viennent grignoter un bien-être à toujours accroître? Oui, on en est là, et bassement là!) Que veut-on, en vérité? Quelle vérité de l'être humain, de sa solidarité indissociable de son bien-être? Comment être heureux sans partager son bonheur? Et avec le plus grand nombre? Cette question que je pose a été posée d'abord par les théologiens - qu'on me permette de faire l'éloge de ma discipline ! - quand ils se demandaient (c'est la grande question de saint Augustin) s'il était possible qu'un seul élu fût vraiment heureux du bonheur éternel s'il savait qu'il y eût un seul damné (et peu importe pourquoi)! Pourrions-nous, pouvons-nous être heureux d'un bonheur simplement terrestre en sachant que d'autres, et souvent de notre faute, sont malheureux?

- A cette aune, les débats belges sur l'Eglise catholique sont dérisoires et ridicules, jeux d'enfants gâtés dans une cour de récréation à l'école gardienne (n'osons même pas dire primaire). Et tous les acteurs de ce cirque, tous, je dis bien, sont à fesser : et au coin s'il vous plaît, quand on voit l'urgence de la présence de l'Eglise en notre monde, de sa présence sacramentelle, signe de l'amour indéfectible.

Espérons que notre Eglise se resaisisse, qu'elle devienne ce qu'elle est : un signe de l'amour, pas une idéologie, de droite ou de gauche, ces postures qui toujours l'ont défigurée dans l'histoire bimillénaire de son odyssée terrestre. Elle vaut mieux que tout cela, notre Eglise!

lundi 8 novembre 2010

Prière pour être un peu moins con, un jour

Cette prière que je reproduis ici n'est pas de moi - je l'ai trouvée par hasard, je ne sais plus où. Mais je la fais mienne, ce soir :

"Seigneur,
j'aimerais bien te dire que j'ai été sage aujourd'hui, et aimant, et que j'ai bien servi les autres. Mais...
J'ai encore écouté celui ou celle qui me disait du mal d'un autre, et j'en ai rajouté.
J'ai encore écouté celui ou celle qui me disait qu'un autre avait dit du mal de moi, et j'en ai été affecté.
J'ai encore eu un moment de peur ou de recul devant une personne différente, malade, handicapée, étrangère, importune.
J'ai encore passé trop de temps sur Internet, au lieu de prier.
J'ai encore répondu trop vite à une question d'un de mes enfants.
J'ai encore fait comme si je ne voyais pas la souffrance chez un collègue, mon conjoint, mon ami.
J'ai encore jugé sans savoir, condamné sans retour, je me suis vanté, j'ai menti pour m'éviter des problèmes.
J'ai encore fait preuve d'inconsistance, j'ai repoussé un truc qui me gonfle, abandonné un travail de longue haleine, je suis passé d'une chose à l'autre sans progresser.
J'ai encore fait un truc pas terrible parce qu'on ne me voyait pas. Et j'ai critiqué quelqu'un d'autre qui faisait pareil, parce que je le voyais.
J'ai encore posé sur un autre un fardeau que je ne toucherais pas du bout des doigts.
J'ai encore pensé que je valais mieux que tel ou tel.
J'ai encore refusé de pardonner.
J'ai donné des leçons, des conseils, des idées qui m'auraient bien fait ch... si on me les avait donnés dans une situation similaire.
J'ai fait à bien des gens et dans bien des domaines ce que je n'aimerais pas que l'on me fasse.
Empêche-moi de me prendre pour un type bien, de m'endormir là-dessus ou de m'en contenter. Enfonce-moi dans le crâne que la seule mesure de l'amour, c'est Ton Amour, et que je ne dois rien viser de moins que d'être saint.
Et malgré mes colères, mes haines, mes peurs, malgré mon égoïsme, mon autosuffisance et ma lâcheté, Ô mon très doux Seigneur, très humble et très puissant, je T'en prie, dans Ta grande bonté, s'il Te plaît, rends-moi un peu moins con, un jour.
Amen."

dimanche 7 novembre 2010

L'affligeant spectacle

Décidément, les chrétiens quelquefois semblent n'avoir pas progressé d'un pouce depuis les Corinthiens auxquels Paul reprochait d'être divisés entre eux : "Moi, j'appartiens à Paul!" disaient les uns, et les autres :"Moi, à Apollos!" (cf. 1Co). Chez nous, deux mille ans plus tard : "Moi, je suis pour Léonard!" "Et moi, pour Ringlet!" Ah! L'affligeant spectacle!
Heureusement, les chrétiens ne sont pas (que) là. Ils sont d'abord, ils sont surtout dans nos communautés, comme celles que j'ai rencontrées hier et ce matin, à Enghien, à Thoricourt, à Bassilly, à Silly : réjouis de se rassembler en nombre pour célébrer le Ressuscité, réjouis d'accueillir de petits enfants qui furent baptisés. La vraie vie est là, et on a envie de dire : l'Eglise véritable. Je ne dis pas que l'agitation institutionnelle, là au-dessus, n'est pas aussi "l'Eglise", mais franchement, c'est ce que l'on aime le moins en elle!