samedi 29 août 2015

De l'intérieur à l'extérieur...

"C'est du dedans, du cœur de l'homme, que sortent les pensées perverses." Les versets conclusifs de l'évangile entendu ce dimanche, j'ai voulu les introduire, tout au long de la semaine, par cette longue méditation sur l'oraison.
Si mes propos ont paru, peut-être, un peu complexes, les voici résumés dans leur simplicité évangélique : c'est l'intérieur qu'il faut soigner - et l'oraison est ce soin.
Le reste, l'extérieur, donc, ne sera jamais que le reflet de ce qui se passe . On ne triche pas - du moins, pas longtemps - avec son intériorité.
C'est comme pour je ne sais plus quel yaourt, dans la publicité : "Ce qu'il fait à l'intérieur se voit à l'extérieur!"
Beau dimanche à tous...

vendredi 28 août 2015

L'oraison comme renaissance : "Renais du Vent!"

Parmi tous les passages énigmatiques des Ecritures judéo-chrétiennes (et il y en a beaucoup...), la page qui rapporte, au début de l'Evangile de Jean (Jn 3), la rencontre nocturne entre Jésus et Nicodème constitue sans aucun doute un sommet.
"Tu dois renaître", dit Jésus à ce religieux juif, pétri de convictions et de pratiques (pharisien), mais tout de même curieux de ce "rabbi" si neuf et  qu'il aime à entendre. Nicodème est venu de nuit - métaphore de nos ténèbres intérieures - trouver Jésus, sans doute pour ne pas être vu, surtout pour lui parler de sa nuit.
"Comment un homme déjà vieux peut-il renaître", s'étonne-t-il?" Peut-il rentrer dans le sein de sa mère et ressortir?"
Quel imbécile!
L'évangéliste aime à se moquer de ces prétendus lettrés, de ces prétendus religieux, de ces prétendus pieux, qui décidément ne comprennent rien à rien. Entendez : il aime à se moquer de nous.
C'est pourtant tout simple, et c'est inattendu : "Renais", dit Jésus. Qui ajoute, pour ceux qui n'auraient pas compris : "Le vent souffle où il veut, tu entends sa voix, mais tu ne sais pas d'où il vient ni où il va. Ainsi en est-il de tout homme né de l'Esprit."
Ah! Cette renaissance, quel appel à liberté : ni plus ni moins la liberté du vent dans les feuillages et sur les plages et dans les tempêtes et dans les alizés... Sa force et sa douceur : renaître de cela!
L'oraison n'est propriété de personne : "L'Esprit souffle où il veut." Aucune institution n'en est maîtresse - ce pourquoi, du reste, on s'est souvent méfié des "mystiques" dans l'Eglise, cette race dangereuse de priants qui laissent en eux l'Esprit faire son œuvre désordonnée.
L'oraison est ce lieu de renaissance.
Nous pensons tous, je crois, nous sentons bien, pour parler simple, qu'il nous faut "quelque chose d'autre", que nous sommes faits pour un accomplissement. Nous le sentons,  dans le silence de nos oraisons, de  nos nuits intérieures,  de nos trébuchements. Nous sommes tous des Nicodème, trop fiers de nous, trop prétentieux, trop... cons! Braves, sans doute, même désireux de bien faire. Mais tellement cons! Tellement attachés à nos règlements, à nos manières de faire, à nos traditions, tellement craintifs, tellement sûrs de nous (c'est la même chose)...
La douceur compréhensive du regard de Jésus devant notre incroyable connerie, notre prétention ridicule, nos velléités intellectuelles, est quelque chose de si désarmant, que j'en serai, je pense, toujours impressionné.
Le vent est là, qui souffle.
Cette ruah qui planait sur les eaux de la Genèse, et qui d'un mot du Verbe de Dieu fit tout surgir :"Que soit..." "Et cela fut..."
Imaginons-nous la puissance incroyable qui peut s'incarner en nos cœurs pour venir faire œuvre d'oraison, et, de l'intérieur de notre première naissance, nous en offrir une autre, sans cassure, en continuité avec la première, mais en même temps toute nouvelle?
Le christianisme est d'abord là, en son lieu le plus intérieur : "Renais du Vent!"

jeudi 27 août 2015

Sur l'anamnèse dans l'oraison

J'aime le mot "anamnèse", qui ressortit au vocabulaire médical aussi bien que théologique. En médecine, l'anamnèse est la mémoire de nos maux : le praticien nous demande de nous souvenir des maladies qui furent les nôtres, des symptômes, des atteintes. Cette connaissance de notre passé lui est indispensable pour nous suggérer des thérapeutiques. En théologie, on sait que le terme désigne l'acclamation de l'assemblée qui, au cœur de la Prière Eucharistique, suit la consécration du Corps et du Sang du Seigneur : "Nous proclamons ta mort, Seigneur Jésus! Nous célébrons ta résurrection! Nous attendons ta venue dans la gloire!" Ici, mémoire est faite également, mais c'est une mémoire du salut - la mort, la résurrection et la parousie du Seigneur sont lieux de notre délivrance.
L'oraison est œuvre de mémoire : l'Esprit qui prie en nous fait remonter à notre cœur conscient des sentiments enfouis, et surtout les causes des traumatismes oubliés qui nous firent ce que nous sommes, qui nous tissent en nos profondeurs. Nos blessures nous constituent, en effet, que nous avons reçues tout enfants encore et peut-être déjà in utero, non qu'on ait voulu nous blesser toujours, mais souvent par des maladresses ou des empressements qui nous ont égratignés. Nous sommes tous blessés - ce pourquoi, du reste, nous sommes blessants. Laisser venir à notre vie consciente le souvenir enfoui de ces coups jadis reçus, apprendre à pardonner à ceux qui nous les portèrent (même s'ils sont morts...), c'est nous disposer à accueillir en nous la guérison.
Le Verbe que l'Esprit Saint forme en nous dans l'enfantement intérieur,  c'est Jésus aujourd'hui comme hier guérissant les blessures et les blessés. Sur les routes de Palestine, ne fut-il pas d'abord ce thaumaturge soucieux de soulager, de réconcilier, de relever - ce pourquoi les foules en un premier temps le suivirent avec enthousiasme? Ce qu'il fut de son vivant historique, il le reste pour nous, Ressuscité et ressuscitant, manifestant en nous l'identité du Père aimant qui veut restaurer l'humanité dans sa grâce.
Oraison, double anamnèse, double travail : accueil des souvenirs perdus, et, à mesure, de la guérison proposée.
Proposée : car tout est laissé à notre liberté. Ainsi que Jésus le demande d'abord à l'homme malade depuis trente-huit ans, couché au bord de la piscine de Bethzatha, "Veux-tu être guéri?" (cf. Jn 5, 6)
Voulons-nous guérir?

mercredi 26 août 2015

Sur l'oraison, encore, et la "présomption d'innocence"

A ce stade du descriptif de l'oraison, j'entends l'objection : "Mais de quoi nous parle-t-il? ce 'ruisseau d'infamie', ce genre d'expression, pour désigner quoi? Moi, je suis 'sain(e)', et non pas flétri(e) depuis toujours, mon enfance fut bonne, je n'ai pas de pensées criminelles, j'ai été bien élevé(e), qu'il pense cela pour lui s'il le veut, mais sans le projeter sur tous, etc."
C'est ce que j'appelle la "présomption d'innocence", important ce concept du droit dans la psychologie spirituelle : nous serions tous purs et béats, candides comme l'enfant qui vient de naître. Rousseau a repris cette idée que je ne partage pas, d'un être humain naturellement bon, mais devenu mauvais par la culture qui l'entoure. Moi, je suis plus enclin à penser, avec Augustin, à une forme de malice dont nous ne sommes évidemment pas coupables - mais quelquefois complices, à un entraînement du cœur humain vers la duplicité, à  ce que Mauriac un jour dans un formidable roman (noir) appela "Le nœud de vipères".
Et l'objection de l'innocence revendiquée me semble pire que tout : elle contribue à la dissimulation, à la non-vérité, au non-vouloir de la vérité, comme chez ces alcooliques qui nient jusqu'à l'absurde leur comportement ("Moi, boire, jamais!")
La vérité sur nous-mêmes n'est pas si belle que ça - elle n'est pas si laide, non plus.
Elle est, plus que la sincérité, une opération lente et nécessaire pour advenir à nous-mêmes, pour apprendre qui nous sommes, pour rendre grâce des dons et évaluer l'étendue des dégâts.
Sans cet exercice (cette "ascèse", dit le grec), pas de vie spirituelle possible. Pas de vie chrétienne possible - nous resterions toujours à l'extérieur de nous-mêmes, dans la représentation théâtrale de nous-mêmes, dans l'illusion d'être vraiment le personnage (le masque) que nous jouons à nous en faire crever.
Etre délivré des faux-semblants, c'est notre premier devoir. Et l'oraison - ou, mettons, simplement, la prière - nous en offre la faculté.
A un ami qui lui parlait de prière, quelqu'un - un intellectuel belge, réputé et en effet savant - répondit trop brusquement : "La prière est-elle exaucée?" Celle dont je parle l'est toujours.

mardi 25 août 2015

Sur le contenu de l'oraison

Et donc, que se passe-t-il quand il ne se passe rien?
Quel est le contenu de ce moment à la fois dans le temps et hors du temps, où le cœur de Dieu rencontre un cœur humain?
C'est l'Esprit qui est à l'œuvre, l'Esprit Saint de Dieu que nous reçûmes au baptême, à la confirmation et à chaque Eucharistie célébrée depuis que nous y communions : il y a un lien constitutif entre les sacrements de l'initiation et la prière proprement chrétienne, même si bien sûr l'Esprit "souffle où il veut" et n'est pas encagé dans nos institutions, fussent-elles sacramentelles...  L'Esprit féconde notre cœur, comme une fois dans l'histoire des hommes il a fécondé le sein de la Vierge Marie - pour qu'en nous aussi naisse le Verbe de Dieu, qui viendra se raconter en nous et raconter en nous l'histoire de Dieu tandis que nous rassemblerons sous son regard nos histoires humaines.
Car l'Esprit nous rend d'abord capables de nous rassembler peu à peu sous le regard de Dieu, de rassembler nos vies - nous sommes à nos propres yeux les premiers inconnus, Dieu seul nous connaît et peut nous livrer cette connaissance sur nous-mêmes. Dans l'oraison, nous voyons nos vies éparpillées, livrées depuis l'enfance à leurs démons - le délire d'être ce qu'on n'est pas, voire la fabulation, le narcissisme à fleur de peau, l'usage ou même le mésusage d'autrui et, comme me dit avec humour une chère et vieille amie, "la persévérance dans la mauvaise conduite." Nous voyons nos excuses trop faciles ("C'est plus fort que moi"), nous nous sentons immergés dans nos ruisseaux d'infamie. Nous apprenons peu à peu la vérité sur nous-mêmes - démarche qui n'est pas sans accointance avec la psychanalyse (et que quelquefois la psychanalyse peut aider, lors de blocages) mais qui me paraît aller plus loin que cette thérapie.
Ce "plus loin" est l'autre contenu : Dieu lui-même vient, en Jésus, se raconter encore aujourd'hui dans nos histoires d'hommes et ce que nous pressentons de nous-mêmes comme une boue infernale, nous en sommes par lui peu à peu tirés, sauvés. Il nous ressuscite de nous-mêmes, de la tombe que souvent notre cœur constitue pour nous-mêmes : la résurrection est pour chacun de nous d'abord une réalité spirituelle, dans son lieu le plus intérieur.

lundi 24 août 2015

Sur la difficulté de faire oraison

Par "oraison", j'entends ici un certain type de prière : la prière silencieuse, sans support textuel devant les yeux, que l'on pratique dans sa chambre ou dans la solitude d'une chapelle. La question, l'inévitable question première, est celle de la peur du vide, du silence, pour nous qui sommes tellement environnés de bruit. Que se passe-t-il, quand il ne se passe rien? C'est la grande difficulté de l'oraison,  celle de son début, qui est consentement à ce sentiment d'ennui (dès que l'on se met en silence, on a toujours "du lait qui bout sur le feu", des coups de fil à donner, des choses pratiques à régler. Normal.) Et au fond, la difficulté du début demeure durant tout le temps de l'oraison, et durant tous les temps pris dans une vie humaine pour "faire oraison" : on y est toujours un débutant.
Ce sentiment de l'ennui vient de très loin en nous : des première années,  déjà - "je m'ennuie", lamentation de l'enfant délivré des jeux et posté au bord de soi-même. Ennui d'être seul avec soi. Souhait d'être "dis-trait" de soi, tiré hors de soi. Et il est vrai que le monde extérieur nous convoque à la visite, à l'exploration.
Mais le monde intérieur n'est pas moins vaste.
Et dans les deux cas, l'appel au voyage vient du Même : le Créateur souhaite la curiosité de sa créature, tant à l'extérieur qu'à l'intérieur, les deux visites du reste s'appelant l'une l'autre et se fécondant mutuellement.
L'oraison silencieuse est bien un voyage, dont la mise en route est difficile - quitter le port d'attache, toujours, est une aventure à laquelle on ne consent pas sans quelque frayeur.
Mais un grand, un immense désir nous y convie.
Et si l'on se demandait pourquoi?

samedi 22 août 2015

"Cette parole est rude! Qui peut l'entendre?"

Ce dimanche, nous lisons en saint Jean la réaction des auditeurs de Jésus à son long discours sur "le pain de vie". "Cette parole est rude! Qui peut l'entendre?", disent-ils. Un moment donné, dans son itinéraire spirituel, chacun  est confronté à la rudesse de la proposition chrétienne : celle-ci a pu paraître séduisante quelque temps (et elle l'est en effet par certains côtés), elle a pu sembler aller de soi - les habitudes ont la vie dure. Mais on n'échappe pas, un jour ou l'autre, à un choix, dont Jésus du reste signale que c'est le Père lui-même qui donne d'y répondre favorablement : "Personne ne peut venir à moi si cela ne lui est pas donné par le Père."
Ce choix est celui d'une cohérence, d'un engagement de tout soi-même auquel, confronté aux circonstances, on est sommé de consentir à nouveau régulièrement. Il ne s'agit pas d'une affaire intellectuelle, mais d'une décision vitale, qui englobe tous les aspects de la vie, une  façon de se positionner dans la société, d'y travailler, d'y œuvrer, de s'y démener, d'y prendre parti ou du moins d'y prendre la parole, etc.
S'il y a un aspect positif dans la "crise des migrants" actuelle - et il y en a plus d'un, très certainement - c'est que cette situation d' "abordage" de l'Europe par des populations pauvres, chassées de chez elles, longtemps ignorées ou méprisées, oblige les citoyens que nous sommes à prendre parti : quelle humanité voulons-nous? Acceptons-nous de renoncer à une part de notre confort pour accueillir des gens qui n'ont rien? C'est probablement le plus beau défi collectif lancé à l'Union Européenne depuis sa création. Et, bien entendu, ce n'est pas étranger au "choix" de la foi rappelé plus haut et décrit dans l'évangile d'aujourd'hui...
"Cette parole est rude! Qui peut l'entendre?"

samedi 8 août 2015

La chair de Dieu

"Le pain que je donnerai, c'est ma chair, donnée pour la vie du monde." (Jn 6, 51) Ainsi se conclut le passage évangélique que nous lisons ce dimanche, ce nouvel extrait du discours sur "le pain de vie" qui est l'un des plus formidables de l'évangile de Jean.
Ce verset mérite qu'on s'y attarde : Jésus nous parle de sa "chair" (en grec, sarx), qui n'est pas seulement le corps (en grec, sôma), mais la réalité tout entière d'une vie terrestre, "incarnée", comme nous disons fort justement. Une vie "dans la chair", c'est une vie faite de travail, d'amitiés, de fraternité, de partages, de prises de parole, de prises de position, etc. Et la chair de Jésus, nous savons de quoi elle est faite : ce qu'il a dit, ce qu'il a montré, c'est une sollicitude constante pour les exclus et les démunis, c'est une parole incisive sur la justice, la vérité, la fraternité, c'est un don de soi pour l'autre jusqu'à vivre encore comme un don la mort injuste qu'on lui inflige.
Si le chrétien est celui qui se nourrit du Christ, c'est de cette "chair-là" qu'il se nourrit. Sa prière est rumination de la "sainte humanité" de Jésus, comme disent bien des auteurs spirituels - Ignace de Loyola, par exemple. Cette chair-là devenue nourriture de nos vies transforme celles-ci, en font des semences et des foyers de Vie éternelle dans le monde.
Voilà pourquoi le christianisme n'est pas seulement ou n'est pas d'abord une philanthropie, même très généreuse. Le service rendu au monde ("la vie du monde", dit Jésus) va beaucoup plus loin qu'un soulagement, même s'il passe par lui : l'union sens cesse reprise du chrétien  au Christ instille dans le monde, dans la trame du monde, dans le temps qui passe, dans l'espace éphémère, quelque chose de la Vie d'amour de Dieu, de l'éternité de Dieu, du Royaume de Dieu. Les chrétiens qui sont au Christ, s'ils sont au Christ, sont des passeurs de Vie dans ce monde chaviré. Avec le Christ, ils y sont la chair de Dieu.

mardi 4 août 2015

De bien mauvais souvenirs...

On apprend aujourd'hui (information relayée par The Telegraph) que la Hongrie a requis 500 chômeurs pour la construction d'une frontière anti-immigration d'environ 175 km devant la Serbie. Faute de se prêter à ce travail, les susdits chômeurs perdraient leur allocation (déjà fort minime), une allocation fortement menacée en tous les cas à partir de 2018 si l'actuel gouvernement reste en place. Avec des miradors, la frontière de barbelés?
Ah, les mauvais souvenirs...
Et l'Europe qui ne bronche pas!

dimanche 2 août 2015

Croyant, chrétien?

Les lectures bibliques de ce dimanche nous interrogent sur notre foi et, spécifiquement, notre foi chrétienne.
Il se peut que, pour nous aussi, comme pour le Peuple de l'Exode, la foi commence par un regret : il n'y a plus de sécurité, plus de filet, nous avons tourné le dos aux protections provisoires - dérisoires, aussi - que nous avons si beau jeu de placer entre la mort corporelle et nous-mêmes. Nous avons tourné le dos à tous ces biens matériels censés retarder pour nous ou nous faire éviter l'inévitable. Car c'est cela, la foi : tourner le dos à tout ce dont nous devenons vite esclaves, et se fier à la route désertique où Dieu seul pourvoit à nos vies. Où Dieu seul nourrit (et comment! Voyez le festin de ce soir-là au désert : des cailles pour tout le monde!) Mais le choix de croire - en ce sens du terme - est à reprendre chaque jour, puisque chaque jour en nous se réveille la nostalgie des sécurités abandonnées, ou relativisées, la nostalgie des "marmites de viande" qui nourrissaient si bien les esclaves que nous étions en Egypte, les esclaves que nous risquons toujours de redevenir...
Est-ce ainsi que nous sommes "croyants", quand nous nous disons "croyants"? Est-ce dans cet abandon de tout nous-mêmes?
Jésus va plus loin encore, et le christianisme avec lui : "Travaillez à l'œuvre de Dieu, dit-il : croyez en moi." Pourquoi en lui? Pourquoi pas en d'autres, pourquoi pas en Confucius, en Lao Tseu, en Bouddha, en Socrate, ou en... personne? Parce que nous reconnaissons en lui l'œuvre de Dieu, l'œuvre d'amour, qui s'accomplit, parce que nous goûtons en lui, le vrai Vivant, la Vie que plus rien ne vient limiter. Parce qu'il est le pain, la nourriture, de cette Vie-là en nous, et que dès lors tout le reste, même le plus utile, est secondaire. D'abord, qu'il nous nourrisse...
Est-ce ainsi que nous sommes "chrétiens", que nous sommes au Christ, quand nous nous disons "chrétiens"? Est-ce dans cette remise de tout nous-mêmes à "Celui-là" - "Celui-là" qui ose dire : "Celui qui vient à moi n'aura plus jamais faim; celui qui croit en moi n'aura plus jamais soif"?
A vérifier...