mardi 29 mars 2011

Mark Eyskens à Enghien

C'était une grande joie de recevoir ce soir - en présence de notre Evêque, du reste, qui avait tenu à faire le déplacement - et d'entendre pour la troisième et dernière de nos conférences de Carême le Ministre d'Etat Mark Eyskens. A bientôt 78 ans, ce grand serviteur du Royaume, qui fut Premier Ministre, et treize fois Ministre (entre autres du Budget et des Affaires Etrangères) est un Sage. Il avait beaucoup à nous apporter, et il l'a fait, en témoin à la fois humble et décidé de sa foi chrétienne, fort de son expérience, de son érudition et de ses compétences. Résumons : - oui, la société bouge et la révolution de la communication (Internet, etc.) sous-tend toutes les autres - oui, cela affecte à la fois les idéologies collectivistes et capitalistes et bouscule les totalitarismes, (voir l'Afrique du Nord) - oui, c'est un défi pour l'Eglise : institution à dépoussiérer, audaces à avoir, femmes à promouvoir, transparence de gestion à étendre, pour crédibiliser un message qui n'a rien perdu de sa pertinence "en soi", et cela même si évidemment, les valeurs éthiques que l'Eglise rappelle à juste titre ne sauraient être soumises à l'arbitrage démocratique, précisément parce qu'elles sont des valeurs perennes - oui, il y a là aussi un enjeu non seulement ecclésial mais théologique : les évolutions sociétales interrogent une représentation "ontologique" de Dieu et nous invitent à regarder le Dieu de Jésus-Christ, le Dieu incarné, et à incarner nous aussi notre foi en lui dans des choix quotidiens - oui, cela comporte des conséquences : aucune compromission avec le racisme ou la xénophobie, un engagement vigoureux pour les pauvres et les marginaux, une considération des vrais problèmes de société qui ne sont pas communautaires (environnement, vieillissement de la population, travail, emploi, ouverture à l'universalisme, dialogue inter-religieux, multiculturalisme, etc.), et traitement chrétien des problèmes communautaires, qui peuvent se résoudre facilement si on le veut. Une leçon : d'humanisme, de foi chrétienne, d'espérance et de vie. Voilà un homme d'Etat qu'on remercie pour tout ce qu'il a dit et, surtout, et plus encore, pour tout ce qu'il est!

vendredi 25 mars 2011

Le parvis des gentils

Se conclut ce soir, à Paris, d'abord au Collège des Bernardins, puis sur la Place Jean-Paul II face à la Cathédrale Notre-Dame, deux journées de dialogue entre croyants et non-croyants, en présence et à l'initiative du Cardinal Gianfranco Ravasi, Président du Conseil Pontifical pour la Culture. J'ai eu la chance de pouvoir, de loin en loin, en suivre les débats sur la chaîne KTO. J'apprécie particulièrement les réflexions conclusives d'Enzo Bianchi, le Prieur de Bose : ce qui fait défaut, dit-il, c'est sans doute la foi en Dieu, mais plus encore la confiance, et non pas seulement en Dieu, mais en tout. On n'a plus confiance dans le monde politique, ni dans des histoires d'amour, ni dans son ou sa partenaire donc, ni dans les "instances internationales", ni dans la vie... Le problème de notre société, et de notre coeur, est celui de la confiance à retrouver, une notion qui surplombe et dépasse la frontière si souvent superficielle entre croyants et non-croyants.
Que le Cardinal Ravasi ait été à l'initiative de pareille rencontre, voilà qui me réjouit et me redonne, en revanche, confiance... en mon Eglise, si pauvre à certains égards, si capable à d'autres d'initiatives indispensables comme celle-ci!
(Confidentiellement, voilà un Cardinal que je verrais bien un jour passer au blanc, si vous me comprenez...)

mardi 22 mars 2011

Lytta Basset

On connaît Lytta Basset : exégète, théologienne, conférencière partout sollicitée, professeur à l'Université de Neuchâtel, écrivain, etc. On méconnaît malgré tout la femme : libre, simple, accueillante aux questions, soucieuse des personnes, de l'échange avec les autres, toujours en quête des autres... Ainsi nous est-elle apparue ce soir à Enghien où nous avions la joie de l'accueillir pour la deuxième de nos conférences de Carême. Elle nous a parlé d'elle, de son deuil - celui de son enfant, Samuel, suicidé à 24 ans. De l'Evangile et du Vivant (le "V" majuscule) qui s'y donne à lire. De Lazare, Marthe et Marie que Jésus ressuscite tous les trois. De la culpabilité. De la dépression. Et de la sortie de tout cela, possible, toujours à recommencer.
Une leçon de vie, de Vie.

mardi 15 mars 2011

Complexités, conflits et ruptures

Joie d'entendre ce soir Michel Dupuis prononcer la première de nos trois Conférences de Carême, à l'église d'Enghien. Ce philosophe, Professeur à l'UCL dans les Facultés de Philosophie et de Médecine, spécialiste de l'éthique médicale, bardé de diplômes et de compétences, a, je crois, donné à penser simplement à la complexité du monde présent. Il y voit des difficultés, certes (notamment le risque, toujours, de renoncer à sa responsabilité propre), mais aussi des chances, comme il en voit même dans les conflits et les ruptures : ceux-ci sont, si on veut bien rester "humains" (et, a fortiori dirais-je, "évangéliques") des sources possibles de dialogue, et donc de vie transversale, de traversées, dans tant de domaines (familiaux, professionnels, médicaux, etc.). Ce chrétien nous a fait réfléchir, depuis sa compétence et son expérience, à la pertinence de notre foi dans le grand débat dont nos sociétés ne peuvent aujourd'hui faire l'économie pour que la vie (humaine, chrétienne, tout cela ensemble) soit simplement possible.
Qu'on est loin, ici, de positions étriquées, confuses, bêtasses, qui polluent si souvent le paysage chrétien, sur Internet ou dans nos paroisses, ces idéologies de bazar qui voudraient tout régler avec des "'il n'y a qu'à". Aucun avenir à ces déclarations péremptoires...
Mais à la réflexion, au dialogue, à la patience sans cesse recommencée... ah oui, alors! Un avenir, et un grand!
Merci, Michel!

dimanche 13 mars 2011

Membra Jesu Nostri

Je parlais dans mon dernier message de la joie qui fut la mienne de revoir Jean-Pierre Sonnet, cet ami jésuite enseignant à la Grégorienne, lors de mon récent voyage à Rome. Je fais mes délices du petit texte de lui qu'il m'a remis lors de son dernier passage en Belgique, lorsqu'il est venu à Enghien que et nous avons pu ensemble concélébrer l'eucharistie de 18h00, un jour de semaine. Membra Jesus Nostri en est le titre, et, en sous-titre, Ce que Dieu ne dit que par le corps.
Dans son Ouverture, Jean-Pierre exprime ainsi ce qu'il a voulu écrire : "L'attachement des croyants au corps du Christ jusqu'en ses membres m'a poussé à me demander : le mystère de Dieu ne se loge-t-il pas également à l'articulation de nos membres? Ces derniers ne sont-ils pas, eux aussi, à l'image de ceux du Christ, le lieu d'un évangile? L'interrogation a aiguisé mon regard et donné naissance à des miniatures, tout à la fois poèmes et croquis. (...) Ainsi sont nés ces textes, d'étonnements croisés : le verset souffle son pollen de mots sur l'émotion des sens, celle-ci prête aux Ecritures le parler de la chair. Elles tremblent alors, les paroles de Dieu, lorsqu'elles nous passent par le corps, de la tête jusqu'aux pieds." (J.-P. SONNET, Membra Jesu Nostri. Ce que Dieu ne dit que par le corps, Le Taillis Pré, Châtelineau, 2010, pp. 8-9, 10euros).
En ce début de Carême, je recommande vraiment à chacune et chacun la méditation de ces petits bijoux, qui donnent en effet une chair inattendue à la Parole de Dieu, et nous font goûter la Bible comme on déguste un fruit.

mardi 8 mars 2011

Retour de Rome

Je suis rentré ce matin de Rome, où j'ai eu l'occasion de passer une nouvelle fois, en compagnie d'amis, quelques jours de vrai bonheur. Se retrouver près de Pierre est et restera toujours pour moi une expérience fondatrice de la foi, remettre ses pas dans celui de ce pêcheur des bords du lac venu à Rome pour payer de sa vie le témoignage de l'incroyable nouvelle. Célébrer sur sa tombe. Voir le Pierre d'aujourd'hui, son souci de l'humanité. Rencontrer des frères qui travaillent là-bas, Jean-Pierre, par exemple qui enseigne si bellement à la Grégorienne et me disait, lors d'un dîner pris ensemble : "Le mystère de l'Eglise universelle, c'est que ce que l'Eglise vit à Enghien est aussi important que ce qu'Elle vit à Rome ou n'importe où dans le monde."
Et revoir, encore, la beauté de cette Ville, l'Urbs! La beauté qui crie à chaque coin de rue, ce mélange et cette continuité entre les réalisations antiques et celles de la Renaissance, entre la recherche profane des Romains cultivés, dans l'architecture, les beaux-arts ou la littérature, et celle des chrétiens d'hier et d'aujourd'hui : le christianisme, à Rome, vraiment n'abolit rien, il accomplit.
Il y a à Rome quelque chose de la jeunesse éternelle du christianisme, à travers même - et c'est paradoxal - la rencontre des vieilles pierres.
Quelle puissance!