jeudi 14 avril 2011
Lectures du moment
Toujours il faut avoir des livres en route... J'ai lu avec un certain effroi et en même temps plus que de l'intérêt, une vraie sympathie et, si le mot ne risquait pas d'être mal compris, une vraie com-passion, le livre-récit d'Alexandre Bergamini, que les éditions du Seuil où il est publié ont tenu à m'envoyer (A. BERGAMINI, Sang Damné, Seuil, 2011, 238pp.) L'auteur y raconte ses quelque vingt années de vie avec le sida, l'expérience que c'est non seulement d'être malade, avec les tâtonnements de la médecine, mais malade de cette maladie-là, avec sa part de honte, ce que cela remue dans les tréfonds du passé comme blessures enfouies. C'est un livre courageux, difficile, sans concession, un récit qui envoie balader les faux-prétextes, les faux-semblants, les fausses consolations, mais un texte où ne manquent pas les ouvertures spirituelles. Quelquefois, la maladie et ce qu'elle engendre en lui comme rejet viscéral des institutions, lui fait frôler quelque chose de la rencontre mystique : "Les mystiques escortent, écrit-il. (...) En état de grâce, proche de l'enfance, en étroite relation d'amitié avec Dieu. Un Dieu qu'ils choisirent sans serviteur ni soumission. Ils prodiguent la liberté d'être soi-même Dieu, sans crainte, avec joie et humilité." (p.171) J'espère prochaînement rencontrer cet auteur et aller plus loin avec lui dans cette échappée vers la vie spirituelle que, paradoxalement, la maladie - cette maladie-là - a ouverte en lui. Nous espérons pouvoir dîner ensemble le lundi de Pâques. L'autre livre, d'un ami, concerne le poète et moraliste italien du début du XIXème siècle Giacomo Leopardi . C'est un essai du cher René de Ceccatty intitulé Noir souci (Flammarion, 2011, 265pp.) Ici encore, une ode à la liberté chez l'écrivain dont il décrit la brève existence, les continuels ennuis de santé, la vie familiale contrariée, mais, à travers tout cela, le génie créateur. Du coup, dans la traduction du même René, un coup d'oeil quasi quotidien sur les Chants de Leopardi (réédités en Rivages poche/ Petite Bibliohèque, 2011, 378pp.) Et, bien sûr, comme dit dans un post précédent, Proust chaque soir désormais avant le dodo, l'intégrale de La Recherche en Pléiade, cette extraordinaire symphonie, la description des états d'âme : une leçon d'introspection hors laquelle il n'est point, non plus, de vie spirituelle. Je ne pourrais pas vivre sans les livres, sans ces échappées vers des univers humains si différents souvent du mien, mais qui le rejoignent par le fond, par l'intérieur. Après tout, à chacun sa drogue, hein!
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