Bientôt, nous entrerons en Carême. Ce n'est pas un temps de pénitence au sens bébête où on me l'a raconté quand j'étais petit (pas de chocolat, gnani, gnana, je sais pas où l'on est allé pêcher que le chocolat était interdit. Qu'est-ce qu'on nous a bassinés avec des conneries, tout de même! - A cet égard, vous ne m'entendrez jamais répercuter, chers paroissiens d'Enghien et de Silly, les consignes reconduites d'année en année par la Conférence épiscopale sur le jeûne du mercredi des cendres et du vendredi-saint : le jeûne, ce serait, paraît-il, se contenter d'un repas complet et de deux collations sur la journée! Moyennant quoi, je jeûne tous les jours! Quand on veut légiférer jusqu'au détail de l'alimentation des personnes, on en arrive à ce genre de rigolade. Le jeûne, c'est s'abstenir de manger et de boire, c'est une excellente pratique spirituelle si on en est capable, mais à condition qu'elle reconduise à l'essentiel, ok?) Et revenons donc aux choses sérieuses, c'est-à-dire au Carême, à la conversion au Christ, qui est le cœur de cette période "catéchuménale" dans laquelle, accompagnant les futurs baptisés de Pâques, nous redécouvrons combien le Christ, pour nous, est la Vie. Tout y concourt : liturgie, conférences, soirées musicales, sens renouvelé de la diaconie - du service des plus pauvres -, prière, intériorité, patience dans la vie conjugale ou familiale (ou paroissiale? tiens...), jeûne alimentaire donc, mais si on peut le vivre sérieusement, etc.
Revenir au Christ, à la source même. Je n'aurai de cesse de faire connaître saint Augustin et, comme on dit, "sa vie, son œuvre", en particulier ses "Confessions" (il les rédigea en 399, à 45 ans). Au Livre VIII, par exemple, ceci, qui nous concerne, pour le Carême (il a entendu, raconte-t-il, Ponticien, l'un de ses amis, dire pourquoi il voulait se convertir au Christ, et cela a résonné dans son cœur indécis comme jamais auparavant) : "Et toi, Seigneur, au beau milieu de ses paroles, tu m'as fait pivoter sur moi-même. Je me tournais le dos. Je ne voulais pas me regarder. Tu m'a forcé à me faire face. Voir comme j'étais dégoûtant, difforme, sordide, sale et couvert d'ulcères. Je me suis vu. Horreur. Et nulle part où échapper à moi." (Conf., VIII, 16) Eloge de la lucidité, de la vérité sur soi. Nous ne nous connaissons pas : le Christ nous éclaire sur nous-mêmes, sans nous désespérer de ce que nous sommes, mais avec un regard en même temps si bienveillant, si amical.
Saint Augustin m'a appris à ne jamais désespérer de moi. Ni de personne (pas même des crétins que je dénonce ici de temps en temps, car je suis moi-même très souvent crétin). Il m'a appris à ne pas céder à la dépression en moi, à cette "horreur" de moi que j'ai apprivoisée grâce à lui. Au fait, ce n'est pas tant saint Augustin, que le récit magnifiquement écrit de son expérience, et qui seize cents ans après retentit toujours comme une nouveauté à mes oreilles de lecteur et d'admirateur (je l'ai déjà dit : le Collège d'Enghien sait-il la hauteur de son patronage?) Ce n'est pas tant saint Augustin, non, c'est le Christ, c'est la perpétuelle nouveauté, la magnifique jeunesse du Christ que saint Augustin, et moi, et vous, amis lecteurs, à travers l'épaisseur des siècles, découvrons chaque jour, éblouis...
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