Lors de la première Conférence de Carême à Enghien, mardi dernier, j'ai évoqué l'importance doctrinale et pastorale du thème de la "kénose" du Christ. Voilà que, hier après-midi, avec des collègues de la Faculté de Théologie de l'UCL (les professeurs Bourgine, Famerée, Scolas, entre autres), réunis pour la préparation d'un colloque à venir, nous nous disions aussi que ce thème mérite d'être présenté, actualisé, revisité.
De quoi s'agit-il? Le terme, qui peut paraître abscons, est grec : le verbe kenoun, dans cette langue, signifie "vider" et on le trouve utilisé à l'aoriste (passé simple, mettons) , sous la forme ekenosen, dans une hymne que Paul reprend au deuxième chapitre de sa Lettre aux Philippiens (Ph 2, 6-11) : Le Christ Jésus, dit-il, lui qui était "dans la condition de Dieu", n'a pas revendiqué d'être traité comme Dieu, mais il "s'est vidé". Il ne s'agit pas seulement, pour l'Apôtre, d'évoquer l'humble comportement de l'homme Jésus, mais il entend dire quelque chose de Dieu même. En Jésus, se révèle un Dieu agenouillé devant l'homme, dont la toute-puissance n'est accrochée à aucun privilège qui la ferait ressembler à une quelconque gloriole humaine.
La kénose est ainsi un trait distinctif de la révélation même du Dieu chrétien, du Dieu "de Jésus-Christ, non des philosophes et des savants" (Pascal), un trait qui retourne comme un gant nos représentations spontanées de Dieu. Elle est aussi à l'origine d'un grand nombre de conséquences : au nom d'un pareil Dieu, pareillement "kénotique", on n'exerce pas n'importe comment le pouvoir (et, en particulier, dans l'Eglise, bien entendu). Au nom d'un pareil Dieu, on n'agresse pas superbement la culture ambiante dans la proposition qu'on lui fait de l'Evangile. Et ainsi de suite...
Bref, ici encore, il y du pain sur la planche pour les pasteurs, pour les théologiens et, tout simplement, pour les... chrétiens!
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