vendredi 27 novembre 2020

Bientôt Noël...

 Je comprends la frustration de celles et ceux, parmi les chrétiens, qui se sentent privés de la "messe de Noël" - ici, au doyenné de la Cathédrale, plusieurs appels par jour demandent "s'il y aura une messe de minuit, ou au moins une messe" à Noël - impossible, à ce moment, de leur répondre, et si l'on doit forcer la réponse, elle est tout de même plutôt négative - non, pas de messe publique à Noël, comme il n'y en eut pas à Pâques. Et, permettez-moi de vous dire, si c'est pour arracher trente personnes par messe comme l'épiscopat l'a finalement réussi en France, ce n'est pas la peine! Et figurez-vous que, au risque de choquer, je le comprends : vraiment, les risques sanitaires sont trop importants, et la communauté catholique, comme les autres communautés religieuses, doivent comprendre que ce renoncement est un renoncement à de possibles "clusters" terriblement contaminants. Voudrions-nous nous rendre complices d'une troisième vague, par pure frustration de gamins gâtés? Oh, j'entends déjà les remontrances : "Mais, monsieur l'abbé; nous demandons, nous réclamons, nous exigeons, comme catholiques, notre nourriture vitale, l'Eucharistie! Et surtout à Noël, fête entre les fêtes! Quelle mollesse, celle de vos évêques, qui n'exigent plus rien de leur Etat, qui se font bouffer par lui,... etc., etc. " Oui, j'entends, j'entends...

J'entends aussi les souffrances à mon sens infiniment plus grandes des soignants débordés dans les hôpitaux, de véritables héros que rien ne ménage - en effet pas même notre Etat. J'entends les plaintes des familles qui, après avoir rapproché sans protection papis, mamis et petits-enfants, voient les premiers souffrir en grand nombre dans les soins intensifs. J'entends les détresses des commerçants privés de revenus, et qui vont licencier leur personnel, mettre la clé sous la porte, déclarer faillite. Je vous assure que ces bruits-là me font plus mal que les catholiques dits "en souffrance de messe".

D'abord, dans la foi chrétienne, on n'a pas toujours fêté Noël - cela n'a commencé qu'au IVème siècle, et certainement pas toujours avec la messe.

Ensuite, si nous trouvions, pour une fois, d'autres façons d'être chrétiens et de vénérer l'Incarnation de Dieu dans la faiblesse humaine? Il y a les crèches, dans nos familles ou nos églises - visitons-les! Ici, à la Cathédrale de Bruxelles, elles viennent de toutes les communautés étrangères qui vivent leur foi dans cette grande cité cosmopolite... Magnifique trajet que je vous invite à parcourir avec elles, dans le déambulatoire de l'église. Quant à la crèche même de la Cathédrale, j'ai demandé qu'on y ajoute un personnage : un soignant, médecin ou infirmier et infirmière ou aide-soignant, que vous repérerez vite à son masque : il raconte sans rien dire que l'Enfant de Noël vient pour eux, spécialement pour eux, cette année. Mais dans toutes les églises, les crèches méritent aujourd'hui d'être plus encore qu'en d'autres temps soignées, éclairées, ornées, et qu'on y vienne faire pèlerinage : elles rediront la faiblesse d'un Dieu devenu enfant, privé de parole, lui, le Verbe, la Parole de Dieu. Comment, vénérant ainsi la faiblesse de Dieu, pourrions-nous contaminer cette célébration par des revendications politiciennes, partisanes, idéologiques?

Et "ma messe", direz-vous? Oubliez-vous que, d'ordinaire, nombre de communautés catholiques à travers le monde (en Afrique, par exemple) vivent sans guère plus qu'une célébration eucharistique par trimestre? Et vivent souvent avec plus d'enthousiasme que nous leur foi chrétienne?... Et si la privation temporaire de l'Eucharistie nous était une catéchèse imposée pour que nous nous rendions compte, par défaut, de son importance habituelle? Tout de même, on ne peut pas dire que, d'habitude, tout le monde se presse en masse à la messe!

Que le temps de l'Avent nous soit paix et joie, réserve, souci de l'autre, solitude sans doute, communion spirituelle puisque pas eucharistique, téléphonage pour prendre soin de chacun, aide aux isolés dans les règles prévues de protection sanitaire, prière pour les malades, les mourants et le personnel soignant. Mais qu'il ne devienne surtout pas un temps de stérile polémique entre "Eglises" ou "Cultes" et "Etat" - personne n'en sortirait grandi, et la fête n'en serait que gâchée.

2 commentaires:

  1. Cher Benoît,
    Combien je souscrit à ton message de et pour Noël. Je n'aime, pas plus que toi la politique politicienne, mais pour une fois, je suis pleinement d'accord avec notre Premier Ministre qui nous offre l'image du courage, le courage de dire la vérité, d'oser demander à tous de continuer l'effort entrepris, d'accepter la solitude, n'est-ce pas le moment de rentrer en soi et de reconnaître que nous avons besoin des autres et des efforts des autres. Je serai seul à Noël, je serai seul en fin d'année,
    je ne veux en aucun cas, malgré tout l'amour que j'ai pour mes enfants et
    mes petits-enfants être une cause de plus à cette fichue pandémie. Il ya tant de façon de prier, de rentrer en soi, de VIVRE.
    Si dans les pires moments des guerres, tous avaient baissé les bras, nous n'existerions plus.
    Que la joie demeure, que l'espoir nous étreigne, que Dieu nous aide ... comme il le fait toujours sans que nous ne nous en rendions compte bien souvent. Personnellement je me sens aidé par une nouvelle sainte au paradis, je la sens tellement proche.

    Bon courage à toi pour tenir bon face à ... tant d'incompréhension. Bon ministère, Deo gratias.

    Marc Quinet

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Un grand merci, cher Marc. De toute coeur avec toi, et en union aussi avec Henriette...

      Supprimer