lundi 14 janvier 2013

Leçon de choses sur le populisme

Pour comprendre le populisme et comment il fonctionne, reprenons en leçon de choses le lamentable tapage autour de la Reine Fabiola.

1° Il faut un bouc-émissaire dans une situation économique de "crise" où les responsables politiques pataugent un peu : une vieille Reine, c'est tout trouvé, elle coûte cher et ne sert plus à rien, ce sera parfait. On oublie donc ce qu'elle a été, ce qu'elle est encore, ce qu'elle a fait, ce qu'elle fait encore, ce qu'elle a donné et qu'elle donne encore (pour résumer, mettons, sa vie au service d'un pays) et on fait feu avec un chœur admirable. On n'hésite pas : ce qui est légal passera pour ne pas l'être, on reprochera à la vieille dame de ne pas appliquer des lois qui n'existent pas, de toucher l'argent qu'on lui verse (dont on revote pourtant soi-même chaque année le montant), et surtout d'avoir des pensées catholiques lorsqu'elle entend disposer de son patrimoine en fonction de ce qui a toujours conduit sa vie. Sur le plateau de la RTBF, ce dimanche midi, un imbécile doublé d'un inculte ira même jusqu'à prétendre que les tableaux de valeur qu'elle possède par héritage et à titre privé, elle n'a pas le droit de les vendre - ce serait un patrimoine national. Il ne sera pas contredit, de même que le sera à peine une autre imbécile prétendant qu'elle ne doit aucun respect à une femme (la Reine) qui n'en a pas pour l'éthique. Rien moins messieurs-dames! Et le bon peuple d'exulter devant ce lynchage à distance de la dame de 85 ans aux fraises, qui n'a guère de moyens de défense, et sur laquelle il est commode de faire porter les péchés et l'incurie de ceux qui sont aux commandes. La démonstration du populisme est ici pratiquement parfaite : jeter des os au peuple, le détournant ainsi de chercher (et, qui sait, de trouver) les responsables véritables des inégalités socio-économiques honteuses qui, à longueur de vie, défigurent en effet notre pays.
2° Dans le même temps, on continue comme si de rien n'était. On accueille à bras ouverts les exilés fiscaux de la France ou d'ailleurs, qui viennent habiter les quartiers huppés de la Région de Tournai ou de Uccle, sous prétexte qu'ils rapportent de l'argent à notre beau pays - qu'ils délaissent le leur ne semble pas inquiéter nos responsables. Belle leçon de solidarité européenne, en vérité.  Et c'est "ca" qui prétend faire la morale à la Reine Fabiola?

     Je suis inquiet de tout cela. Mon beau-frère, que j'ai vu hier lors d'une réunion de famille, le Prof. Dupuis, spécialiste  depuis près de trente ans de questions d'éthique à l'UCL, se disait lui aussi consterné par la bassesse du niveau politique et médiatique actuel. Et nous sommes lui et moi infiniment perplexes devant ce que cela veut dire, devant ces questions que l'on sent bien et qui restent sans réponse... sauf à imaginer le pire : pourquoi veut-on flinguer l'un après l'autre les membres de la Famille Royale (Laurent, Philippe et Mathilde, leurs enfants, le Roi et maintenant Fabiola. A qui le tour), alors que, telle qu'elle est, avec ses défauts et ses qualités (personne ne prétend que ces gens soient parfaits), la monarchie reste chez nous un rempart favorable à une certaine idée de l'unité, de la solidarité, de la fraternité entre des citoyens plus riches et d'autres plus pauvres? Pourquoi les politiciens du Sud se mettent-ils à hurler avec les loups de la NVA, qu'ils dénonçaient il y a peu? Pourquoi use-t-on de procédés dignes de la propagande (ou de la délation) fascistes (traîner dans la boue médiatique quelqu'un qui, en rigueur de termes, n'a rien fait ni de mal ni d'illégal)? Ne peut-on pas soupçonner que c'est le côté catholique avoué qui est ici en cause (soyons explicite : aurait-on pareillement tempêté si la Reine avait souhaité destiner, par Fondation, une part de son argent au Centre d'Action Laïque?)
Etc. Etc.

     Questions sans réponse, pour le moment. Questions inquiétantes, précisément pour la santé morale de notre pays. Oui, je suis inquiet de tout cela!

    

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