jeudi 1 juillet 2010

Les vacances

Revoici le temps béni des vacances. l'étymologie dit : de vacare, "être vide, manquer". Et je ressens d'abord ce creux : l'agenda s'est désempli, la surcharge est moindre, voici tout à coup la page blanche. Pour un peu, j'en serais désarçonné, moi qui cours tous les jours après le temps pour le rattraper. D'un côté, c'est l'oasis longtemps rêvée. D'un autre, la bascule : on passe du tout au (presque) rien, du plein au vide. Mais, pour parodier Bécaud, "et maintenant, que vais-je faire, de tout ce temps, que sera ma vie?"
Oh, tout me convie à combler au plus vite cette béance offerte : ré-emplir mes journées par tel voyage ou telle sortie, tels amis que je n'ai pas vus depuis trop de mois, et surtout il y a ce sommeil en souffrance, à récupérer. Comme si je devais, vite, vite, occuper le terrain déserté par de nouvelles tâches. En réalité, ce "rien" m'effraie, moi comme tout le monde. L'être humain a peur du vide, c'est bien connu, il ne se penche sur ses bords qu'avec la plus grande appréhension, il se hâte de le remplir : la porte, sinon, ne serait-elle pas ouverte à la gamberge, à la déprime, même? Ce que Pascal, le philosophe, appelait au XVIIème siècle le "divertissement" aura tôt fait de le rassurer...
Je suis entré ce matin dans l'église, la belle église d'Enghien. Pas un bruit. les vitraux du choeur recevaient et diffractaient encore la lumière de l'Est, l'aube de la résurrection. Je me suis assis dans la promesse de cette journée, avec au coeur ce vide, cette vacance. Dieu s'y offrait à mon désir dans une plus grande béance, celle de son amour. "Je 'tattends", voilà ce mot qui résonnait à mes oreilles et, plus encore cet autre, prononcé dans le silence du matin : "Je te cherche". Avec le matin venait à moi un Dieu lui-même vacant, vide, sans a priori sur ma personne, n'ayant qu'un désir : être assez dépouillé pour me combler. "Lui, de condition divine, ne retint pas jalousement le rang qui l'égalait à Dieu. Mais il s'anéantit lui-même..." Ainsi parle Paul, lorsqu'il raconte aux Philippiens la geste du Christ et lorsque, ce faisant, il nous raconte qui est Dieu pour les hommes (cf. Ph 2, 6-7) : un abîme d'amour en quête du nôtre, une quête amoureuse de notre quête.
J'avais envie de dire les versets du psaume des Laudes, ce matin-là : "Dieu, tu es mon Dieu, je te cherche dès l'aube, mon âme a soif de toi..." Et sans que j'eusse prononcé aucune parole, déjà le Verbe me précédait et sans rien dire s'appliquait à lui-même ces propos inauguraux : "Homme, tu es mon Dieu, je te cherche dès l'aube, mon âme a soif de toi..."
Je suis sorti de l'église une bonne heure plus tard. Des enfants trottaient dans la rue de la Fontaine, des jeunes libérés de l'école y esquissaient des courses de planches à roulettes : ils couraient eux aussi vers les vacances, chacun cherchant son repos. J'avais trouvé le mien, et je crois bien que j'avais prié.

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