mercredi 16 mai 2012

"Notre victoire"

Non, non, rassurez-vous : je ne parle pas, sous ce titre, des dernières élections présidentielles françaises! (Il est d'ailleurs surprenant que j'aie reçu pas de mal de réactions à mes propos - du reste modérés - sur ce sujet, et pas pour d'autres : ah! politique, quand tu nous tiens! Du reste, je me demande quelquefois si, pour un certain nombre de catholiques, la foi n'est pas d'abord là-dedans, je veux dire dans ces appartenances bloc à bloc, plutôt que d'être d'abord dans un attachement de tous les instants au Christ. De tous les instants! Je me trompe?) Bon, laissons cela.
"Notre victoire" : celle du Christ. Je suis particulièrement sensible à  l'oraison de la messe de l'Ascension : "L'Ascension de ton Fils, disons-nous à Dieu le Père, est déjà notre victoire. Il nous a précédés dans la gloire auprès de toi, et c'est là que nous vivons en espérance."
Mais de quoi donc sommes-nous ainsi vainqueurs avec le Christ?
De notre humanité.
Je suis frappé de ce qu'au fond aucune pensée humaine, aucune philosophie, ne soit complètement résignée, même le pessimisme (comme attitude et comme comportement, voyez Emile Cioran, par exemple : certes, désabusé, revenu de tout, comme on dit, mais son talent littéraire grandit ce pessimisme lui-même et le transfigure en une espèce d'espérance). Même complètement athée, même dans le refus du "ciel" et de la transcendance (Démocrite, Epicure, Lucrèce, Feuerbach, Marx, Freud,  Nietzsche, Comte-Sponville, Onfray, etc.), et quelquefois précisément parce qu'il y a ce refus, l'homme est grand, se veut grand, se rêve grand, entend sortir de son animalité, alors même que l'y ramènent le quotidien, les maladies, les misères de toutes sortes et finalement, sa finitude et la perspective de sa mort inévitable.
C'est que "l'homme passe infiniment l'homme" (Pascal).
Et ce rêve de l'homme, pour nous, le Christ l'accomplit, en nous divinisant, en nous faisant participer à sa victoire sur la mort, sur la finitude, sur la misère, sur la maladie, sur le quotidien. En nous transportant, en nous élevant avec lui dans l'éternité de l'amour de Dieu.
Et, de ce point de vue qui change tout, en nous renvoyant aussi, du même mouvement, au quotidien, à la maladie, à la misère, à la finitude, à la mort, pour y être sur cette terre de glorieux combattants avec lui, parce qu'habite en nous la puissance de Dieu. Nous ne nous laisserons plus jamais faire, aussi tristes et découragés puissions-nous êtres parfois : vainqueurs, nous sommes, vainqueurs nous resterons!
C'est une espérance folle qui brille dans nos quotidiens tourmentés - elle n'empêche pas que nos quotidiens soient tourmentés, sinon elle ne serait pas une espérance. Ce n'est pas une gloriole humaine et, pour revenir au début de ce "post", ce n'est certainement pas non plus - ou en tous les cas, pas d'abord! -  une prétention politique.
C'est une incroyable puissance de Vie, de Résurrection, d'Eternité, qui irrigue désormais nos pauvres membres humains, fragiles, éphémères et dérisoires, nos psychologies toquées, nos fêlures, nos blessures, nos pauvretés de toutes sortes, nos incapacités relationnelles, nos doutes, nos fatigues, nos paresses, notre malheur d'être au monde.
"L'Ascension de ton Fils est déjà notre victoire. Nous sommes les membres de son corps. Il nous a précédés dans la gloire auprès de toi, et c'est là que nous vivons en espérance."

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