dimanche 13 mai 2012

"Mon coeur, là où je suis ce que je suis"

La formule est d'Augustin, du grand Augustin, dans ses Confessions, rebaptisées Les Aveux dans la traduction assez récente et souvent suggestive de Frédéric Boyer (P.O.L, 2008).
Ce soir, ce dimanche soir, après quelques joies (pastorales, ce matin : de touchantes "premières communions" à Thoricourt, une belle célébration à Enghien avec trois baptêmes magnifiques, un déjeuner avec des amis, d'autres rencontres amicales l'après-midi), mais avec tout de même le coeur lourd, alourdi par les peines confiées, quelquefois impartageables, dans l'un de ces moments où l'on se sent... usé, je relis, comme toujours pour me guérir de moi-même, les mots de saint Augustin.
Et donc, en voici quelques-uns, prélevés chez cet homme qui a réussi le tour de force littéraire et spirituel de n'être pas impudique en livrant le plus intime de lui-même (car le plus intime n'est pas le plus érotique, contrairement à ce que pensent les imbéciles ou les voyeurs - c'est la même chose, mais le plus intérieur).
Lisez, et puis fermez les yeux, mes amis. Et respirez, comme Augustin respire quand il parle à son Dieu :

"Tu es le médecin de mon intimité. Clarifie alors les choses pour moi. Quel bénéfice retirer de ce que je suis en train de faire? Les aveux de mes fautes passées, celles que tu as effacées et cachées pour me rendre heureux avec toi, mon âme transformée par la confiance et par ton sacrement, chacun peut les entendre ou les lire. Les coeurs sont réveillés et ne s'endormiront plus dans le désespoir en disant : je ne peux pas. Il sont éveillés à l'amour de ta pitié et à la douceur de ta faveur qui rend à tous les infirmes leurs capacités en même temps que la conscience de leurs infirmités. (...)  Qu'ils me connaissent personnellement ou pas, ils ont appris des choses sur moi directement ou indirectement. Mais ils n'ont pas une oreille branchée sur mon  coeur, là où je suis ce que je suis. (...) Ecoutez-moi. (...) J'avouerai ce que je sais de moi. J'avouerai aussi ce que je ne sais pas de moi. Ce que je sais de moi, je le sais quand tu m'éclaires. Et ce que je ne sais pas de moi, je n'en sais rien tant que ma nuit n'est pas midi sur ton visage." (St AUGUSTIN, Confessions, X, 4-7 = Les Aveux, trad. F. Boyer, POL, 2008, pp. 263-5, passim).

Vous avez lu?
Vous avec vu la grandeur de l'homme, et combien il est possible de se raconter sans se pavaner, quand on se raconte devant Dieu, quand on raconte devant Dieu son énigme et sa misère, c'est-à-dire, quand on prie?

1 commentaire:

  1. C'est le renversement de toute la métaphysique qui existait depuis des milliers d'années(préhistoire-Sumer-Egypte-philosophies grecques,Confucianisme etc.) tout à coup cette approche au coeur de l'être, la prise de conscience non seulement du soi physique ou psychique, ou moral, mais du soi spirituel. Saint Augustin, par ses "Aveux ou Confessions" va au coeur de soi-même, vers la trancendance de l'être, par ce je ne sais quoi que Jésus a apporté au monde du plus profond de l'insondable. C'est pourquoi la littérature en ce qu'elle remue le fond de l'être humain est la forme suprême de l'art d'être; en ce qu'elle nous dévoile par le fond, elle dévoile aussi par la forme l'extrême subtilité de l'art. HZ

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