samedi 4 avril 2020

La "kénose" du Christ

Dès ce soir nous entrons, avec le "Dimanche des Rameaux et de la Passion", dans la Grande et Sainte Semaine. Les textes de la liturgie, ce soir et demain, en particulier les textes bibliques, sont d'une très grande richesse spirituelle.
Arrêtons-nous sur la "deuxième lecture", l'hymne de la Lettre de Paul aux Philippiens (Ph 2,6-11), l'un des textes les plus denses de la Révélation chrétienne.
Paul y parle du Christ, et probablement greffe-t-il sur son nom, par le biais d'une relative, une hymne déjà connue et chantée dans la communauté des chrétiens de Philippes. "Le Christ Jésus, lui qui subsistait en forme de Dieu - je traduis au plus près du grec - n'a pas considéré comme une proie à retenir d'être traité comme Dieu, mais il s'est vidé (en grec : ekenosen heauton, d'où le nom de "kénose" que l'on va donner à ce mouvement…), prenant la condition de serviteur, devenant semblable aux hommes, et reconnu à son aspect comme un homme, il s'est abaissé, devenant obéissant jusqu'à la mort - une mort de croix. C'est pourquoi Dieu l'a souverainement élevé…" (etc.)
En Christ, Dieu se présente à nous comme un mouvement de "vidange", de "vide de soi" - car si c'est bien le Christ Jésus qui est le sujet de cette hymne, il faut convenir que ce mouvement atteint Dieu lui-même, puisque le Christ est Dieu et "subsiste en forme de Dieu"...
De Dieu nous avons souvent des images de plein, de trop plein même : sa toute-puissance, son règne éternel, etc. nous semblent écrasants. Et voilà qu'en Christ, tout se retourne de ces attributs, comme on retourne un gant : la toute-puissance se révèle, se donne à connaître, dans la toute-faiblesse assumée de la Passion. Ce "vide" en Dieu est volontaire, et signe de son amour : il s'est mis plus bas que tout pour nous montrer qui il est, ce qu'il est.
Les conséquences sont immenses : au nom d'un tel Dieu, d'un Dieu pareillement "kénotique", on ne saurait envisager un christianisme de conquête, ou de reconquête, de pouvoir, d'affirmation péremptoire de soi, de détention absolue d'une vérité définitive sur tout, etc.
Au nom d'un Dieu pareillement kénotique, pareillement agenouillé devant l'homme, on s'agenouille soi-même devant l'autre.
Et cette attitude - cette attitude seulement - nous relèvera tous!
Belle et sainte Semaine!

2 commentaires:

  1. Alors pourquoi "A toi le règne, à toi la puissance, à toi la gloire..." ? (Que je refuse de prononcer...Je ne parle pas à mon Père comme cela...)

    Belle semaine à vous aussi !
    Michel

    RépondreSupprimer
  2. Cher Michel, oui, "à Dieu seul" la gloire - la vraie, comme la vraie puissance, qui ne se donne à voir, précisément, que dans la faiblesse assumée, et n'a rien de commun avec nos glorioles humaines, trop humaines!

    RépondreSupprimer