lundi 17 juin 2019

Souvenirs, souvenirs...

La nuit s'avance… Et je relis le "Journal" que je tenais dans les dernières années de mon Séminaire, à Tournai, juste avant l'ordination sacerdotale qui eut lieu le 24 juin 1984 - il y aura bientôt trente-cinq ans!
Puis-je citer une page? Je la signerais encore, elle date de la retraite préparatoire à l'ordination, et précisément du vendredi 22 juin 1984 - l'avant-veille de ce jour-là, donc, une avant-veille dont je me souviens vaguement qu'elle était troublée, assaillie de doutes. On ne se décide pas à passer toute sa vie dans le célibat consacré, au service d'une Eglise diocésaine, "comme ça", sans quelques soubresauts intérieurs. Bon, en tous les cas, voilà ce texte:


                              
                                                      Vendredi 22 juin 1984


     Vivre dans ma chair ce que je célébrerai : le mystère de Jésus Abandonné. J'avais oublié qu'il est mon seul époux. Je n'ai que lui sur la terre. Alors, tout devient possible et l'unité, notre Idéal, me fera choisir jour après jour de vivre pour Dieu. "Quand l'ombre de la Croix paraît, je me recueille. Une douleur, quelle qu'elle soit, est toujours comme le tintement de la cloche qui appelle à la prière" (Chiara Lubich). J'ai cru comprendre qu'il me veut faible, "pour que je n'aille pas m'enorgueillir" (2Co 12, 7).
     Voici que se termine cette retraite. Je crois y avoir fait une expérience fondamentale : que seule ma faiblesse, mon péché, l'écharde dans ma chair, me permettront de prier vraiment, de crier, toujours, pour demander l'humilité. Cela fait extrêmement mal : on voudrait que tout fût propre et net, qu'il n'y eût aucune bavure et, par une économie mystérieuse, le Seigneur enfonce dans notre chair une écharde de faiblesse et l'y maintient fermement, comme lui-même fut fermement maintenu à la Croix par les clous.
     Accepter de démissionner de la volonté d'être net, pour crier vraiment qu'on n'en sort pas seul, et accéder à la prière du Nom de Jésus. Ne jamais oublier cela. Jamais. Au risque, sinon, de se perdre pour de bon.
     "Ceci est mon Corps, ceci est mon Sang" : après-demain, si Dieu me prête vie, je serai devenu avec sa grâce et la force de son Esprit une chair prêtée pour être transformée en la sienne. Quelle mystérieuse alchimie! J'ai renouvelé aujourd'hui ma consécration à Jésus Abandonné, pour que tout péché soit vécu en lui comme déjà pardonné, toute faiblesse comme déjà secourue, toute souffrance comme déjà soufferte. Toute lutte, comme déjà victorieuse. Ô Dieu, qu'il en soit ainsi, je t'en supplie!  "Jésus, Fils de Dieu, Sauveur, prends pitié de moi, pécheur!"

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