samedi 12 novembre 2016

Election de Trump, démocratie (suite)

L'élection de Mr Trump aux USA pose une série de questions fondamentales, philosophiques, théoriques, que je voudrais évoquer ici.
La première : la démocratie suppose-t-elle simplement l'obtention d'une majorité arithmétique? Evidemment, elle la suppose, mais pas "simplement". On voit bien, dans les réactions hostiles des foules qui s'assemblent en certaines grandes villes des States, que "quelque chose" semble n'avoir pas été respecté.
Ce "quelque chose" n'est pas, je l'ai dit dans mon précédent post, le processus électoral. Celui-ci n'est pas le même que chez nous, sans aucun doute, son ressort est "majoritaire" et non "proportionnel", ce qui fait que Mme Clinton a eu plus de voix que Mr Trump, et néanmoins n'est pas élue. Mais rien de contraire en cela à la démocratie : c'est une manière de tenir compte du poids des états fédérés dans une république fédérale.
Ce "quelque chose" est bien davantage moral ou éthique, comme on veut. On est gêné de voir arriver au poste le plus important du pays un homme qui, dans certains discours du moins, méprise ouvertement des "choses" jugées importantes, comme : le respect des femmes et de leur égalité foncière avec les hommes, le respect des minorités sexuelles et en particulier des personnes homosexuelles, le respect des migrants, d'où qu'ils viennent, le respect des autres peuples de la terre, où qu'ils soient... Et comment nommer ces "choses", en morale? Tout simplement, des "valeurs".
Dès lors, poursuivons le raisonnement : une démocratie n'a pas son seul ressort dans une addition arithmétique, mais aussi dans le respect de certaines valeurs morales dont on pense qu'elles devraient être partagées par tout le monde, sauf à nous condamner à une vie impossible : la vérité "vaut" mieux que le mensonge, l'égalité "vaut" mieux que la discrimination, l'accueil "vaut" mieux que le rejet, et ainsi de suite. Méprisez ces valeurs - même une seule d'entre elles -  et une société s'effondre. Le sentiment d'effroi qui entoure ici et là l'élection de Mr Trump me semble, de façon fondamentale, toucher à cela, qui est au cœur de l'éthique commune et de sa philosophie.
Nous voilà d'accord, sans doute. Mais cela complique singulièrement notre idée de la démocratie : qui, quelle instance, va dresser la liste et dire le contenu de ces valeurs? Quelle autorité morale? On ne saurait s'en remettre à la majorité arithmétique - nous venons de convenir qu'elle est, précisément en ce domaine, insuffisante... Faut-il s'en remettre à l'air du temps? A la mode? Aux convictions de ceux que l'on nomme drôlement les "intellectuels"? Aux autorités religieuses? Non? Alors à qui, à quoi?

Vaste question, vaste débat. Et pourtant, essentiels, au cœur de nos démocraties et de leur possible survie. Question, et débat, largement ouverts!

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