vendredi 17 juin 2016

Les contrefaçons du christianisme

Je songe à cette publicité ancienne ("que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître", comme chantait l'autre), et qui portait sur une boisson dégoûtante appelée "Canada Dry". On y disait : "C'est blond comme l'alcool, c'est doré comme l'alcool, mais ce n'est pas de l'alcool..." En réalité, c'était de la pisse de rat, il eût beaucoup mieux valu s'envoyer un vrai bon whisky.
Nous sommes semblablement submergés par des contrefaçons du christianisme : blondes comme lui, dorées comme lui, mais ce n'est pas lui! L'exemple le plus frappant vient des discours nationalistes qui revendiquent  une "identité" chrétienne de l'Europe et, pour cela même, souhaitent fermer les frontières de ladite Europe et de chacune de ses nations aux migrants ou, quelquefois plus généralement, aux musulmans. Je songe, par exemple, aux vidéos perverses,  remplies d'amalgames nauséabonds distillés par l' "Institut Iliade" - voir sur YouTube.
Le christianisme a certes forgé, pour une part, l'identité européenne.
Mais il l'a précisément fait par son ouverture aux autres et à l'Autre, qui constitue le cœur de son cœur. La Bible juive et chrétienne est une longue épopée de migrations et de souvenance que l'on fut soi-même "en Egypte, un immigré", de nécessité dès lors d'accueillir ceux-ci et de les respecter lorsqu'ils se présentent, d'alliances avec les nations étrangères - même au creux du terrible exil babylonien, lorsque semble avoir disparu tout signe extérieur de l'identité primitive (il n'y a plus de Temple, il n'y a plus de prêtres, il n'y a plus de prophètes,  "et pour combien de temps, nul d'entre nous ne le sait..."). Et le Nouveau Testament n'est pas en reste, qui ouvre généreusement aux nations le salut que d'aucuns auraient voulu réserver aux seuls Juifs (Jésus lui-même, déjà, voyez, après ses réticences, son ouverture à la Cananéenne, et surtout Paul, bien sûr et sa volonté d'aller au large porter la Bonne Nouvelle.) Le christianisme est une religion du voyage, de la rencontre, de l'émerveillement devant l'autre - et là est son identité. Désire-t-il "assimiler" l'autre? Mais... non : car "assimiler", c'est "rendre semblable" (similis) à soi, et de cela il n'a nulle envie. Se laissera-t-il alors "bouffer" par les autres? Mais les chrétiens ne sont-ils pas disciples d'un Dieu qui se laisse manger (voyez l'Eucharistie) ou, plus précisément, qui se donne à manger - sachant qu'au final, comme disent les Pères, ce n'est pas alors  Dieu qui se transforme en l'homme, mais l'inverse?
Les contrefaçons viennent des amalgames (et notamment politiques) que l'on est toujours tenté de proposer comme "vérité chrétienne" depuis la naissance même de cette foi, de cette "Voie". Ils ne doivent pas nous éblouir et nous distraire de la fidélité véritable au Christ, qui accueille la nécessité de la perte dans le don de soi, "pour que tous aient la vie, la vie en abondance."

PS. Dans ce sens - je le prends ainsi - j'ai reçu ce matin une lettre encourageante du Pape (mais oui!), qui "m'assure de sa prière pour moi et mon ministère, ainsi que pour les personnes que j'accompagne sur le chemin d'une rencontre avec le Christ, visage de la miséricorde de Dieu." Je transmets, donc...

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