jeudi 7 mai 2015

Succession de Mgr Léonard (suite) : une Eglise démocratique?

Parmi toutes les réflexions lues et entendues ces jours-ci à propos de la démission et de la succession de Mgr Léonard à l'archevêché de Malines-Bruxelles, en voici une qui mérite qu'on s'y arrête : et pourquoi faut-il qu'un évêque soit nommé? Et si le peuple chrétien était électeur, tout simplement, de son évêque? (On pourrait du reste dire la même chose pour les doyens et les curés).
Ce n'est pas sot : dans l'histoire de l'Eglise, certains processus démocratiques ont parfois fonctionné pour élire des évêques (on cite souvent le cas d'Ambroise de Milan, au IVème siècle : élu par le peuple, parce qu'il était... préfet de police, et qu'il fallait remettre de l'ordre dans une Eglise troublée par le schisme arien, bon, je ne suis pas sûr que l'exemple soit jusqu'au bout convaincant.) Quelquefois, ces processus fonctionnent encore, de façon plutôt formelle (consultation plus qu'élection par le Chapitre Cathédral dans certains diocèses). Et, dans tous les cas, le Peuple de Dieu est consulté - par le biais de représentants, prêtres et laïcs, sollicités par le Nonce Apostolique. Mais, convenons-en, cela ne fait pas une élection.
La question demeure, donc : le processus de désignation d'un évêque doit-il se calquer sur une élection civile?
Il me semble que ce n'est pas possible jusqu'au bout, pour un motif théologique : l'évêque n'est pas le représentant du Peuple, mais l'envoyé du Christ et le successeur des Apôtres. Semblablement le contenu de la foi n'est-il pas le résultat d'un compromis démocratique (on se mettrait d'accord sur ce que l'on croit) mais la réception d'une "Révélation" inattendue, à laquelle on n'aurait pas soi-même pensé (le Christ est vivant, présent, ressuscité des morts), et l'évêque est là pour rappeler cet inattendu de la Révélation, que celle-ci reçoive ou non une majorité de suffrages populaires. Cela fait partie du ministère ordonné que de se placer en vis-à-vis du Peuple de Dieu, pour le rassembler et lui rappeler la nouveauté sans cesse recommencée de Dieu et du salut offert par lui dans le Christ. Donc, quelquefois pour le secouer, aussi. L'évêque - le doyen, le curé, etc. - est un "envoyé" (apostolos), il gêne par son étrangeté, il doit être capable de bouleverser des habitudes, d'interroger des connivences trop bien établies, de remettre en cause des idées toutes faites.
S'il était le simple produit d'une élection par la communauté, il lui serait en quelque sorte soumis et agirait, prêcherait, présiderait au gré des désirs de celle-ci -  désirs quelquefois contradictoires.
Que des processus de consultation existent pour affiner le "profil" espéré par le Peuple de Dieu, cela me semble essentiel (du moins si ces processus sont respectés), mais qu'on procède sans plus à une élection ne conviendrait pas à la spécificité du ministère ordonné.

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