samedi 19 novembre 2022

L'étrange royauté du Christ

 Ce dimanche liturgique proclame "le Christ Roi de l'Univers" - une solennité décrétée par le pape Pie XI, en 1925, qui voulait affirmer par là que toutes les nations devaient obéir à la royauté du Christ!

Sauf que... l'évangile entendu aujourd'hui, un passage de la Passion selon saint Luc (Lc 23, 35-43) qui raconte les derniers moments du Christ en Croix, et l'adoption par lui de celui que la Tradition va appeler "le bon larron", sauf que tout cela donne en effet une étrange image de la royauté du Christ.

Roi sans couronne - sinon la couronne d'épine.

Roi sans trône - sinon l'instrument de supplice le plus dégradant à son époque.

Oui, étrange royauté. Et pourtant royauté! Oh non pas l'une qui ferait nombre avec nos terrestres royaumes (ou républiques, comme on veut... ). Ni, encore moins, qui leur ferait de l'ombre! La royauté du Christ, comme il l'a - cette fois d'après l'évangile de Jean - déclaré devant Pilate, "n'est pas d'ici".

Pilate... C'est pourtant lui, le païen, le non Juif, le Romain de service, qui a tenu à faire proclamer devant tous et pour toutes les générations la royauté de Jésus crucifié : "Roi des Juifs", a-t-il fait écrire, et en plusieurs langues, au sommet de la Croix, comme motif de la mise à mort. La vérité, une fois encore, est venue du dehors!

Mais, tout de même, étrange roi! Il n'y a pas plus exclu, pas plus paria, qu'un condamné à la Croix. Nous sommes ici dans les marges de la société bien-pensante, bien-croyante, bien-disante. Le crucifié est un rebut. Et donc, allons jusqu'au bout de cette fête liturgique : malgré les ambitions de reconquête qui sans doute animaient Pie XI, il aura fait savoir à tous, et pour toujours, que le Royaume attendu est une société - visible seulement à la fin du temps, mais dont il nous incombe de hâter la survenue  - où c'est le paria, le rejeté, l'exclu, qui est Roi.

Voilà comment, et pourquoi, le Christ est Roi.

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