dimanche 5 mai 2024

Nouvelles de Rome


 Rentré jeudi soir de Rome, après quelques jours intenses (8h00-21h00) d'un Congrès qui aura porté sur "la synodalité" comme exercice spécifique de la vie fraternelle et de la prise de décision en Eglise. Etrange animal, direz-vous, que cette "synodalité" - étymologiquement, une manière de faire route ensemble, en se plaçant dans l'écoute de l'Esprit Saint par la prière, l'attention portée à la Parole de Dieu et surtout aux points de vue de chacun, avec une pédagogie et des procédures très spécifiques. L'Eglise s'est débarrassée (du moins espérons-le) de son modèle monarchique de fonctionnement; elle n'est pas une oligarchie ou une aristocratie. Elle n'est pas non plus simplement une démocratie, surtout quand la démocratie fonctionne comme une pure et simple addition de voix pour arriver à une majorité. La synodalité emprunte certes des éléments à la démocratie, mais ne s'y réduit pas - notamment par l'écoute d'une Parole, répétons-le, qui dépasse ceux qui se concertent pour une prise de décision à travers des "conversations dans l'Esprit" largement inspirées de la tradition ignatienne (le pape est... un jésuite, ne l'oublions jamais!) François entend ainsi ouvrir l'Eglise et ses fonctionnements à une manière à la fois traditionnelle et innovante de vivre ensemble et de décider ensemble. La question qui nous occupait devenait dès lors multiple, à savoir : comment concilier cette méthode et l'autorité canonique du "curé", voire plus largement du ministère ordonné? Comment cette proposition devrait-elle conduire à la révision d'un certain nombre d'articles du Code de Droit Canonique? Cette manière de procéder pourrait-elle inspirer des prises de décision en-dehors de l'Eglise, et par exemple dans des domaines géo-politiques? Ajoutons que nous avons non pas d'abord assisté passivement à des exposés qui nous expliquaient la synodalité, mais travaillé en petits cercles qui la pratiquaient. Rencontres enrichissantes, donc, ne serait-ce que par les échanges entre curés venant d'horizons très divers (dans mon groupe francophone : un Luxembourgeois, un Français, un Libanais, un Camerounais, un Togolais, un Ivoirien, un Italien francophile, un Canadien; pour l'ensemble du Colloque, 99 pays représentés.)

Jeudi matin, nous avons longuement rencontré le pape, qui est en très bonne forme, sauf sa mobilité. Il a beaucoup plaisanté et ri avec nous, au cours d'un échange par ailleurs très direct dans lequel il a redit sa volonté de contribuer par tous les moyens à la paix dans le monde, même si on ne comprend pas toujours cette posture évangélique. Les guerres ne servent à rien, dit-il en substance, elles finissent toujours par des armistices et des compromis, mais après des boucheries épouvantables et des malheurs sans nom pour des populations entières. Elles n'apportent aucun profit à personne, sauf aux marchands d'armes...

En le saluant, je lui ai dit que nous l'attendions en septembre à Bruxelles ("Santità, la aspettiamo con gioia in Belgio  in settembre") et il m'a avec un grand sourire répondu "Si, si, ci vedremo allora!"

Et maintenant, il me faut écrire un rapport pour la Conférence des évêques. J'ai commencé mais  c'est un gros travail! Au boulot!