dimanche 23 février 2014

La sainteté d'un cardinal

En "créant" hier, fête de la "Chaire de Pierre", les premiers nouveaux cardinaux de son pontificat, le pape François leur a entre autres déclaré ceci :

"La sainteté d'un cardinal consiste vraiment en ce supplément d'oblativité gratuite. Par conséquent, aimons ceux qui nous sont hostiles; bénissons celui qui dit du mal de nous; saluons d'un sourire celui qui peut-être ne le mérite pas; n'aspirons pas à nous faire valoir, mais opposons la douceur à la tyrannie."

Beau programme pour tout le monde, et conforme du reste à la page d'Evangile entendue ce matin. On commence quand?

dimanche 16 février 2014

Présence, accompagnement, optimisme...

Retour de Picardie, ce soir, où j'ai passé le week-end dans une famille amie : mémoire de Simon, un jeune garçon mort il y a onze ans d'une tumeur au cerveau, célébration "autour de lui" hier avec tous les siens (une centaine de personnes, tout de même!), joie de retrouver son Oncle Eric, ce midi, opéré mercredi dernier lui aussi gravement, mais debout, vaillant, combattant, joie, oui en tous les cas, joie de la retrouver,  cette famille qui traverse non sans peine mais sans amertume les aléas de la vie. Et - ils ne m'en voudront pas de le dire ainsi : joie simplement chrétienne, de ces jeunes gens qui ne cherchent ni ne trouvent dans la foi aucune  protection magique, mais l'occasion, simple, évidente pour eux,  d'une traversée originale, "espérante", de la vie - d'une vie qui ne ménage pour personne ses peines ou ses surprises.
Oh! Comme ce sont des amis, ceux-là, ceux dont j'ai béni les mariages ou les enfants que j'ai baptisés, comme j'aime les voir grandir dans la vie, être entreprenants, oser des choses, risquer l'existence, avoir l'audace d'y arriver... et en même temps, tout demander à Dieu, s'en remettre dans la foi. Quelle émotion ce midi d'entendre ces gamin(e)s de vingt ou vingt-cinq ans demander une prière avant le repas, parce que leur papa venait de rentrer de l'hosto, qu'il entamait sa convalescence et  que nous avions tous le bonheur de partager la table commune. J'ai quelquefois l'impression que ces gestes, ces demandes, sembleraient chez nous incongrus, désuets, alors que cette jeunesse est au "top" de l'intelligence, de la volonté d'entreprendre et de vivre une vie assumée (dans toutes sortes de domaines : le commerce, l'art dramatique, la création, tout ce qu'on veut mais... vivre!)
Quelle joie de vivre, en effet!
Comme tout cela est éloigné de tant de mesquineries, comme tout cela nous - et en tous les cas "me" - recadre dans l'accompagnement essentiel que nous nous devons les uns aux autres : nous encourager, nous soutenir, nous "soigner", et finalement, pour le dire d'un mot qui résume tout mais est tant galvaudé : nous aimer!
Le reste, les tracasseries quotidiennes - j'en ai une série sur l'agenda de la semaine ouverte aujourd'hui -, les petitesses d'esprit, et ce que j'appelle sur ce blog régulièrement les "conneries" des uns et des autres, en ce compris les miennes, n'ont aucune importance devant la page d'Evangile vivant qui a été lue devant moi, avec moi, ce week-end. Car l'Evangile n'est pas un texte figé dans les lignes d'un  Livre,  c'est le Verbe même, la Parole de Dieu, qui quelquefois vous est renvoyée avec tant d'audace dans la figure - par le Peuple de Dieu, à vous, le prêtre - que c'est vous - le prêtre - qui en êtes évangélisé. Ainsi, en effet, va la vie de l'Eglise : elle n'est hiérarchique qu'en apparence, puisque tout vient du cœur et que, dans le cœur, il n'y a pas de hiérarchie.
Heureusement!

jeudi 13 février 2014

Le rôle de l'Etat : Evangelii gaudium/5

Pour ponctuer les deux messages précédents, et poursuivre avec les lecteurs de ce blog le parcours de l'Exhortation apostolique du pape François, j'ajoute ceci, que l'on trouve au n°240 :

Il revient à l'Etat de prendre soin et de promouvoir le bien commun de la société. Sur la base des principes de subsidiarité et de solidarité, et dans un grand effort de dialogue politique et de création de consensus, il joue un rôle fondamental, qui ne peut être délégué, dans la recherche du développement intégral de tous. Ce rôle, dans les circonstances actuelles, exige une profonde humilité sociale.

Et, au n° suivant (241) :
 
Dans le dialogue avec l'Etat et avec la société, l'Eglise n'a pas de solutions pour toutes les questions particulières. Mais, ensemble avec les diverses forces sociales, elle accompagne les propositions qui peuvent répondre au mieux à la dignité de la personne humaine et au bien commun. Ce faisant, elle propose toujours avec clarté les valeurs fondamentales de l'existence humaine, pour transmettre les convictions qui ensuite peuvent se traduire en actions politiques.

Euthanasie des mineurs : la Chambre a voté "oui"

La Chambre a donc adopté le texte de loi étendant la possibilité d'euthanasie aux mineurs d'âge qui en font la demande, moyennant l'accord de leurs parents. Tout a été dit, pratiquement, sur cette loi, dans un sens ou dans l'autre, et la déclaration des Evêques de Belgique, ce soir,  reprend avec brièveté et pertinence tout le désarroi que l'on peut ressentir, du seul point de vue éthique, face à cette légitimation.
Je ne doute pas des bons sentiments et de la "bonne volonté" des promoteurs de cette loi. La question n'est pas là, elle est autrement vaste et ample : quand une société, dans ce qui la "tient ensemble" (la Loi) s'écarte de la "Loi naturelle" (comme on dit sans doute malhabilement dans l'Eglise) - mettons, globalement, des droits de l'homme - alors la chose est grave. En l'espèce : c'est l'interdit fondamental et universel du meurtre qui est ici bafoué par la loi civile, et du meurtre d'enfants et d'adolescents en particulier (même demandeurs).
Les pédiatres, les oncologues, aux prises quotidiennement avec quelques situations dramatiques, ne demandaient pas cette loi. Des sédations existent, qui peuvent supprimer, dans pratiquement tous les cas, les douleurs physiques.
Alors, pourquoi avoir voulu légiférer, malgré les recommandations contraires d'instances internationales?
Pour des motifs idéologiques? Pour promouvoir l'idée que le suicide (même assisté) est une noble cause à défendre en de certaines circonstances? On parle de "souffrances physiques intolérables". Les adolescents traversent aussi, et souvent, des "souffrances psychiques intolérables" qui leur donnent des tentations de suicide : on va les y aider?
Je rejoins la "peine" exprimée par nos Evêques, ce soir. Pas parce que je suis, à l'évidence, du côté "des cathos" contre "les progressistes". Ces antagonismes sont tellement dépassés qu'il est désolant de voir certains, de tous les côtés, s'en emparer comme d'arguments ayant quelque valeur.
Non. Je suis peiné parce que je suis du côté de la Vie, même et surtout dans l'accompagnement de la mort.

samedi 8 février 2014

Avec Philippe Defeyt, aujourd'hui, à Lessines

A l'invitation du doyenné de Lessines, j'ai eu la joie de participer cet après-midi, à Lessines, à une conférence-débat de Philippe Defeyt, prof. UCL et Président du CPAS de Namur. Son analyse d'économiste en matière de nouvelles "pauvretés", chez nous, m'a semblé d'une exceptionnelle finesse, de même que son point de vue sur la vie associative et les progrès qu'elle peut apporter à tous. Dans ce débat public, comme responsable de la Région pastorale d'Ath, j'ai pu annoncer mon point de vue, qui est non pas de créer des structure parallèles ou concurrentes aux services publics, mais de leur apporter, comme chrétiens, notre concours, en faisant confiance au monde politique et associatif et en essayant de comprendre les contraintes auxquelles il se heurte. Nous n'allons pas recréer un "monde catholique" versus la société civile, ça jamais!
J'ai demandé aussi - et presque surtout - que l'on n'oublie pas de recadrer nos problèmes locaux dans le contexte international : l'immigration en est un exemple éminent. Si nous ne faisons rien pour, dans le débat public belgo-belge (à l'horizon des prochaines élections, par exemple) disserter sur le pourcentage du PIB qui doit être affecté au développement international, alors nous abaissons ce débat à des querelles mesquines, nationalistes et délétères, et, à terme, nous encourageons racisme et xénophobie. J'ai demandé aussi que ces mêmes problèmes soient recadrés dans une dimension spirituelle, qui est indispensable à leur résolution : "L'homme ne vit pas seulement de pain!" Une question opportune sur la différence entre besoin et désir, et la satisfaction de l'un et de l'autre, est venue étayer cette requête.
Je remercie le doyen de Lessines, mon ami Michel Myle, d'avoir organisé et mené à bien cette rencontre relevante pour toute notre Région.
Le temps des idéologies et fini. Le temps des oppositions "bloc à bloc" est fini.
Les chrétiens se retroussent les manches avec les autres, pas sans eux.

lundi 3 février 2014

Au lendemain de la Chandeleur, une recette de joie : Evangelii gaudium/4

Avez-vous mangé des crêpes? Hier, c'était la Chandeleur, plus liturgiquement la "fête de la Présentation de Jésus au Temple", fête de la lumière du Christ dans nos ténèbres, fête de la joie. C'est que le vieux Syméon accueille dans ses bras l'enfant Jésus, la perpétuelle jeunesse de Dieu dans sa vie longue et usée par l'attente, et il clame avoir enfin vu "la lumière qui éclaire les nations". L'Esprit parlait par sa bouche : quelles que soient nos ténèbres - et elles ne manquent pas! - il nous revient de célébrer la lumière du Christ.
Alors, il faut manger des crêpes : car la crêpe figure le soleil qui serait venu dans nos assiettes, et, dans la foi catholique - où l'incarnation est très présente : Dieu, oui, mais dans la chair! - on aime que la foi passe dans les assiettes... Notez que, si cela n'a pas été fait, il n'est pas trop tard. En outre, les crêpes sont souvent l'occasion d'un repas festif, joyeux, convivial, qui correspond bien à la "joie de l'évangile" rappelée par le pape.
Pape qui dénonce au passage, chez les catholiques, la racine amère travestissant  le message évangélique et le transformant en son contraire, une racine qu'il appelle "la mondanité", ainsi décrite par lui - c'est au n°97 :

Celui qui est tombé dans cette mondanité regarde de haut et de loin, il refuse la prophétie de ses frères, il élimine celui qui lui fait une demande, il fait ressortir continuellement les erreurs des autres et est obsédé par l'apparence. Il a réduit la référence du cœur à l'horizon fermé de son immanence et de ses intérêts et, en conséquence, il n'apprend rien de ses propres péchés et n'est pas authentiquement ouvert au pardon. C'est une terrible corruption sous l'apparence du bien. Il faut l'éviter en mettant l'Eglise en mouvement de sortie de soi, de mission centrée sur Jésus-Christ, d'engagement envers les pauvres. Que Dieu nous libère d'une Eglise mondaine sous des drapés spirituels et pastoraux! Cette mondanité asphyxiante se guérit en savourant l'air pur du Saint-Esprit, qui nous libère de rester centrés sur nous-mêmes, cachés derrière une apparence religieuse vide de Dieu. Ne nous laissons pas voler l'Evangile!
 
 

samedi 1 février 2014

Le pape, un gauchiste épouvantable? Evangelii gaudium/3

Oserais-je reproduire ceci, sans qu'on reproche aux lignes qui suivent d'être épouvantablement gauchistes?
C'est... du pape, au n° 56 de l'Exhortation déjà citée :

Alors que les gains d'un petit nombre s'accroissent exponentiellement, ceux de la majorité se situent d'une façon toujours plus éloignée du bien-être de cette heureuse minorité. Ce déséquilibre procède d'idéologies qui défendent l'autonomie absolue des marchés et la spéculation financière. Par conséquent, ils nient le droit de contrôle des Etats chargés de veiller à la préservation du bien commun. Une nouvelle tyrannie invisible s'instaure, parfois virtuelle, qui impose ses lois et ses règles, de façon unilatérale et implacable. De plus, la dette et ses intérêts éloignent les pays des possibilités praticables par leur économie et les citoyens de leur pouvoir d'achat réel. S'ajoutent à tout cela une corruption ramifiée et une évasion fiscale égoïste qui ont atteint des dimensions mondiales. L'appétit du pouvoir et de l'avoir ne connaît pas de limites. Dans ce système, qui tend à tout phagocyter dans le but d'accroître les bénéfices, tout ce qui est fragile, comme l'environnement, reste sans défense par rapport aux intérêts du marché divinisé, transformés en règle absolue.

Et, au n°58 :

Une réforme financière qui n'ignore pas l'éthique demanderait un changement vigoureux d'attitude de la part des dirigeants politiques, que j'exhorte à affronter ce défi avec détermination et avec clairvoyance, sans ignorer, naturellement, la spécificité de chaque contexte. L'argent doit servir et non pas gouverner. Le pape aime tout le monde, riches et pauvres, mais il a le devoir, au nom du Christ, de rappeler que les riches doivent aider les pauvres, les respecter et les promouvoir. Je vous exhorte à la solidarité désintéressée et à un retour de l'économie et de la finance à une éthique en faveur de l'être humain.