jeudi 4 novembre 2021

Eloge de la précarité

 En préparant l'homélie de ce dimanche, durant lequel nous lirons ensemble un passage de l'évangile de Marc (Mc 12, 41-44) dans lequel Jésus fait l'éloge d'une "pauvre veuve" qui, mettant seulement deux piécettes dans le trésor du Temple, "a pris de son  nécessaire, et non de son superflu" et "a donné tout ce qu'elle avait pour vivre." 

Refaisons encore l'éloge de la précarité. Jésus ne supporte décidément pas les suffisants, ceux qui, ostensiblement, font des largesses qui ne leur coûtent rien. Il aime la précarité de la veuve - rappelons qu'une veuve, à son époque, n'avait pas de pension de survie, ne disposait pas d'accès à la sécurité sociale, était nécessairement, dans la plupart des cas, démunie et dépendante. 

Elle donne peu - deux piécettes, par rapport au don des satisfaits, c'est dérisoire. Mais elle donne tout ou, pour le dire comme le texte le dit, "elle donne de son indigence." On a l'impression que, pour Jésus, c'est le seul don qui vaille, le don qui puise dans le manque et non dans le trop-plein. Faut-il ici rappeler que, dans l'étymologie latine, "précarité" a la même source que "prière"? Si ce don fait de la précarité est le seul qui vaille, c'est aussi, sans aucun doute, parce qu'il est une prière, la seule prière.

La seule prière vient du précaire en nous. Pas seulement - mais aussi, ne l'oublions jamais! - du précaire économique. Mais du précaire psychologique, du précaire spirituel, du manque, de ce manque foncier qui nous constitue tellement et que nous voudrions pourtant si vite combler - avec quoi? Avec de dérisoires remplissages!

Vénérer la précarité, c'est vénérer le Christ, qui nous montra cette économie du vagabondage et de l'éphémère pour nous raconter que, ce qui plaît à Dieu dans l'être humain, ce n'est pas son établissement, mais son aventure.

3 commentaires:

  1. Le pélérinage, à pied si possible, vers Compostelle, vers le Mont-Saint-Michel, vers Rome par la Francigena, permet de vivre une certaine précarité... Pas de voiture, incertitude des logements, très peu de vêtements... Richesse des rencontres, des beautés de la nature, de l'effort physique... Mais aussi, souvent, solitude et introspection... Prière... Je souhaite à tous de vivre le pélérinage, à pieds, à vélo, en train ou e bus, à chacun son chemin...

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  2. Oui Michel je crois en effet que c'est une bonne formule - parmi d'autres - pour rencontrer sa fragilité...

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