dimanche 8 mars 2020

Abraham, le mystère de la foi

La première lecture de ce dimanche, extraite du Livre de la Genèse (Gn 12, 1-4), nous rapportait l'appel d'Abraham, cet appel impérieux qui est, si j'ose dire, un ordre de quitter le territoire : "Quitte ton pays, ta famille, la maison de ton père, va dans le pays que je t'indiquerai…" Oser quitter, non seulement un lieu, mais davantage encore un a priori, un tic de pensée, une idéologie, partir pour rejoindre, on ne sait où, un ailleurs, un autre point de vue : la foi est un voyage. Du reste, à cette demande radicale de Dieu est accouplée une promesse : "De toi, je ferai un grand peuple, je te bénirai, je bénirai ceux qui te béniront…" Si l'on n'entendait pas la promesse, comment pourrions-nous partir?
Quitter sa tristesse pour la joie.
Quitter sa peur pour la confiance.
Quitter ses protections pour le dénuement.
Se quitter, soi, pour l'autre.
Et toujours recommencer…


Le chemin d'Abraham sera ponctué d'autres appels, plus déstabilisants les uns que les autres - ainsi la demande de sacrifier Isaac, son unique fils.
Le carême nous rappelle que nous sommes des enfants d'Abraham, par cette foi qui nous vient de lui, et qui n'est pas une adhésion extérieure à un amoncellement de doctrine, mais l'audace du grand départ toujours recommencé.


J'ai relu les pages éblouissantes que le philosophe Sören Kierkegaard consacre à Abraham, modèle indépassé d'après lui de l'humain accompli, dans Crainte et Tremblement. Pages terribles, à la hauteur du personnage - on n'a jamais rien dit de mieux sur le "père des croyants" (par exemple dans S. KIERKEGAARD, Œuvres, I, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade,  trad. R. Boyer, 2018, p. 879-975).


Le Carême, pour garder l'audace de la foi, et retrouver l'immense liberté qu'elle nous offre… Le Carême, avec Abraham!

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