samedi 21 septembre 2024

Visite du Pape, Anne de Jésus, Julia Kristeva...

 Parmi les divers motifs de la venue du pape François la semaine prochaine chez nous, il en est un qui est plus occulté que les autres : lors de la messe du dimanche 29 au Stade Roi Baudouin, il béatifiera Anne de Jésus, religieuse carmélite du XVIème siècle, compagne de Thérèse d'Avila, qui a diffusé la réforme du Carmel en France puis en Belgique et est morte (et inhumée) à Bruxelles. C'est une figure majeure de la vie spirituelle dans notre région - ce qui reste de sa Correspondance avec Thérèse d'Avila en témoigne à souhait.

A cette occasion, deux événements sont à retenir, qui se dérouleront à la Cathédrale des Saints-Michel-et-Gudule :

- le samedi 28, à 19h00, une veillée de prière pour se préparer à l'événement du lendemain, veillée animée par les frères et soeurs Carmes et Carmélites, et présidée par Mgr Lode Van Hecke, évêque de Gand.

- la veille, le vendredi 27 donc, à 20h00, une conférence qui promet d'être passionnante, donnée par Julia Kristeva - l'une des plus célèbres  psychanalystes au monde, femme de lettres, critique et passionnée par la spiritualité carmélitaine, et par les figures de Thérèse d'Avila et d'Anne de Jésus. Mme Kristeva a écrit, en 2007, un livre très important et très remarquable intitulé "Thérèse, mon amour", publié chez Fayard, dans lequel elle décrit au fil de 700 pages la révérence qui est la sienne vis-à-vis de cette littérature. Kristeva elle-même n'est pas chrétienne - elle a, dit-elle, traversé avec bonheur le christianisme, mais se sent maintenant "ailleurs". Mais elle tient à dire sa dette à l'égard de l'expérience mystique de ces femmes étonnamment libres. Déjeunant un jour avec elle, lors de la sortie de son livre, je lui avais dit à peu près ceci : "A vous lire, on se dit que, si l'on approchait de l'expérience mystique et spirituelle de Thérèse et de ses soeurs, on n'aurait plus besoin de psychanalyse..."  Réponse de cette immense... psychanalyste : "Mais c'est évident!" Que des Carmélites disent du bien d'Anne de Jésus, c'est attendu! Mais qu'une intellectuelle de cette envergure le fasse, en rappelant aux chrétiens quel trésor - souvent ignoré- ils portent dans leur Tradition spirituelle, c'est remarquable. Kristeva pense que ces femmes du XVIème siècle peuvent vraiment aider beaucoup de monde - dans et hors les frontières de l'Eglise - à vivre bien, à vivre mieux aujourd'hui. Nous l'écouterons dire pourquoi avec un très puissant intérêt...

10 commentaires:

  1. Je viendrai écouter Mme Kristeva avec grand intérêt. Merci pour cette initiative !

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  4. La béatification sert à exalter le cœur de Jésus. La psychanalyse à faire sortir des choses. Je ne était pas présente, chaque chose à son temps...

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  5. Bonjour Benoît comment evalues tu la visite du Pape en Belgique et ses diverses déclarations qui font polémique Cordialement

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  6. Aussi loin d'être chrétien que de pouvoir répondre pour l'ami Benoît, loin aussi de considérer qu'un pape se doit d'être "progressiste" ou "conservateur" - et pourquoi pas "neutre" tant qu'on y est ? -, 2 choses m'ont profondément marqué. La première est une extraordinaire occasion loupée à l'heure où, me semble-t-il, nous avons besoin, et ce besoin est politique au sens noble, de spiritualité, de "relecture", de "relience". Ce sera aux catholiques et chrétiennes, chrétiens, de répondre à des paroles qui, selon moi, auraient dû être maîtrisées de la part d'un chef d'état et religieux, afin de persévérer dans le cheminement de l'Eglise, belge en particulier. Tout autre chose est l'instrumentalisation du roi Baudouin qui, s'il était opposé à la loi sur la libéralisation de l'interruption volontaire de grossesse, et a menacé d'abdiquer au nom de sa liberté de conscience, n'en a pas moins insisté pour que la loi passe, c'est-à-dire pour que la continuité de nos institutions démocratiques (ou presque...) puisse s'exercer. Si je suis "pour" cette pratique médicale, je ne peux que m'interroger alors que 95% des foetus porteurs du syndrome de Down ("trisomie") sont avortés... Et la réponse se doit là d'être noblement politique. En bref, la plupart des critiques et commentaires m'est apparue souvent stupéfiante pour ne pas dire bête... Et je ne doute pas que, s'il en sent la nécessité, la réponse de Benoît sera d'une tout autre dimension.

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  7. Un commentaire? Certes, les propos polémiques du pape ont de quoi choquer. Mais je crois qu'il les a proférés... à dessein, et non par inadvertance (ce qui, du point de vue de ses opposants, va si j'ose dire aggraver son cas!) Nous le savons bien, en ce qui concerne le dossier de l'avortement en Belgique : certes, il y a le droit des femmes, conquis de haute lutte, de "disposer de leur corps" et c'est un droit bien légitime. Mais on veut oublier (je dis : on veut, car lorsqu'on essaie de dialoguer, cet autre point de vue est interrompu, discrédité, prié de se taire) qu'il s'agit aussi du corps d'un autre et, en l'occurrence, d'un autre "être humain" (je suis précis : je ne dis pas "personne humaine", mais "être humain", car c'est de l'être, et c'est humain.) Comme si ce point de vue ne pouvait non seulement pas être entendu, mais même pas être risqué dans le dialogue, comme si tout dialogue était clos. Le pape le sait, et il sait qu'il est une voix qui peut déranger (nous voyons par les remous provoqués que cela est d'une certaine façon réussi...), et rappeler un élément du débat volontairement passé à la trappe. Fallait-il pour cela aller jusqu'à ce que d'aucuns nomment "l'injure"? Le pape sans doute le pense, comme il ne craint pas d'allumer d'autres dirigeants européens en les accusant d'avoir transformé la Méditerranée en "cimetière", comme il ne craint pas de qualifier de "crime" la fabrication, la vente et a fortiori le trafic d'armes de guerre. Il pense, me semble-t-il, qu'il s'agit là de "coups de pied au derrière" (pour ne pas dire autre chose) que lui seul peut envoyer. Quant à l'allusion au Roi Baudouin, elle rappelle qu'en Belgique d'autres que lui ont essayé de réagir, depuis leur fonction, de la même manière qu'il essaie de le faire, et quitte à n'être ni compris ni approuvés. Les suites : on verra, et au fond peu importe, mais si un dialogue plus objectif peut en renaître, eh bien, malgré l'inconfort de ces "suites", ce ne sera certainement pas un mal!

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    1. 'Les tièdes, je les vomis' (Ap3,16). Bravo au Pape d'avoir rappelé qu'il est ... catholique !

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  8. Mon ami, heureux de te lire exprimant une perception que je ne suis que peu, je m'autorise à te répondre. Quant à ce corps qui est aussi celui d'un autre être, je te suis alors que je considère que nous ne sommes pas limités à "notre" corps. "Mon" système immunitaire est aussi l'environnement, autant que la manière de le vivre et d'y vivre d'un point de vue sociétal. Comme j'aime à l'écrire : nous traversons un Milieu (socio-environnemental) qui nous traverse. Je préfère donc le paradoxe à la contradiction ou l'opposition. Le pape a-t-il parlé ainsi de manière volontaire ? C'est certain. Peut-être suis-je un peu "vieux jeu", mais j'attends autre chose de responsables. A tort, me semble-t-il, car ce n'est sans doute pas une voie d'émancipation... Mais les Trump, Bolsonaro, Bouchez et consorts, je n'en peux plus. Notre société vire ainsi au réseau dit social. Il me semble que, si nous voulons "fabriquer" un dire politique conçu à partir de nos paroles et en faire un "prendre soin", nous devrions soigner cette parole. Quid de la poésie qui ouvre l'esprit ? Entre tripes et esprit est bien plus que ce que l'anagramme peut signifier pour nous... Ce qui me travaille dans la parole du pape est ceci : après l'attentat contre Charlie Hebdo, François avait dit à peu près "quand on insulte ta mère, tu as envie de mettre une claque" et dit qu'il fallait se retenir. Comparer un acte médical à un meurtre est tout autre chose que cette euphémisation. L'usage de l'avortement est - heureusement ou malheureusement ? ... - plus répandu que celui du terrorisme. Sommes-nous là face à une politique du nombre ou à un principe premier : "Tu ne tueras point" ? La politique du nombre est le choix de la violence. Si "insulte" il y eut, elle me semble bien contre-productive. Est retenue la parole d'un vieillard - comme si l'âge était important ! - qui semble errer entre "progressisme" - quant à l'écologie par exemple - et "conservatisme". Spiritualités et religions n'ont-elles rien d'autre à proposer ? Le temps de l’Église est-il newtonien ou einsteinien ? ... Il me semble ainsi voir en tous points la tactique politique classique et une absence de stratégie par manque de Devenir... Si François me paraît plus malin - l'intelligence est éthique, rencontre d'autrui, autres formes de vie et autres "choses" - que bon théologien, je déplore la chose car, une fois encore, l’Église me semble s'être tirée une balle dans le pied. Le monde en lequel nous vivons se défait de tout ce qui est culture - c'est-à-dire une transformation positive de son parent étymologique : la colère qui est contraire de l'amour -, de tout ce qui est tradition et permet de traverser le temps comme d'être traversé par lui. Je n'ai aucune envie de vivre en ce monde qui nous somme d'être des "mêmes différents" alors que nous sommes des êtres "singuliers pluriels". C'est en tous cas ce que m'ont appris les personnes qui usent de drogues illicites, les migrantes et migrants ainsi que les personnes au chômage avec qui, étant des leurs, j'ai eu la joie de me battre face à la politique du nombre qui veut que nous ne soyons que des êtres statistiques... Toute la différence entre la simple morale, dont je n'ai que faire, et l'éthique qui est, en la rencontre, recherche de la puissance de vivre et espérance de la joie. Nous règlerons cela au bras de fer ou au 100 mètres, l'ami !

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  9. Je me permets de revenir avec une petite précision quant à mon dernier post. Que sont les spiritualités et religions à l'origine ? Des systèmes d'acquisition de savoirs et connaissances ! Étonnant, non ? Si le Baptiste "diminue" afin que Jésus croisse, c'est que nous sommes là dans la symbolique, une symbolique liée à notre soleil. De même si Moïse (Bélier) met fin au veau d'or (Taureau), Jésus (Poisson) semble annoncer le Verseau (le porteur d'eau, Luc 22:10). Si astronomie et astrologie ne faisaient alors qu'un, nous avons là une connaissance de cycles qui durent environ 2125 années... Dans le même sens, le texte de la Genèse nous propose, "caché" derrière la symbolique, un concept mathématique, "redécouvert" en l'an 2000 par un mathématicien belge. Ce concept est, pour les Enghiennois et Enghiennoises, présent dans le Pavillon des 7 étoiles - je ne vous dis pas la tête de ce mathématicien lors de notre visite ! Notre ami Benoît fut étonné le jour où je lui dirai être non-croyant mais m'essayer à "savoir en dieu". Mais il me semble que, pour exemples, si Laudato si est LE document sur l'écologie politique et que Mgr Lemaître donna à la relativité toute sa puissance - dix ans de débats entre ce dernier et Einstein -, c'est parce que la prière, notamment, est un instrument puissant afin de nous déshabiller de croyances, y compris scientifiques, et nous permettre de "faire parler" le plus profond de notre être. Ce qui m'intéresse aujourd'hui dans l’Église (belge) est qu'elle est le lieu où l'on pourrait aborder le temps qui, avec Newton, est mesure utile et, avec Einstein, relatif si bien que nos pieds vieillissent moins vite que notre tête nous dit cette théorie prouvée. Si les positionnements "progressistes" ou "conservateurs" m'énervent au plus haut point, c'est à ce titre. A travers dieu est la notion d'éternité. Or, une nouvelle approche du Big Bang, comme celle de Hawking, permet à nouveau de penser avec ce terme. Ce que nous nommons Big Bang pourrait être la transformation d'une dimension spatiale en dimension temporelle. Il est ainsi à mes sens 3 temps : un temps éternel, qui nous est accessible par la prière, un temps vécu et mesurable ainsi qu'un temps intime. Et les spiritualités comme les religions me semblent les aborder en proposant de nous voir émettre une parole, intime, qui participe à la création d'un dire, collectif et insécable, c'est-à-dire de "faire politique" au sens le plus noble de ce dernier terme. Par la symbolique et les nombreux styles littéraires que propose la Bible, notamment, nous sommes ainsi invités et invitées à "relire" et relier" ces savoirs et connaissances. Ce que la popularisation des sciences, qui sont souvent instrumentalisées par le fait politique partisan et l'économie, ne permet plus forcément. Or, les sciences ne disent ni "la vérité", ni "la réalité" mais le haut degré de crédibilité d'une très grande probabilité. Deux petits exemples : le calcul de la vitesse du son sur Terre est impossible sur Mars où celui-ci connaît 2 vitesses. Qu'en est-il à 5 milliards d'années lumières d'ici ? Autre exemple, amusant, savez-vous que les flamants roses... allaitent leurs petits ? Ils n'ont pourtant pas plus de mamelles que ornithorynque, qui lui aussi a un bec et pond des œufs... S'il s'agit, à mes sens de "savoir", c'est avant tout combien tout est fait d'une précarité initiale et que dieu est ce qui nous dépassera toujours. A nous donc de faire du doute un chemin de joie et d'espérance !

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