dimanche 28 avril 2019

Croire sans avoir vu...

L'Octave de Pâques - ce Jour qui dure huit jours - est déjà derrière nous, cette fête entre les fêtes au cœur de notre foi. Et, au huitième jour de l'Octave, comme chaque année, l'évangile de Jean : l'apparition aux Onze, puis à Thomas le douteur, Thomas "notre jumeau" comme le texte le signale en douce.
Douter n'est pas le contraire de la foi - on craindrait même une foi qui ne connaîtrait jamais le doute, elle risquerait vite de verser dans l'intolérance, l'affirmation péremptoire, sûre de soi, volontiers méprisante pour les autres, ceux qui ne croient pas comme nous, ceux qui ne croient pas du tout… L'expérience de Thomas est par excellence l'expérience chrétienne, qui articule, spécialement dans la littérature johannique, les actes - car ce sont de vrais actes - "voir" et "croire".  Au tombeau, nous dit-on, le disciple "vit et il crut". "Si je ne vois pas, dit Thomas, je ne croirai pas." "Approche tes mains et vois, dit Jésus, cesse d'être incrédule, sois croyant." Et encore, et finalement : "Parce que tu as vu, tu as cru. Heureux celui qui croit sans avoir vu".
Il ne suffit pas de voir pour croire : il faut encore avoir l'intelligence spirituelle de ce que l'on voit, et cette intelligence  est un don de Dieu. C'est que la foi n'est pas au bout d'un scalpel, d'une démonstration mathématique ou scientifique - elle reste libre. Lorsque je vois de l'eau pure bouillir à 100° centigrades, je suis bien obligé de croire que l'eau bout à 100° centigrades. Lorsque je vois le tombeau vide, les linges rangés, les plaies du Ressuscité et le Ressuscité lui-même, si mon cœur ne se convertit pas à une "vision" spirituelle, j'ai beau voir, je ne croirai pas.  Si je n'accueille pas librement le don de Dieu, j'ai beau voir tout ce que je vois, la foi ne sera pas au rendez-vous.
Il n'y a en effet pas de preuves dans la foi, mais seulement des signes - ce n'est pas la même chose! Des signes, des congruences, des indications, des invitations, des rencontres, des hasards qui ne sont jamais des hasards mais des providences, des clins d'œil, tout ce qu'on veut - jamais de preuves scientifiques au sens où la science moderne a raison de les rechercher.
Si bien qu'un moment donné, on peut en effet ne rien "voir" avec les yeux du corps, cela n'a plus d'importance : reste la pertinence du signe qui a été perçu, qui laisse sa trace intérieure dans le cœur, qui garde béant le regard du cœur - le seul qui vaille. Et oui, dès lors, "heureux même celui qui croit sans avoir vu."
Ainsi, Thomas nous apprend que la traversée du doute est ou peut devenir une véritable expérience de la foi et, en particulier, de la foi chrétienne. Thomas, notre jumeau, Thomas, notre frère...

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire