lundi 19 août 2024

De deux manières, bien opposées, de penser l'évangélisation

 La présente réflexion fait suite et voudrait approfondir celle que j'ai faite en réaction aux propos vengeurs de certains catholiques réagissant à la cérémonie d'ouverture des JO. Je pense que le malaise est profond, entre deux conceptions tout à fait irréconciliables de l'évangélisation.

La première consiste à penser que l'Eglise doit porter l'Evangile au monde pour y pourfendre ce qu'elle estimerait être de la paganisation, de la débauche, du libertarisme, appelons cela comme nous voulons. L'Eglise qui a porté une civilisation européenne chrétienne devrait combattre jusqu'au martyre contre les lois qui, dans nos pays européens et quelquefois avec la complicité de l'Union Européenne, détruisent le mariage, légalisent l'avortement et l'euthanasie, facilitent ou du moins permettent le transgenrisme, etc. Certains sites cathos (hyper-cathos) faisaient ainsi tache, récemment, avec l'éloge unanime qui a entouré le brusque départ de Mgr Treanor : il n'aurait rien fait, comme Nonce, pour contrer, dans les pays de l'UE, ces épouvantables législations.

 Mais enfin, réfléchissons posément : est-ce le rôle de l'Eglise de s'opposer de la sorte à des changements sociétaux structurels - des lames de fond, diront les sociologues, des vagues que rien ni personne, de toute façon, ne peut endiguer, qu'on le veuille ou non. Notre société occidentale change, les moeurs y changent, les lois accompagnent ces changements et heureusement les endiguent - dans nos pays, que je sache, elles ne prescrivent rien, elles permettent et encadrent.

L'autre conception de l'évangélisation en un tel contexte parlera davantage d' "accompagnement". Plutôt que de fustiger, accueillir les personnes quelles qu'elles soient, quelle que soit leur situation matrimoniale, sexuelle, sociale, ethnique, autochtone ou allochtone. Accueillir, oui, et accompagner. Ecouter, longuement, les récits de vie - j'ai été frappé, l'autre jour, écoutant une personne "transgenre" qui se confiait à moi alors que j'étais de permanence à la Cathédrale, d'apprendre la complexité de son enfance, la rudesse des blessures reçues, combien la vie avait été cruelle pour elle - et que ce changement de genre qu'elle souhaitait, loin d'être une solution à tout bien sûr, constituait quand même un remède. Ecouter, oui, longuement, et quelquefois, mais alors rarement, parler, conseiller. Et surtout, surtout, ne jamais condamner les personnes, pour ne pas rajouter du malheur au malheur. Je ne vous étonnerai pas en vous écrivant ici que cette seconde conception a mes faveurs. Je ne pense pas me tromper, du reste, en disant qu'à lire et écouter ce qui se publie à Rome, elle a les faveurs d'un certain pape François.

mardi 13 août 2024

Funérailles de Mgr Treanor

 J'ajoute ceci à mon précédent post : les funérailles de Mgr Noël Treanor seront célébrées le vendredi 16 août à 10h00, en l'église ND des Victoires du Sablon, une église que le défunt prélat aimait particulièrement. Elles seront présidées par le Cardinal Jozef de Kesel, archevêque émérite de Malines-Bruxelles et par le Cardinal Jean-Claude Hollerich, archevêque de Luxembourg. La dépouille mortelle de Mgr Treanor sera ensuite reconduite par avion vers l'Irlande, son bien-aimé pays.

lundi 12 août 2024

Le décès de Mgr Teranor

 Nous avons appris hier, avec consternation, le décès inopiné de Mgr Noël Treanor, prélat d'origine irlandaise, Nonce Apostolique près l'Union Européenne depuis seulement deux ans. Fervent défenseur de l'intégration européenne, Mgr Treanor était un homme bon et doux, simple, rempli d'humour. Il a été victime hier matin, à la Nonciature, d'une crise cardiaque, à l'âge de 73 ans. Nous prions pour lui...

lundi 5 août 2024

Eloge de la littérature

 Je viens de lire avec bonheur la "Lettre sur le rôle de la littérature dans la formation", en particulier dans la formation des futurs prêtres, publiée hier 4 août par le pape François. Une nouvelle fois, je suis plein de reconnaissance pour la pensée de ce pape qui entend bien exalter la littérature (et les autres beaux-arts, au passage) comme un élément indispensable de formation pour les chrétiens, parce que la littérature est un lieu d'ouverture et de créativité.

C'était l'intuition déjà du grand Adolphe Gesché, le théologien louvaniste, qui estimait à juste titre devoir rajeunir l'acte théologique par sa confrontation avec le monde des livres. Comme je suis heureux de voir que, petit à petit, cette audace a fait son chemin!

dimanche 4 août 2024

Ce que cache "l'offense"...

 Je suis de ceux que les réprobations offensées de certains catholiques, suite à la cérémonie d'inauguration des Jeux Olympiques de Paris, ont exaspéré. Oh,  certes, tout n'était pas du meilleur goût dans cette fête par ailleurs fort réussie, dans ce spectacle grandiose qui reflétait bien l'esprit parisien. Mais je reste enclin à penser qu'il n'y avait là aucune provocation volontaire - il fallait vouloir voir la Sainte Cène là où, de façon obvie et du reste en résonance avec l'événement "olympique", on a sans doute voulu évoquer  le banquet des dieux de... l'Olympe, précisément.

Ce qui m'a agacé et même mis en colère, c'est l'utilisation de cette prétendue offense à des fins finalement politiques ou sociétales. Comme si la religion catholique devait être le fer de lance d'une reconquête morale et guerroyer ainsi contre une société décadente, pour y rétablir un ordre perdu. Ce détournement politique du religieux ne me dit rien qui vaille : dans l'Histoire bimillénaire des chrétiens, il a toujours été malsain, contre-productif et dangereux. Voyez, au XXème siècle encore, les manoeuvres droitières de l'Action Française entre les deux guerres, voyez chez nous, toujours au XXème siècle, la perversion du mouvement Rex, né catholique et devenu nazi. Dans ces deux cas, on se revendique du reste plus du catholicisme, que l'on apprécie pour ses capacités à structurer la société, que du christianisme - ce Mouvement, cette Voie qui conduit ses fidèles à la suite d'un Christ plutôt pourfendeur de la bonne société, qui se range aux côtés des marginaux et des sans grades et affirme sans ambages que "les pécheurs publics et les prostituées  arrivent avant les autres dans le Royaume des Cieux." (Mt 21, 31)

Les évêques se réjouissent aujourd'hui à juste titre de ce que des adultes, de plus en plus nombreux, se tournent vers le Christ et, passant par le catéchuménat, reçoivent le baptême pour devenir chrétiens. Ils ont raison de se réjouir, mais j'aimerais que cette joie se double chez eux d'une vigilance accrue : pourquoi devenir chrétien? Si c'est pour trouver en Christ une voie d'épanouissement, de salut et de bonheur, bravo. Si c'est pour partir en croisade contre une société dont on veut se désolidariser et finalement se couper, non. Mille fois non. Et ce que j'écris ici à propos des catéchumènes vaut à mes yeux et davantage encore pour les séminaristes...  Le discernement de tous est et sera de plus en plus nécessaire, pour que des catholiques arrêtent de se dire offensés quand il n'y guère d'offense, et qu'ils apprennent à vivre en paix dans un environnement qui n'est certes plus chrétien, mais néanmoins ne leur est pas a priori hostile...