dimanche 26 mai 2024

Hildegarde de Bingen : moment de grâce à la Cathédrale hier soir

 Hildegarde de Bingen, cette grande mystique chrétienne du XIIème siècle, docteur de l'Eglise, moniale, prédicatrice, visionnaire, prophétesse, botaniste et j'en passe, est à l'honneur depuis quelques semaines et jusqu'en juin à la Cathédrale de Bruxelles. Une exposition lui est consacrée, et hier avaient lieu deux conférences à son propos - dont l'une de votre serviteur. Et puis, on a entendu de magnifiques concerts. J'ai été bouleversé hier soir par la prestation de l'ensemble Ad Lucem, avec le baryton Romain Dayez et le violoncelliste Jean-Paul Dessy. Pendant un peu plus d'une heure, ils ont joué et chanté, en l'actualisant, le drame liturgique Ordo Virtutum de Hildegarde : récit d'une âme humaine en proie au doute, qui invoque les vertus divines. 

Une heure de grâce! La lumière vespérale, douce, déclinante, donnait ses derniers feux de la journée,  les vitraux de la Cathédrale peu à peu s'éteignaient,  la puissance de la voix de Romain Dayez vous conduisait au plus intime de vous-même, là où se joue le perpétuel combat spirituel.

Oui, un moment de pur bonheur!

lundi 20 mai 2024

Nous allons bientôt voter...

 Nous allons bientôt voter... entre autres, pour élire le Parlement de l'Union Européenne. Je ne m'exprime guère en matière de géo-politique, n'y connaissant pas grand-chose. Mais je relaie ici les perplexités d'un confrère libanais qui, commentant la nouvelle selon laquelle l'UE a décidé de débloquer un milliard d'euros par an en faveur du Liban, s'interroge. 

Cet argent ne va-t-il pas contribuer, purement et simplement, non pas à aider les ressortissants syriens qui affluent dans ce petit pays, à rentrer chez eux, mais au contraire à armer le Hezbollah qui ne pense qu'à reprendre la guerre contre Israël? Les intérêts de l'Europe peuvent paraître philanthropiques : aider une nation amie qui souffre d'un grand déficit démocratique à cause de la situation explosive au Proche-Orient. Mais on voit bien l'intention plus cachée : éviter (c'est la contrepartie annoncée par l'UE) que les réfugiés syriens ne débarquent, via Chypre, en Europe.

Autrement dit : on vous paie pour faire le sale boulot, et débrouillez-vous avec vos réfugiés, mais surtout empêchez-les  de débarquer chez nous.

Belle mentalité!

Il faut voter, bientôt. Pour ça?

dimanche 5 mai 2024

Nouvelles de Rome


 Rentré jeudi soir de Rome, après quelques jours intenses (8h00-21h00) d'un Congrès qui aura porté sur "la synodalité" comme exercice spécifique de la vie fraternelle et de la prise de décision en Eglise. Etrange animal, direz-vous, que cette "synodalité" - étymologiquement, une manière de faire route ensemble, en se plaçant dans l'écoute de l'Esprit Saint par la prière, l'attention portée à la Parole de Dieu et surtout aux points de vue de chacun, avec une pédagogie et des procédures très spécifiques. L'Eglise s'est débarrassée (du moins espérons-le) de son modèle monarchique de fonctionnement; elle n'est pas une oligarchie ou une aristocratie. Elle n'est pas non plus simplement une démocratie, surtout quand la démocratie fonctionne comme une pure et simple addition de voix pour arriver à une majorité. La synodalité emprunte certes des éléments à la démocratie, mais ne s'y réduit pas - notamment par l'écoute d'une Parole, répétons-le, qui dépasse ceux qui se concertent pour une prise de décision à travers des "conversations dans l'Esprit" largement inspirées de la tradition ignatienne (le pape est... un jésuite, ne l'oublions jamais!) François entend ainsi ouvrir l'Eglise et ses fonctionnements à une manière à la fois traditionnelle et innovante de vivre ensemble et de décider ensemble. La question qui nous occupait devenait dès lors multiple, à savoir : comment concilier cette méthode et l'autorité canonique du "curé", voire plus largement du ministère ordonné? Comment cette proposition devrait-elle conduire à la révision d'un certain nombre d'articles du Code de Droit Canonique? Cette manière de procéder pourrait-elle inspirer des prises de décision en-dehors de l'Eglise, et par exemple dans des domaines géo-politiques? Ajoutons que nous avons non pas d'abord assisté passivement à des exposés qui nous expliquaient la synodalité, mais travaillé en petits cercles qui la pratiquaient. Rencontres enrichissantes, donc, ne serait-ce que par les échanges entre curés venant d'horizons très divers (dans mon groupe francophone : un Luxembourgeois, un Français, un Libanais, un Camerounais, un Togolais, un Ivoirien, un Italien francophile, un Canadien; pour l'ensemble du Colloque, 99 pays représentés.)

Jeudi matin, nous avons longuement rencontré le pape, qui est en très bonne forme, sauf sa mobilité. Il a beaucoup plaisanté et ri avec nous, au cours d'un échange par ailleurs très direct dans lequel il a redit sa volonté de contribuer par tous les moyens à la paix dans le monde, même si on ne comprend pas toujours cette posture évangélique. Les guerres ne servent à rien, dit-il en substance, elles finissent toujours par des armistices et des compromis, mais après des boucheries épouvantables et des malheurs sans nom pour des populations entières. Elles n'apportent aucun profit à personne, sauf aux marchands d'armes...

En le saluant, je lui ai dit que nous l'attendions en septembre à Bruxelles ("Santità, la aspettiamo con gioia in Belgio  in settembre") et il m'a avec un grand sourire répondu "Si, si, ci vedremo allora!"

Et maintenant, il me faut écrire un rapport pour la Conférence des évêques. J'ai commencé mais  c'est un gros travail! Au boulot!